W – 12 800 à 12 000 AEC
Tardiglaciaire
Interstade Pré-Bölling : 12.800 à 12.100 AEC
Dryas très ancien / Dryas-1b : 12.100 à 12.000 AEC
MIS 2 (6/9)
W – 12.800 à 12.000 AEC – Tardiglaciaire
Climat
Le Pré-Bölling – parfois appelé interstade de Meiendorf – fut la première oscillation tempérée d’un complexe globalement tempéré qui associe également le Bölling et l’Alleröd ainsi que les modestes refroidissements qui scandèrent leur succession ; l’ensemble réalisant le GI-1 dans sa totalité. Au sein de ce complexe, nous associons le Pré-Bölling au GI-1e qui dura de v. 12.800 à 12.100 AEC. C’est par cet interstade qu’il faut faire commencer l’époque tardiglaciaire car il s’est véritablement agi d’une période de transition marquée pour le climat de la planète et donc pour les sociétés humaines d’Eurasie qui connurent une nouvelle phase d’expansion et par conséquent de mouvements migratoires. Cette transition fut pratiquement aussi importante que celle qui surviendra 3000 ans plus tard, à la charnière entre le Dryas-3 et l’Holocène. Dans les deux cas, le paysage haplogroupal ADN-Y de la planète fut fortement remanié.
Dans les commentaires de la carte U, nous avons expliqué l’absence de consensus franc pour définir les limites de chacune des oscillations qui composèrent le Tardiglaciaire. C’est ainsi que le Pré-Bölling est parfois purement et simplement intégré au Bölling dont la durée se trouve alors étendue d’autant ; dans ce cas-là, une impasse est faite sur la brève oscillation froide que nous nommons ici Dryas très ancien 1b et que nous associons au bref refroidissement GI-1d de la séquence glaciaire groenlandaise (v. 12.100 à 12.000 AEC).
Le réchauffement ne se fit pas sentir aussi rapidement dans l’océan que sur le continent eurasien, de telle façon que l’évaporation marine fut encore modeste ; ainsi, bien que plus chaud, le climat du Pré-Bölling ne fit qu’amorcer l’élévation de l’humidité.
L’Asie Centrale commença cependant à bénéficier de ce modeste regain d’humidité, au grand profit probable des Humains de la région. Plus tard au cours du Tardiglaciaire, des rivières et des lacs parsèmeront ces régions redevenues aujourd’hui complètement désertiques, et le Zeravchan, affluent de l’Oxus, deviendra une majestueuse rivière. De même, les actuels déserts du Kyzylkoum, de Karakoum et du plateau d’Ourst-Oust, furent occupés au Pré-Bölling par des communautés humaines qui y chassaient l’aurochs, observation qui implique l’existence de forêts et/ou de steppes forestières. Ces conditions idéales durent s’initialiser au Pré-Bölling et elles perdureront jusqu’à la fin de l’Holocène moyen [cf. atlas n°4].
La grande plaine de l’Europe du Nord se recouvrit d’une forêt toundra, repoussant comme il se doit la zone de toundra à la limite de l’inlandsis qui entama dès le Pré-Bölling un recul rapide vers le Nord. Cette grande plaine s’étendait plus loin qu’aujourd’hui en direction du Nord, le Doggerland étant exondé.
En Afrique, la mousson recommença à arroser le massif éthiopien, augmentant le débit du Nil et faisant déborder les lacs ougandais. Ainsi, les marécages de Sudd furent rétablis. Il faut considérer le pré-Bölling comme une période de transition entre l’aride Léopoldvillien et l’humide Kibangien dans lequel nous vivons toujours.
Afrique
Afrique du Nord
Sur la côte méditerranéenne, l’Ibéromaurusien (IBE) se prolongeait. C’est de cette époque, v. 13.000 AEC, que datent les individus *Ibéromaurusiens E-M78* retrouvés à Taforalt.
Dans le monde *Para-Ibéromauruso-Natoufien E1b*-M35de la haute vallée du Nil, le Gemaïen fut remplacé par des cultures mésolithiques appelées Qadien (QAD) en Nubie et Sébilien (SEB) en Haute-Egypte ; lesquelles allaient durer jusqu’au début de l’Holocène. Le terme de mésolithique signifie le passage à une économie accumulatrice et très vraisemblablement à une forme de sédentarisation partielle ou totale. L’agriculture n’était pas connue, mais les gens de Haute-Egypte et du Soudan ramassaient déjà des graines sauvages qu’ils broyaient sur des meules de pierre. Contrairement à ce qui est parfois avancé, les poteries alimentaires n’étaient probablement pas encore connues dans la vallée du Nil où elles feront plus probablement leur apparition au début de l’Holocène [cf. atlas n°4]. Sur le plan génétique ADN-Y, nous proposons que le Sébilien était basé sur E-Z1919 et le Qadien sur E-Z1902 ; dans les deux cas, il s’agit de variants de E-M35*qui existent toujours dans la région des deux Nils et en Ethiopie.
Plus au Nord, les cultures *Proto-Natoufiennes du Moyen- et du Bas-Nil restent mal connues au Pré-Bölling. Mais il est probable qu’elles étaient de même nature mésolithique que les cultures mieux connues du Haut-Nil ; ainsi que l’on est en droit de l’inférer lorsqu’on compare celles-ci à la culture Mushabienne qui était très vraisemblablement celle d’un groupe du Bas-Nil qui s’était installé au Sinaï [cf. carte V]. Ces gens du Bas-Nil étaient vraisemblablement porteurs des haplogroupes E-M310.1 et E-M830, les deux variants de Eb1b1b-M827 que nous retrouverons chez les Natoufiens. Ci-dessous, nous aborderons la question de la migration de ces haplogroupes chez les peuples Kébariens Géométriques du Levant ; évènement qui fut à l’origine de la culture Natoufienne.
