A – 9 600 à 9 000 AEC – HOLOCÈNE – PRÉBORÉAL
C’est de l’exemple offert par la mère Nature
Que vint l’art de planter, la greffe et la culture.
[…]
Puis d’essais en essais, dans l’enclos bien-aimé,
L’homme vit, par son zèle et ses soins réformé,
Chaque fruit délaisser son âpreté sauvage.
Les forêts, sur les monts reculant d’âge en âge,
Livraient à ses efforts la plaine et les coteaux.
Lucrèce – La Nature des choses – livre V
A – 9.600 à 9.000 AEC – HOLOCÈNE – PRÉBORÉAL
Climat
Au seuil de l’Holocène, la géographie mondiale ne ressemblait pas encore exactement à celle qui nous est familière. Des glaciers résiduels couvraient toujours de grandes étendues de terres au Nord de la planète, et le niveau des mers était encore de 60 mètres inférieur à l’actuel. Par conséquent, de vastes plaines littorales s’étendaient parfois très loin de nos côtes actuelles, offrant des habitats aujourd’hui engloutis et par conséquent très mal connus ; ceci était particulièrement marqué en Europe du Nord où le Doggerland était une immense plateforme reliant l’Angleterre à la Scandinavie et au continent ; plateforme qui faisait de la Seine et de la Tamise, deux affluents d’un immense Rhin dont l’embouchure terminait sa course dans l’Atlantique, entre Cornouaille et Bretagne. La future mer Baltique était un lac d’eau douce nommé Ancylus. La mer Noire et la mer Caspienne étaient des lacs salés de taille réduite ; le golfe persique entrait loin dans les terres ; et la Nouvelle-Guinée était encore reliée à l’Australie…
Le Préboréal commença v. 9600 AEC par une augmentation soudaine des températures et des précipitations. Le changement écologique qui en résulta fut tellement rapide qu’il fut sensible à l’échelle d’une vie humaine ! Les espaces ouverts et froids du Dryas-3, laissèrent la place à des forêts tempérées qui furent aussitôt colonisées par de nouvelles espèces animales sorties des refuges méridionaux où elles étaient depuis longtemps cantonnées. Après cette phase initiale – incroyablement rapide –, la température mondiale moyenne se stabilisa provisoirement et demeura pendant environ 500 ans aux alentours d’un degré de moins que les températures de références enregistrées au début du XX° siècle. C’est cette période qui correspond au Préboréal. Les anciennes faunes de toundra ne parvinrent à se maintenir que dans les régions les plus septentrionales, ainsi qu’en Asie Centrale et dans les grandes steppes eurasiatiques qui s’étendaient depuis l’Ukraine jusqu’à la Mongolie ; mais ces espèces étaient fragilisées par le changement climatique et la chasse intensive décima rapidement les gros mammifères en quelques centaines d’années.
Afrique du Nord et Sahara
C’est entre le Dryas-3 et le Préboréal que le Capsien s’installa en Afrique du Nord qui était jusque-là le domaine de l’Ibéromaurusien. Probablement issu du Sud-Levant natoufien [cf. ci-dessous], le peuple *Capsien, qui était encore au stade mésolithique et acéramique, s’installa dans l’arrière-pays tunisien et algérien, en laissant les côtes et les montagnes du Maghreb aux indigènes *Ibéromaurusiens. Par opposition aux *Capsiens de morphotype méditerranéen gracile, ces derniers présentaient un morphotype plus robuste qui a été qualifié de ‘’cromagnoïde mechtoïde’’. Pourtant, en dépit de ces différences physiques réelles – qui s’expliquent sans difficultés par des substrats ethniques différents –, nous rattachons ces deux peuples à un même ensemble patrilinéaire *ibéromauruso-natoufien associé aux variants septentrionaux de l’haplogroupe E-M35 [cf. atlas n°3]. A cette époque, E-Z830 était installé au Sud-Levant natoufien / khiamien, en compagnie de E.M310.1 / L19. Nous émettons l’hypothèse que c’est peut-être un clan porteur de ce dernier haplogroupe qui fut à l’origine de l’expansion capsienne en Afrique du Nord, v. 9500 AEC ?
Les traces d’activité humaine sont rares voire inexistantes dans la vallée égyptienne du Nil au Préboréal. Cette absence de vestiges pourrait traduire une région réellement déserte, mais on ne peut pas non plus exclure que des vestiges humains se trouvent profondément enfouis sous le limon ? Dans ce cas, les habitants du Bas-Nil et du Fayoum pourraient avoir porté l’haplogroupe E-V65, le groupe frère septentrional de E-V12 (issus l’un et l’autre de E-Z1902). Nous en faisons le substrat d’un peuple *Proto-Berbère à un stade encore non afrasianisé [cf. carte C].