Afrique Tropicale
Les peuples *Rétro-Africains d’Afrique de l’Est – basés sur l’haplogroupe E – avaient connu une première fragmentation quand des tribus E1b1b1-M35.1 étaient parties fonder un groupe *Proto-Ibéro-Natoufien dans la vallée du Nil ; parce que celle-ci venaient de redevenir habitable au LGM après une très longue période d’aridité [cf. carte R]. Le chapitre ci-dessus faisait le point sur la postérité Pré-Bölling de ce surgeon nordique de l’haplogroupe E qui entreprendra ultérieurement une seconde rétromigration africaine, lorsque les peuples Afrasiens du Levant coloniseront toute l’Afrique du Nord et de l’Est au cours du néolithique [cf. atlas n°4].
Ensuite, c’est au début du Tardiglaciaire que nous proposons une seconde fragmentation du groupe *Rétro-Africain, en direction de la bande sahélienne cette fois-ci. Cette date est loin d’être établie et nous avons également envisagé de la situer au cours de l’interstade de Lascaux [cf. carte T]. Toutefois, le Tardiglaciaire constitue une bonne hypothèse parce que la ré-humidification de la bande sahélienne dut nécessairement créer une revitalisation des faunes et donc un puissant appel migratoire. A ce propos, il faut rappeler qu’ailleurs dans le Monde, le Tardiglaciaire semble avoir été le théâtre d’un important bouleversement du paysage haplogroupal ; il n’y aurait donc rien d’étonnant à ce que ce fut également le cas en Afrique. Dans la reconstitution que nous proposons, cette seconde fragmentation était celle qui porta les haplogroupes DE*, E1a1 et E1a2 en Afrique de l’Ouest où ils se trouvent pour l’essentiel aujourd’hui. L’haplogroupe DE* d’Afrique de l’Ouest est aujourd’hui devenu un ‘’fossile vivant’’ résiduel mais extrêmement intéressant dans la mesure où l’on trouve aussi des variants de DE* en Asie du Sud-Est et au Tibet où ils sont les précieux vestiges de la première migration moderne hors du ‘’hub’’ moyen-oriental. Quant à E1a1 et E1a2, ils sont bien représentés dans le Finis Terrae de la région atlantique d’Afrique de l’Ouest où ils ont certainement contribué à écraser les vieux haplogroupes A et B en attendant d’être eux-mêmes écrasés par la migration Nigéro-Kordofanienne [cf. atlas n°4]. Nous proposons de nommer *Ouest-Africain ce groupe qui partit en éclaireur peupler la bande sahélienne en train de reverdir, mais dont il faut admettre qu’il n’était pas l’ancêtre patrilinéaire de la majorité des Africains de l’Ouest d’aujourd’hui. Toutefois, les Dogons et les Idjo actuels conservent une fréquence élevée de E1a qui est le vestige de cette vague migratoire ; et les langues de ces peuples – qui bien que nigéro-kordofaniennes présentent quelques particularités – pourraient conserver quelque chose de celle de leurs ancêtres patrilinéaires *Ouest-Africains.
Dans la bande sahélienne accueillante du Tardiglaciaire, ce peuple affranchi des abords du massif éthiopien commença peut-être à développer une certaine forme de proto-agriculture, à l’instar de leurs cousins *Quadiens et *Sébiliens de la vallée du Nil et de leurs cousins *Natoufiensdu Levant. Nous désignons par ce thème une cueillette extensive dans un environnement végétal riche, qui pourrait avoir permis l’existence de groupes sédentaires de chasseurs-cueilleurs et donc le développement précoce d’une société proto-villageoise. Il s’agissait, pour l’heure, d’un Mésolithique acéramique, car ces peuples sahéliens n’inventeront pas les poteries alimentaires avant le milieu du X° siècle AEC, c’est-à-dire au début de l’Holocène.
A la même époque, les populations *Rétro-Africainesdemeurées en Afrique de l’Est devaient être réparties en deux sous-ensembles géographiques :
- Sur le plateau Ethiopien, les groupes *Paléo-Ethiopiens ne sont parvenus jusqu’à nous que sous la forme d’une série d’haplogroupes mineurs (comprenant les formes racines E-M35* de E-M35 et d’autres). Ils resteront ethniquement et technologiquement stables jusqu’à l’arrivée des populations pastorales *Afrasiennes qui les envahiront au Néolithique, au décours d’une série de vagues migratoires en provenance des plaines d’Arabie [cf. atlas n°4]. Leurs langues n’ont pas laissé de traces décelables, même si elles ont nécessairement constitué un substrat qui dut influencer les langues de leurs envahisseurs (Omotiques, Couchitiques, Sémitiques).
- En bas du plateau éthiopien, les tribus d’haplogroupe E du Nord-Kenya, de l’Ouganda et du Soudan, formaient un ensemble Congo-Saharien encore globalement homogène, que la phylogénie linguistique permet de situer à l’origine de deux grandes familles de langues africaines qui étaient encore à venir à l’époque du Pré-Bölling : la Nigéro-Kordofanienne et la Nilo-saharienne. Leurs haplogroupes principaux devaient être E2, E1b1a1 et des formes E1b1b* (en position racine par rapport à E-M35).
Afrique du Sud
Situation ethnolinguistique inchangée.
Eurasie
En Eurasie du Tardiglaciaire, les haplogroupes ADN-Y pré-LGM furent malmenés par de nouveaux haplogroupes qui les remplacèrent partiellement en de nombreuses régions. Cette explosion des ‘’haplogroupes mésolithiques’’ doit être comprise comme une répétition générale de ce qui se passera à nouveau 3000 ans plus tard, au début du Néolithique. Pourquoi ? Au temps du Néolithique (économie productiviste et accumulatrice), le succès des nouveaux haplogroupe ADN-Y découlera d’une fécondité bien plus importante des groupes néolithiques intrusifs, comparée à celle des groupes indigènes non-productivistes ; lesquels seront donc marginalisés dans un premier temps, avant que certains d’entre eux parviennent à s’acculturer au nouveau mode de vie, ce qui leur permettra à leur tour d’acquérir une fécondité importante [cf. atlas n°4]. De la même façon, le succès des haplogroupes ADN-Y tardiglaciaires découla d’une augmentation de la fécondité des peuples qui venaient de se convertir au mode de vie mésolithique (économie non-productiviste mais accumulatrice) dans les régions où l’amélioration des conditions climatiques venait de permettre la sédentarisation. A contrario, les populations de toutes les régions où le climat invitait à prolonger l’ancien mode de vie paléolithique (économie non-productiviste et non-accumulatrice) demeurèrent très peu fécondes et donc très peu nombreuses ; ce qui eut pour conséquence de faire baisser la proportion de leurs haplogroupes sur l’échiquier mondial des haplogroupes ADN-Y. De sorte que nous devons admettre qu’une grande partie de l’antique gamme haplogroupale fut certainement perdue au profit de quelques haplogroupes qui eurent la chance d’être ‘’standardisés’’ par leur succès : succès mésolithique d’abord, puis succès néolithique ensuite ! Seule des études archéogénétiques extensives pourraient vraiment nous donner accès à la variété des haplogroupes ADN-Y paléolithiques disparus au cours de cet écrémage ; nous ne pouvons pour l’instant que tenter de les reconstituer dans les grandes lignes, ainsi que nous le faisons dans cet atlas.
Asie Sud-Orientale (Inde, Indochine, Sunda, Sahul)
Au cours de l’agitation tardiglaciaire des peuples, il est probable que l’Inde connut de nouveaux apports populationnels venus du plateau iranien ; nous en avons déjà placé certains aux époques précédentes, mais peut-être à des dates erronées ? En effet, les données sont encore bien trop pauvres pour prétendre fixer des dates fiables. Ainsi, dans le cas particulier de l’Inde, il est encore difficile de décider si les haplogroupes mineurs de R1a et R1b (i.e. R1b2, R1b1b, R1a2) ou bien encore l’haplogroupe Q2b, s’installèrent au Tardiglaciaire ou beaucoup plus tard ? Par exemple à califourchon sur le dos des chevaux Indo-Européens, voire plus tardivement encore, lors des invasions musulmanes ou Mogholes ? Les travaux archéogénétiques et les progrès de la phylogénie haplogroupale nous aideront certainement à mieux comprendre l’épaisseur chronologique et le détail de ces mouvements.
Sans certitude donc, nous pouvons tenter de placer vers cette époque l’établissement de T1 au Bengale et sur les côtes de l’Andhra Pradesh et de l’Orissa où cet haplogroupe entrera dans la cristallisation ethnique complexe des Dravidiens.
En Indo-Sunda, l’Hoabinhien (HOA) succéda sans rupture évidente à l’ancien faciès Sonvien. Nous avions placé une phase de transition au cours du Dryas-1a car les progrès sont difficiles à définir dans cette région [cf. carte V]. L’identification de l’industrie hoabinhienne repose sur la fréquence de certains outils appelés sumatratithes, qui consistent en des éclats uniformément détachés sur toute la circonférence de galets servant de matrices non préparées. Ce technocomplexe dont il faut assumer de dire qu’il était ‘’en retard’’, perdurera encore longtemps, jusqu’au milieu de l’Holocène. Nous l’avons attribué à un peuple *Proto-Papouasien porteur des haplogroupes M et S, membres de la famille K2b et par conséquent proches des grands haplogroupes Eurasiatiques, ce qui a déjà été plusieurs fois souligné [cf. cartes Q & suivantes]. Nous avons également proposé que la modeste évolution technologique que constitua l’Hoabinhien, découla de la pression de sélection qui favorisait peu à peu les gènes normo-cognitifs chez des populations qui exprimaient cependant toujours une forte proportion de gènes pauci-cognitifs.
La pauvreté des données disponibles ne permet pas de repérer une évolution du paysage ethnolinguistique au Sunda où nous plaçons toujours le peuple *Proto-Australien,c’est-à-dire les ancêtres patrilinéaires majoritairement C1b2 des Aborigènes actuels.
Plus loin, le Sahul devait rester peuplé par des porteurs *Paléo-Australiens de l’haplogroupes DE* dont la variété nous échappe totalement en absence de travaux archéogénétiques, puisque ces peuples sont aujourd’hui éteints en lignée patrilinéaire. La séparation de la Tasmanie leur permit toutefois probablement de survivre jusqu’au XIX° siècle sur cette grande île.
Asie Extrême-Orientale (Chine, Corée, Japon, Mandchourie, Mongolie)
En Mandchourie, la culture Osipovka (MES YUB OSI) du Bas-Amour constituait déjà un Mésolithique céramiquedont nous avons placé le début v. 14.000 AEC [cf. carte V]. Au Pré-Bölling, la technologie des poteries alimentaire commença à diffuser vers l’Ouest en remontant la vallée du Moyen-Amour (site de Gromatukha), sans qu’il soit possible de dire s’il s’agissait d’une simple acculturation de proche en proche ou d’un mouvement de peuple ? La dynamique populationnelle proposée invite cependant à attribuer cette culture céramique à des populations Yubetsu porteuse de l’haplogroupe C2b1 et donc à des gens qui étaient proches parents des Na-Déné-Ienisseïens qui vivaient plus loin au Nord. Raison pour laquelle nous les nommons *Para-Na-Déné-Ienisseïens. Leur mode de vie devait être sédentaire. Plus loin, en Mongolie Orientale, d’autres C2b1 vivaient peut-être déjà depuis l’époque de Lascaux [cf. carte T].