Quoi qu’il en ait été du Moyen-Nil, le Sud de la grande vallée était certainement habité par des populations que nous appelons *Paléo-Nilotiques ; lesquelles auraient pu exprimer l’haplogroupe E-V12, le groupe frère méridional de E-V65 (issus l’un et l’autre de E-Z1902). Ces gens du Haut-Nil étaient les frères demeurés sédentaires de tous les migrants *proto-ibéromauruso-natoufiens qui s’étaient autrefois avancés en Afrique du Nord et au Levant et qui faisaient, tout comme les E-V12, partie de la grande famille E-M35 [cf. atlas n°3, carte R ; & note de bas de page ci-dessus]. Ces groupes méridionaux E-V12 remontèrent peut-être la vallée du Nil pendant que des tribus de leur groupe frère septentrional E-V65 entreprenaient de la descendre ? Si jamais les rives préboréales méconnues du grand fleuve offraient des ressources suffisamment abondantes, les populations mésolithiques nilotiques pourraient être devenues sédentaire dès cette époque ? Des chercheurs ont même avancé que les populations du Haut-Nil inventèrent les céramiques utilitaires (poteries) dès le Préboréal ; tandis que nous reporterons plutôt au Boréal cette importante invention [cf. carte B].
Au Sahara, le Préboréal demeura une période sèche, mais probablement moins aride que celle du Dryas-3. C’était le début de la fin de l’hyperaride qui avait prévalu pendant tout le second Pléniglaciaire et le Tardiglaciaire ; époques au cours desquelles les Humains avaient été dans l’impossibilité de vivre au Sahara, faute de connaitre les technologies nécessaires à la vie dans le désert. En effet, il ne faut pas s’imaginer que les Humains du seuil de l’Holocène étaient déjà capables de vivre à la manière des Touaregs ou des Bédouins subactuels, avec leurs longues caravanes d’ânes ou de dromadaires qui portaient tout ce qui était nécessaire à une vie pastorale itinérante dans un milieu extrême ! Les Africains et les Proche-Orientaux du début de l’Holocène ne disposaient d’aucune technique sophistiquée, d’aucun animal de bât ou de trait, d’aucun véhicule à l’exception des traineaux tirés à bras d’hommes ou par des chiens, d’aucun outil permettant de forer facilement un puits, d’aucun bétail dont ils auraient pu consommer la viande, le sang ou le lait, etc. Leur dénuement technologique complet les confinait nécessairement aux régions suffisamment accueillantes pour la chasse, la pêche et la cueillette ; ce que les déserts n’étaient pas encore devenus au Préboréal, en dépit de l’amélioration progressive du climat. Pour cette raison, nous reporterons au Boréal le début de la recolonisation humaine du Sahara [cf. carte B].
Afrique sub-saharienne
Nous avons fait l’hypothèse que le grand groupe ethnolinguistique Congo-Saharien avait commencé à se fragmenter au cours du LGM et du Tardiglaciaire [cf. atlas n°3]. Au Préboréal, ses membres dispersés conservaient tous une culture acéramique Late Stone Age (LSA) qui se prolongeait dans le temps sans changement, si ce n’est que certaines tribus étaient peut-être passées à un mode de vie mésolithique (économie sans production mais avec accumulation de réserves, impliquant un mode de vie au moins semi-sédentaire, sinon sédentaire, lorsque la nature environnante était régulièrement généreuse tout au long de l’année).
- Au sein du peuple Congo-Saharien, nous avons attribué les plateaux éthiopiens à un sous-groupe aujourd’hui disparu que nous avons nommé *Paléo-Ethiopien et que nous avons associé aux haplogroupes E1b1b-M35*, E1b1a2 et E-V16 [cf. atlas n°3] ; haplogroupes qui ont faiblement survécus jusqu’à nous malgré l’intense colonisation Afrasienne qui survint plus tard et que nous postulons avoir été très tardive dans ces régions d’altitude. En effet, ce serait seulement v. 2800 AEC que les abords du plateau commenceront à être colonisés par les premiers peuples Afrasiens porteurs d’une économie pastorale [cf. carte O]. Quant au plateau lui-même, il restera figé dans un LSA atemporel, pratiquement jusqu’au début de notre ère ; ce qui indique probablement la survie du sous-groupe *Paléo-Ethiopien jusqu’à cette époque très récente.
- A l’Ouest de ces reliefs éthiopiens, les régions qui constituent aujourd’hui le Sud-Soudan, le Sud du Tchad et la Centrafrique, étaient le domaine des Nigéro-Kordofaniens encore indivis, qui étaient essentiellement portés l’haplogroupe E1b1a et peut-être dans une moindre mesure par E1b1b* et E2.