C’est probablement à cette époque que le littoral de la mer d’Okhotsk commença à être peuplé à partir de groupes qui vinrent nécessairement de Mandchourie et qui, pour cela, devaient être *Para-Na-Déné-Ienisseïens et C2b1. La culture était de type Yubetsu / Dyuktai (YUB).
Nous avons précédemment proposé que le peuple *Eurasiatique oriental N1* – dont nous avons souligné la très longue histoire cryptique – avait été chassé de Mongolie au LGM en raison de l’aridité extrême, et avait introduit le concept de miniaturisation des outils en Chine du Nord, en Corée et en Mandchourie [cf. carte R]. Depuis le LGM, nous avons proposé que le gros de ce peuple – désormais appelé *Proto-Ouralo-Altaïque – vivait en Mongolie intérieure et en Chine du Nord-Est parce que l’archéogénétique identifiera des formes basales N1* au cours du Néolithique local [cf. atlas n°4]. La grande coupure entre les variants N1a(essentiellement Nordique) et N1b (essentiellement chinois) pourrait dater du Pré-Bölling, v. 12.500 AEC, et pourrait avoir anticipé la migration de N1a vers les bassins de l’Orkhon et de la Selenga (Mongolie Centrale), rendue possible par un désert de Gobi devenu moins aride. Nous placerons au Bölling cette migration à l’origine de la cristallisation du peuple Ouralo-Altaïque [cf. carte X]. Pour l’heure, le désert de Gobi, quoique probablement déjà moins extrême, y faisait toujours obstacle.
La boucle du fleuve Jaune et l’Ouest de la Chine du Nord pourraient avoir été le domaine de populations *Sinitiques / Sino-Tibéto-Birmanes C2c.
Ce sont probablement des groupes de cette population qui commencèrent alors à peupler le plateau central du Tibet à partir du Qaidan / Qinghaï et en remontant la haute vallée du fleuve Jaune. Certains chercheurs ont avancé que ces régions situées entre 4000 et 5000 mètres d’altitude avaient été peuplées plus tôt que cela, dès le LGM. Mais les sites tibétains sont presque tous mal datés. Cette hypothèse a donc été contestée et il est plus logique d’admettre un âge Pré-Bölling pour ce premier peuplement, aux alentours de v. 12.500 AEC. On verra dans ce mouvement humain l’origine du Mésolithique Tibétain Septentrional (MES TIB SEP). Sur le plan ethnolinguistique, il s’agissait de *Proto-Tibétainsissus du groupe *Sinitique et dont la langue était probablement déné-caucasienne. Toutefois, c’est au cours de l’Holocène que les ‘’véritables’’ Tibétains actuels viendront se greffer sur ce substrat tardiglaciaire, à partir d’une même base *Sinitique [cf. atlas n°4]. Au Pré-Bölling, ces *Proto-Tibétains durent se superposer aux indigènes D1a qui furent marginalisés mais dont l’haplogroupe existe encore ; c’est probablement via ces indigènes que les Tibétains firent l’acquisition des gènes facilitant la vie en altitude, lointainement transmis jusqu’à eux en provenance du temps où avaient eu lieu l’hybridation des premiers Hommes modernes d’Extrême-Orient avec les Hommes archaïques locaux.
Dans la plaine du fleuve Jaune, les *Sinitiques demeurés sédentaire pourrait dès à présents être appelés Chinois. Plus tard, c’est la conversion au mode de vie néolithique qui assurera la postérité de ce groupe vénérable.
Au Sud du massif, les vieux peuples DE* formaient toujours un peuple *Paléo-Tibétain dont la culture demeurait primitive.
Le Japon s’était converti vers 15.000 AEC à un Mésolithique céramique, actant le début de la culture Jomon (JOM)naissante [cf. carte U]. A partir du Japon Central où elle semble avoir émergé, la fabrication des poteries alimentaires diffusa progressivement vers le Nord et atteignit Hokkaido v. 12.500 AEC. Mais peut-être cela signifie-t-il simplement que c’est seulement alors que les tribus d’Hokkaido commencèrent à adopter un mode de vie mésolithique et à se sédentariser, comme les tribus de Honshu l’avaient fait avant elles ? A l’instar de leurs voisins du continent, ces peuples Aïnous Jomon maniaient la technique microlithique Yubetsu.
La Chine du Centre avait été pionnière en matière de Mésolithique céramique. Toutefois, la Chine au Sud du fleuve Bleu demeurait une mosaïque culturelle – et probablement ethnique – complexe, avec : les peuples Austriques d’haplogroupe O et de culture *QPS, qui ignoraient le Microlithisme qui prévalait au Nord ; et des populations *Paléo-Tibétaines D1a, conservant des industries plus anciennes dans les montagnes de l’Ouest.
Asie Septentrionale (Asie Centrale, Sibérie Occidentale, steppes, Altaï, Baïkalie, Sibérie Orientale, Alaska, Amérique du Nord)
Dans les steppes asiatiques – potentiellement dans les steppes de l’Irtych et la steppe de Baraba – le *Peuple R1a du Nord avait pour culture matérielle un Microlithique Paléolithique Supérieur Récent (MIC PSR) qui était proche de la culture d’Afontova Gora ; laquelle comprenait une composante Yubetsu (nuclei en forme de coin) sur un vieux fond majoritaire de type occidental (nuclei prismatiques) hérité de Malaya Siya (pré-LGM) et de Mal’ta (LGM). L’haplogroupe R1a1a1b-Z645/S224 était peut-être majoritaire dans cette population ; un jour il donnera naissance à ses grands variants R1a1a1b2-Z93 et R1a1a1b1-Z283 qui s’incorporeront, plus tard encore, dans la cristallisation des Indo-Européens orientaux [cf. atlas n°4]. Nous proposons de placer à la même époque le déplacement des porteurs de R1a1a1a-Z2463 ou plutôt de son important rameau R1a1a1a1-L664 qui dut nécessairement cheminer en Europe orientale ; les tribus R1a-L664 s’installeront un jour dans les régions baltico-fennoscandinaves dans lesquelles elles s’intègreront à la cristallisation du peuple Germanique et suivront ensuite ses aventures ; ce qui explique sa distribution actuelle.
Sur le Haut-Ienisseï, à proximité des steppes de l’Angara, la culture d’Afontova-Gora (AFO) était portée par des peuples Q1a1-F746 dont l’haplogroupe est attesté par l’archéogénétique. Nous en avons précédemment fait une nation *Proto-Eskaléoute parce que cet haplogroupe est aujourd’hui présent chez les membres de cette famille ethnolinguistique. Cette tentative d’identification pourrait se heurter au fait que les gens d’Afontova-Gora et de Kokorevo-2 connaissaient la technique Yubetsu (détachement par pression de microlithes à partir de nuclei en forme de coin), tandis que les gens de Sumnagin – ancêtres plus direct des Eskaléoutes – utiliseront des nuclei prismatiques et bouderont la méthode Yubetsu ; toutefois, comme leurs devanciers de Malaya Siya (pré-LGM) et de Mal’ta (LGM) ; les gens d’Afontova Gora et de Kokorevo continuèrent bel et bien d’utiliser des nuclei prismatiques tout au long de leur culture parallèlement aux nuclei en forme de coin, observation qui n’interdit donc pas de les situer en position ancestrale des *Proto-Eskaléoutes [cf. carte Z & atlas n°4].
Au Pré-Bölling, une fraction de ce peuple Q1a1-F746, venue du Haut-Ienisseï et de l’Angara, pourrait avoir migré en Cis-Baïkalie et avoir constitué un groupe humain dont sortira à la fois un peuple *Proto-Kitoï et un peuple *Proto-Eskaléoutes qui se détachera du précédent pour partir vivre dans les vallées de la Moyenne-Lena et de l’Aldan [cf. carte X] ; pour ces raisons, nous nommons *Proto- Eskaléo-Kitoïce peuple primordial. Si l’on considère le morphotype Mongoloïde des deux ethnies que nous leurs donnons pour postérité, ces gens pourraient avoir commencé d’exprimer ce phénotype extrême-oriental acquis au contact des indigènes C2b1 de Cis-Baïkalie, qui s’étaient installés dans la région 3500 ans plus tôt [cf. carte U]. Il serait excessif de dire que l’archéologie valide ce roman. Cependant, remarquons que la méthode Yubetsu avait dû être introduite en Cis-Baïkalie à partir de régions mongoloïdes situées en Extrême-Orient où cette technologie avait autrefois émergée [cf. carte U]. Plus tard, les ossements du peuple Holocène Kitoï de Cis-Baïkalie seront identifiés comme Mongoloïdes, tandis que leurs propriétaires produiront toujours à la fois des microlithes Yubetsu à partir de nuclei en forme de coin et d’autres types de microlames à partir de nuclei coniques et prismatiques, c’est-à-dire selon la vieille technique PSM autrefois répandue à l’Ouest de l’Eurasie. Au début de l’Holocène, la culture Mésolithique Sumnagin des *Proto-Eskaléoute sera toujours basée sur cette vieille technique occidentale mais aura presque complètement laissé tomber la méthode Yubetsu sans qu’on en comprenne vraiment la raison [cf. carte X & suivantes & atlas n°4].
Notons que ces mouvements complexes que nous proposons pour reconstituer l’histoire des populations d’haplogroupe Q1, permettent d’expliquer pourquoi les premiers Amérindes Q1 étaient Europoïdes, tandis que leurs proches parents patrilinéaires Eskaléoutes Q1 exprimeront in fine le morphotype Mongoloïde que nous leur connaissons aujourd’hui : c’est parce que les *Proto-Amérindes europoïdes Q1 avaient emprunté le boulevard de la Lena avant l’installation des Na-Déné-IenisseïensMongoloïdes C2b1 sur la Moyenne-Lena ; tandis que les *Proto-Eskaléoutes (initialement Europoïdes) s’installeront après eux dans cette même région où ils commenceront à absorber les tribus Mongoloïdes locales Na-Déné-Ienisseïennes ; métissage qui ira probablement en se renforçant tout au long du boulevard de la Lena, lorsque les Eskaléoutes coloniseront le Grand-Nord au début de l’Holocène [cf. atlas n°4].
Mais au Pré-Bölling, la population Yubetsu *Na-Déné-Ienisseïenne C2b1 était toujours installée sur la Moyenne-Lena et sur l’Aldan. Dans le contexte du réchauffement climatique qui autorisait la reconquête des terres abandonnées au début du LGM, il est probable que les Humains recommencèrent à peupler le Grand-Nord sibérien : des bandes Yubetsu / Dyuktai C2b1 de l’Aldan et de la Moyenne-Lena descendirent la vallée de ce grand fleuve, tandis que des bandes PSM Q1b1-Z780 et Q1b1-M3*Para-Amérindes s’avançaient à leur rencontre, dans les plaines situées à l’Ouest de la Béringie. La rareté des sites et des vestiges mis au jour, la difficulté à les attribuer précisément à une culture donnée, et la marge d’incertitude chronologique, ne nous permettent pas d’aller au-delà de cette spéculation. Sur la carte, nous donnons à ces hypothétiques *Para-Amérindes de Sibérie orientale, une culture *Pré-Nenana (PSM PRE NEN) non attestée par l’archéologie. Le véritable complexe Nenana – à base PSM et non Dyuktaï – sera une culture du Bölling [cf. carte X] qui s’hybridera avec le complexe Yubetsu au cours de l’Alleröd [cf. carte Y], à l’origine mixte du complexe Denalien / Denali [cf. carte Z].