- Au Sud-Est de la grande aire Congo-Saharienne, le sous-groupe Nilo-Saharien était encore concentré au Nord du lac Victoria, peut-être principalement porté par E2. Leur culture, dite Eburranien du Kenya, était autrefois improprement appelée ‘’**Capsien africain’’. Ce faciès mésolithique acéramique perdurera jusqu’à l’arrivée des peuples *Austro-Afrasiens, qui les convertiront au pastoralisme et à la poterie à partir de v. 2800 AEC [cf. carte P].
- Nous plaçons en Somalie un autre groupe de la famille *Rétro-Africaine que nous proposons d’appeler *Paléo-Somalien. Peut-être basé sur E-V16, nous n’excluons pas que ce groupe se soit prolongé de l’autre côté du détroit de Bab-el-Mandeb.
- Enfin, dans l’extrême Ouest de la bande sahélienne vivaient des populations DE* et surtout E1a qui avaient colonisé l’Afrique de l’Ouest au Tardiglaciaire, en provenance de l’Afrique de l’Est qui était le berceau de toutes les populations *Rétro-Africaines [cf. atlas n°3]. Dans cette région, les intrus avaient assimilé et/ou refoulé dans la forêt des groupes humains A00, A0, A1a et B1 plus anciens [cf. ci-dessous]. Ces peuples *Ouest-Africains majoritairement E1a1 et E1a2 constituaient le groupe frère occidental du groupe Nigéro-Kordofanien E1b1a situé en position orientale. Dès le Préboréal, peut-être avant 9400 AEC, ces peuples mésolithiques des rives du Niger se mirent à stocker des plantes sauvages dans des poteries qui étaient nécessairement issues de leur génie créateur puisque nous n’observons aucune connexion avec d’autres cultures voisines qui auraient déjà été céramiques. Une fois de plus, l’Afrique se révélait innovante, comme elle l’avait été pendant toute la préhistoire jusque-là [cf. atlas n°3]. Actant l’existence de ces pots, de nombreux auteurs utilisent spontanément le terme ‘’néolithique’’ pour désigner cette culture du Niger, tout en précisant que ces gens ne connaissaient pas encore l’économie de production. En effet, comme en Extrême-Orient de la même époque, ces populations novatrices restaient de purs chasseurs-cueilleurs, probablement sédentaires mais simplement proto-agricoles (cueillette de végétaux qui poussaient dans des champs spontanés). C’est pourquoi, conformément aux définitions économiques adoptées dans cet ouvrage (cf. introduction), il est préférable de décrire leur culture sous le terme de Mésolithique céramique ; précision qui ne diminue en rien sa grande modernité pour l’époque Préboréale.
- Les populations *Rétro-Africaines d’haplogroupe E qui peuplaient la bande sahélienne devaient présenter un type physique Africoïde qui était d’autant plus marqué que ces populations étaient situées le plus loin en direction de l’Ouest. Nous avons déjà attribué cette caractéristique anthropologique à leur métissage avec les premiers peuples Modernes indigènes d’haplogroupes A et B qui avaient eux-mêmes recueilli de plein front le legs direct des anciens Homo sapiens rhodesiensis d’Afrique de l’Ouest [cf. atlas n°3]. Mais du côté Est, le sous-groupe *Paléo-Ethiopien (basé sur E-M35) ne devait pas être Africoïde car il n’avait pas connu les mêmes occasions de métissages. Nous tenons cette proposition pour plausible dans la mesure où le sous-groupe *ibéromauruso-natoufien (basé sur E-M35) – détaché du noyau *Rétro-Africain au cours du LGM [cf. atlas n°3] – n’était pas du tout Africoïde mais exprimait au contraire les types physiques Cromagnoïde et Méditerranéen. Cette observation autorise à prolonger le raisonnement et à proposer que les peuples Nilo-Sahariens originels ne présentaient pas non plus un morphotype Africoïde puisqu’ils vivaient eux aussi en Afrique de l’Est, à proximité du très antique berceau *Rétro-Africain ; ces gens devaient eux aussi être physiquement Cromagnoïdes, en dépit d’une pigmentation qui devaient vraisemblablement être foncée comme celle de tous les premiers Hommes Modernes dont ils prolongeaient encore le type. Ce n’est peut-être que tardivement, que l’expansion des Bantous exportera (partiellement) le morphotype Africoïde hors d’Afrique de l’Ouest [cf. cartes V & suivantes] mais sans jamais l’imposer totalement à l’Est de la bande sahélienne.