Depuis environ 15.000 ans déjà, la plaine de Béringie permettait le passage vers l’Alaska des faunes froides de Sibérie Orientale. Les *Amérindes – encore indivis – avaient survécu là pendant très longtemps ; même si certains d’entre eux avaient pu emprunter la route côtière pour descendre le long des rivages de l’Amérique du Nord ? Ce qui est loin d’être avéré. Cependant, les glaces continentales barraient la route terrestre. C’est au début de l’interstade Pré-Bölling, v. 12.800 AEC, que la masse de l’inlandsis se rétracta en deux calottes glaciaires de superficies inégales (petite à l’Ouest, grande à l’Est) ; ceci ménagea entre elles un passage appelé corridor de Mackenzie ; lequel autorisa la migration des faunes asiatiques en Amérique du Nord. A leur façon, les Humains de l’époque faisaient encore partie intégrante des faunes : les Amérindes empruntèrent alors le passage et se mirent très rapidement à coloniser l’Amérique du Nord où ils ne rencontraient aucun compétiteur et donc aucun obstacle à leur progression. Ce fut le début de l’époque Pré-Clovis qui n’est connue que par quelques sites américains ; la véritable culture Clovis se développera seulement au cours de l’Alleröd [cf. carte Y].
Asie Occidentale (Proche-Orient, Moyen-Orient, Proche-Orient, Anatolie, Arabie)
Le Levant Kébarien géométrique du Dryas-1a était déjà complexe sur le plan haplogroupal ; en effet, le peuple *Kébarien exprimait peut-être les haplogroupes CT*, IJ*, J*, ainsi que de nouveaux haplogroupes arrivés du Nord (dont R1b-V88 et beaucoup d’autres) ? Dans le même temps, nous avons dit que la culture Mushabienne du Sinaï était nécessairement issue des cultures de la Moyenne- et de la Basse-Egypte qui sont très mal connues au Tardiglaciaire [cf. carte V]. C’est probablement au début du Pré-Bölling que ces groupes de Basse-Egypte et du Sinaï introduisirent au Sud-Levant les haplogroupes E‑M310.1 et E‑M830 (deux variants d’E-Z827, lui-même variant d’E‑M35.1) que l’archéogénétique révèle à partir d’ossements natoufiens aux alentours de 12.500 AEC. Ainsi, les tribus venues du Nil furent probablement le ferment du Natoufien ancien (NAT) (Pré-Bölling) qui était en même temps un Mushabien récent. C’est sur cette base que dut cristalliser un peuple *Natoufien. Le fait que ses proches cousins méridionaux de la grande vallée – *Sébiliens et *Qadiens – vivaient dans une société mésolithique ‘’proto-agricole’’ et acéramique, est un élément de réflexion à ne pas négliger lorsqu’on s’interroge sur l’origine de la culture natoufienne, qui était elle aussi ‘’proto-agricole’’ et acéramique. Certes, l’agriculture la plus ancienne n’a pas été inventée dans la vallée du Nil ni dans la bande sahélienne ; mais toutes ces régions redevenues verdoyantes furent assurément le terrain précoce d’une proto-agriculture, si nous convenons d’appeler ainsi la cueillette à grande échelle dans des champs et des vergers spontanés qui étaient suffisamment généreux pour permettre à des communautés humaines de se sédentariser à leur voisinage.
Le mouvement migratoire africain que la génétique moderne incite à placer à l’origine de la culture natoufienne du Levant, nous explique-t-il l’origine des langues afrasiennes ? Jusqu’à nos jours, une majorité de linguistes a postulé une origine de l’Afrasien en Afrique de l’Est, en invoquant l’argument que la plus grande diversité des langues afrasiennes se trouve aujourd’hui dans cette région (cf. Omotique, Couchitique, Tchadique, et même Sémitique) tandis que le Proche-Orient ne connait que le seul sous-groupe Sémitique. Dans une telle situation, c’est généralement vers la plus grande diversité qu’il faut se tourner pour déterminer l’origine d’un groupe ethnolinguistique. Et il serait donc parfaitement logique de baser l’Afrasien tout entier sur l’haplogroupe E, originaire d’Afrique de l’Est.
Pourtant, cela n’est pas vrai ! Et d’ailleurs certains linguistes penchent désormais pour une origine proche-orientale de l’Afrasien, indépendamment de toutes considérations génétiques. Pour construire ce débat, il faut avant tout remarquer que l’Afrasien n’a aucun rapport avec la macro-famille linguistique Congo-Saharienne qui regroupe les actuelles familles de langues Nigéro-Kordofaniennes et Nilo-Sahariennes ; lesquelles sont toutes basées sur des variants de l’haplogroupe E. Ainsi, puisque depuis le début de cet atlas nous avons pris l’option d’associer assez étroitement des haplogroupes ADN-Y paléolithiques à des familles de ‘’langues paternelles’’, la langue des *NatoufiensE-M310.1 et E-M830 (i.e. E-Z827) était très vraisemblablement une langue *Rétro-Africaine, proche parente des actuelles langues Congo-Sahariennes ; famille linguistique dont l’origine en Afrique de l’Est est parfaitement consensuelle.
Prenant le parti d’une origine proche-orientale de l’Afrasien, nous proposons que les ancêtres linguistiques pré-Bölling des Afrasiens et des Kartvéliens vivaient dans les régions du Haut-Euphrate et du Haut-Tigre où ils étaient porteurs des haplogroupes J1 et J2. Ce débat sera poursuivi dans l’atlas n°4.
L’Anatolie devait regrouper de nombreux haplogroupes, parmi lesquels C1a2 (lié aux *Aurignaciens), I* et d’autres variants de l’haplogroupe I (liés aux *Gravettiens), et les nouveaux haplogroupes tardiglaciaires reposant sur R1b, R1a, H2, T1, Q2a. Ces derniers s’étant récemment répandus dans les Balkans épigravettiens.
Après une sécheresse LGM et post LGM, le plateau iranien et l’Asie Centrale profitèrent particulièrement du regain d’humidité qui caractérisa le Tardiglaciaire et qui perdura pendant les premiers millénaires de l’Holocène. Malgré l’élévation encore faible de l’humidité, le Pré-Bölling se situa au seuil de ce processus. Puisque le climat redevenait localement favorable aux Humains, la densité des populations dut s’accroitre ; phénomène qui fut peut-être l’un des moteur de l’accroissement de la pression migratoire ? Parallèlement, il semble que la Mésopotamie conserva un climat plus aride pendant toute cette période ? Sur le plateau iranien, c’est peut-être v. 13.000 AEC que R1b1a1a-P297 donna naissance à ses deux importants variants : R1b1a1a2-M269 qui demeura indigène, et R1b1a1a1-M73 qui migra en Asie Centrale septentrionale dont la route venait de s’ouvrir une nouvelle fois grâce à la régression de l’aridité ; pour les distinguer des premiers Proto-Indo-Européens / *Peuple R1b des steppes occidentales R1b-M269* qui constitueront la prochaine poussée migratoire en direction du Kazakhstan [cf. carte X], nous qualifierons de *Peuple R1b des steppes orientales ces porteurs de R1b-M73. Des formes racines mineures de R1b1a1a*-P297* accompagnaient ces derniers où étaient poussées par eux ? Leurs porteurs se retrouveront un jour intégrés aux mouvements migratoires qui recouvriront l’Europe Orientale, probablement après avoir été intégrés aux mouvements Indo-Européens. C’est peut-être dans le même temps que le variant aujourd’hui mineur R1b1a1b-V1336 se déplaça en direction de l’Anatolie / Proche-Orient, en prélude à son entrée en Europe, probablement avant la fin du Tardiglaciaire.
Enfin, c’est à cette époque, v. 13.000 AEC, que nous proposons de placer la séparation de G2a et G2b ainsi que celle de G1a et G1b. G1 prendra prochainement la place de R1b sur le plateau iranien et en Asie Centrale méridionale [cf. cartes Y & Z] ; quant à G2, son destin sera plutôt occidental puisqu’on le retrouvera chez les Kartvéliensdu Sud-Caucase comme chez les Européens néolithiques. Toutefois, ces peuples n’étaient probablement pas originellement locuteur du Kartvélien que nous faisons reposer principalement sur J2. Nous identifierons ce ‘’peuple G’’ sous le nom de *Nord-Nostratique. On pourrait tente de placer à cette époque le début flou de la culture épipaléolithique trialétienne (TRI) du Sud-Caucase qui prit le relai de la culture imérétienne.
Europe Centrale et Occidentale
Pour la première fois depuis le LGM, les Humains eurent la possibilité de reconquérir la plaine d’Europe du Nord ainsi que les régions de moyenne altitude dont leurs ancêtres avaient été chassés par le froid : les plateaux d’Europe Centrale ainsi que les piedmonts des Alpes et des Pyrénées.
Sur toute cette vaste péninsule occidentale de l’Eurasie, les populations demeuraient scindées en deux groupes contrastés : l’un *Magdalénien en Europe Occidentale et dans le Nord de l’Europe Centrale ; et l’autre *Epigravettien en Europe Orientale et dans le Sud de l’Europe Centrale, alors étendue à l’Italie (rapprochée des Balkans par la régression marine) et au littoral méditerranéen jusqu’au niveau du Levante espagnol.
Dès le début du Pré-Bölling, le réchauffement permit aux Humains de reconquérir les territoires d’Europe du Nord qui étaient devenus désertiques au cours du LGM et qui l’étaient restés depuis. Ce furent des groupes *Magdaléniens de culture magdalénienne moyenne qui colonisèrent ce milieu extrême de la toundra périglaciaire et furent à l’origine du Technocomplexe à Pointes à Cran (TPC) ; dans le même temps, la culture de leurs frères restés au Sud entrait dans la phase du Magdalénien récent. Si l’évolution culturelle semble avoir été plus marquée chez les populations du Nord que chez les peuples du Sud, c’est probablement parce que les populations du Nord se sont adaptées à des conditions de vie sensiblement différentes de celles de leurs ancêtres et de leurs cousins du Sud, et ont été contraintes d’innover technologiquement. Toutefois, il faut considérer le TPC comme une sorte de ‘’Magdalénien récent du Nord’’, et faire l’hypothèse que la population qui le portait était d’origine *Magdalénienne. Par conséquent, tout comme au Sud, les haplogroupes ADN-Y locaux devaient être I*, I1, I2a et I2b. Toutefois, désormais intégrés à la population de ces recolonisateurs, les vieux haplogroupes *Aurignaciens et *Foliacés – qui avaient vivoté tout au long du LGM à la lisière du Monde habitable – devaient toujours être présents à faible taux ; il s’agissait notamment de C1a2et de A1b.
Au sein du Technocomplexe à Pointes à Cran, on distingue deux polarités géographiques plutôt que deux cultures :
- le Creswellien (v. 12.8000 à 9.600 AEC) realisait un ‘’Magdalénien anglais’’ qui apparut dès le début du Pré-Bölling. Pour scander son évolution, on peut nommer Creswellien ancien (CRE ANC) la phase culturelle correspondant au Pré-Bölling. Il occupait le Sud de la Grande-Bretagne (encore totalement rattachée au continent de l’autre côté du fleuve Manche) et probablement la partie occidentale du Doggerland, c’est-à-dire de la vaste basse-plaine qui reliait alors l’Ecosse à la Scandinavie et qui commençait à redevenir habitable.
- le Hambourgien (HAM) (v. 12.800 à 12.000 AEC) était la forme orientale du Creswellien et s’étendait sur la France du Nord, le Benelux, l’Allemagne du Nord, la Pologne Centrale et probablement la partie orientale du Doggerland. Contrairement au Creswellien qui fut beaucoup plus long, le Hambourgien pourrait s’être terminé à la fin du Pré-Bölling. Au cours du refroidissement qui suivit, des éléments hambourgiens apparurent plus loin au Sud, témoignage probable d’un reflux des populations nordiques.
Au Pré-Bölling, les *Magdaléniens de la région franco-ibérique entrèrent dans la phase culturelle du Magdalénien récent (MAG REC). En revanche, l’Allemagne du Sud, la Tchéquie, la Slovaquie et le Sud de la Pologne semblent être restées en marge de cette évolution et avoir conservé une culture Magdalénienne moyenne (MAG MOY). Dans l’ensemble de l’aire ethnoculturelle *Magdalénienne, les haplogroupes ADN-Y devaient être I*, I1, I2a et I2b ; aujourd’hui, ces haplogroupes sont encore portés par un peu plus de 10 % des hommes (mâles) en Europe Occidentale en moyenne, mais ce pourcentage peut être beaucoup plus élevé dans certains régions dont il apparait clairement qu’elles ont toutes constitué des refuges typiques.
En Europe balkano-italienne et danubienne, l’Epigravettien récent (EPI REC) commença au Pré-Bölling. Cette évolution culturelle fut peut-être la traduction matérielle de la rencontre entre les indigènes post-gravettiens d’haplogroupe majoritaire I2a et des envahisseurs originaires d’Anatolie qui apportèrent de nouveaux haplogroupes ADN-Y parmi lesquels R1b*-L754* était peut-être majoritaire ? Mais il était accompagné par d’autres haplogroupes ‘’vieux-R1’’ comme R1b-335 et R1b-L388, ainsi que par les haplogroupes H2, T1 et Q2a.
En conséquence de ces possibles rencontres, nous nommons *Epigravettien plutôt que *Gravettien le peuple de cette époque ; cela afin de matérialiser l’hypothèse d’une nouvelle cristallisation ethnique, au moins partielle, notamment dans les vallées ? Les massifs montagneux demeurèrent peuplés par les indigènes *Gravettiens ainsi que nous pouvons le déduire par la forte présence – jusqu’à notre époque – de l’haplogroupe I dans ces régions d’altitudes. Dans les plaines, les haplogroupes mésolithiques ‘’vieux-R1’’ et autres, seront plus tard balayés par l’’arrivée des peuples néolithiques.
Europe Orientale
Ce n’est qu’extrêmement récemment que nous avons réalisé que des variants de R1a (et peut-être également des ‘’vieux- R1b’’ dans une moindre mesure) étaient déjà présents dans la (future) grande forêt russe, avant l’arrivée des Proto-Indo-Européens en Europe Orientale. Ce fait conduit à se demander pour quelle raison R1a est aujourd’hui fortement représenté parmi les descendants des Indo-Européens orientaux ? Deux réponses sont alors possibles : 1) soit les porteurs de R1a sont initialement entrés dans la cristallisation ethnique des Proto-Indo-Européens indivis, à l’époque où ceux-ci vivaient encore dans les steppes asiatiques ? ; 2) Soit les porteurs de R1as’intégrèrent tardivement aux groupes Indo-Européens (à base R1b) les plus orientaux, lorsque ceux-ci étaient déjà arrivés en Europe Orientale ; entrant alors dans la seule cristallisation ethnique des Indo-Européens orientaux ? La deuxième option est plus probable pour deux raisons : a) La présence de R1a est aujourd’hui exceptionnelle chez les Indo-Européens occidentaux (où sa présence limitée s’explique par assez facilement par des mouvements humains relativement récents) ; et b) Bien que peu fréquent chez les Indo-Européens orientaux, R1b est parfaitement implanté chez tous les peuples de ce groupe, comme s’il avait été présent dès le début de leur histoire.
En définitive, nous exposerons bientôt l’hypothèse selon laquelle les premiers *Proto-Indo-Européens étaient un peuple fondé sur R1b-L23, variant de R1b-M269* apparu au début de l’holocène [cf. carte X] ; et que l’acculturation des R1a d’Europe Orientale sera le fait des R1b steppiques qui s’avanceront dans la forêt au Nord des steppes Ouralo-Caspiennes (cristallisation des Indo-Européens orientaux initiaux) après que les autres R1b steppiques seront partis pour l’Ouest (séparation des Indo-Européens occidentaux). Cette acculturation des R1a par des R1b demeurés en position orientale, modifiera localement la prononciation de la langue indo-européenne et sera à l’origine du phénomène dit de satemisation [cf. atlas n°4].
Mais revenons au Pré-Bölling ! C’est peut-être à cette époque que nous devons situer l’arrivée en Europe Orientale de R1a1a1a1-L664 et peut-être de l’haplogroupe Q2b, aujourd’hui mineur. Ces groupes durent introduire les techniques microlithiques paléolithiques supérieures récentes (PSR) en Europe Orientale ; et furent peut-être à l’origine du futur technocomplexe Nord-Oriental (PSR TNO) qui occupera, au début de l’Holocène, toute la grande forêt d’Europe Orientale entre la Pologne et l’Oural et entre le Nord de l’Ukraine et la mer de Barents.
Pour l’heure, les steppes pontiques et probablement le bassin du Dniepr restaient un domaine Epigravettien Oriental (EPI-ORI) qu’on peut penser peuplé par des porteurs de l’haplogroupe I2a ?