- Dans forêt tropicale – qui commençait à se densifier de nouveau en conséquence du réchauffement climatique et d’une certaine augmentation de l’humidité – les *Pygmées Orientaux préfiguraient les Baaka, les *Pygmées Occidentaux les Mbuti, et les Pygmées Méridionaux les Cwa ; tous ces peuples portaient principalement l’haplogroupe B2b et parlaient encore probablement des vieilles langues à clics. A l’Est, les groupes *Etéo-Africains des grands-lacs préfiguraient le peuple des Hadza et des Sandawe, aujourd’hui résiduels en raison des colonisations Nilotiques puis Bantoues qu’ils subiront au cours de l’Holocène ; eux aussi portaient l’haplogroupe B2b, mais le vieil haplogroupe BT* survivait encore en Tanzanie où on le trouvera encore au Néolithique. Jusqu’à aujourd’hui, les Hadzas et les Sandawe ont conservé des langues à clics qu’il faut considérer comme indigènes de l’Afrique, tandis que toutes les autres sont des langues coloniales, via des rétromigrations très anciennes (*Rétro-Africain) [cf. atlas n°3] ou des rétromigrations plus récentes (Afrasien) (cf. cartes C & suivantes)
- En Afrique du Sud, les populations de morphotype Capoïde du Dryas-3 méritaient déjà le nom ethnolinguistique de Khoisan. Elles devaient principalement porter les vieux haplogroupes A1b1a et, A1b-M51, auxquels s’était ajouté B2b-P6. L’industrie était épipaléolithique LSA. Au Nord de ces groupes, la frange méridionale des peuples *Etéo-Africains (Zambie, Malawi, Zimbabwe, Angola) avait également une industrie épipaléolithique LSA comme dans le reste de l’Afrique sub-saharienne ; ces gens devaient porter l’haplogroupe B2b, tout comme les populations Pygmées qui vivaient encore plus loin au Nord. Etant donnée leur stabilité jusqu’à l’époque moderne, nous ne parlerons plus beaucoup d’eux dans l’atlas n°4.
Asie Occidentale Méridionale (Levant, Proche-Orient, Moyen-Orient, Anatolie, Arabie)
Pour spéculer sur la composition ethnolinguistique du Levant au cours du Préboréal, il est utile de rappeler les hypothèses avancées dans l’atlas n°3. Pendant le LGM, des groupes *Rétro-Africains (basés sur l’haplogroupe E) porteurs du variant E-M35 avaient peuplé toute la vallée du Nil tandis que d’autres groupes racines E-M35* étaient demeurés en arrière en Afrique de l’Est. Globalement, tous ces gens qui abandonnaient au Sud les groupes Congo-Saharien et *Ouest-Africain [cf. ci-dessus] constituaient la branche septentrionale de l’ensemble *Rétro-Africain. Une première scission de ce ‘’peuple E-M35’’ définît ensuite un groupe septentrional / levantin (basé sur E-Z827) et un groupe méridional / nilotique *proto-Ibéromauruso-natoufien (basé sur E-M78). Rapidement, une fraction de ce groupe méridional se porta en Afrique du Nord, définissant le peuple *Iberomaurusien basé sur des formes racines de E-M78*, tandis qu’un groupe E-M78 demeuré en position nilotique allait se fragmenter en un groupe septentrional basé sur E-Z1919 (ancêtre de E-V22 et E-V13) et en un groupe méridional basé sur E-Z1902 (ancêtre de E-V65 et E-V12).
Ce rappel phylogénétique étant fait – et en laissant de côté les formes racines E-M35* *Paléo-Ethiopiennes –, les descendants de E-M35 se séparaient en quatre groupes géographiques au début du Préboréal : 1) un groupe *Paléo-Nilotique méridional (basé sur E-V12) ; 2) un groupe Nilotique *Proto-Berbère basé sur E-V65 ; 3) le groupe *Ibéromaurusien en position orientale maghrébine (basé sur E-M78*) ; 4) le groupe *Natoufiens / Khiamiens / Capsien en position occidentale levantine (basé sur EZ830 + E-M310 auxquels s’étaient plus récemment rajoutés EV13 + E-V22). Ces nouveaux peuples levantins originaires d’Afrique avaient rencontré sur place des indigènes CT* ainsi que des migrants arrivés du Moyen-Orient qui portaient des haplogroupes issus de GHIJK, comme R1b-V88 et T1.
Cet aperçu génétique peut servir de base à une spéculation linguistique. Même si de très nombreux locuteurs des langues afrasiennes d’aujourd’hui sont porteurs de divers variants de l’haplogroupe E-M35, l’existence prouvée de plusieurs variants de l’haplogroupe E-M35 en contexte natoufien ne suffit pas pour affirmer que le peuple *Natoufien / Khiamien / Capsien du Sud-Levant parlait une forme ancienne des langues afrasiennes. En effet, si les linguistes hésitent encore quant à la localisation précise du homeland afrasien, l’alternative est pourtant bien circonscrite par la comparaison. Cette alternative ne laisse aucune place à un homeland africain parce que soit l’afrasien est membre de la superfamille nostratique, soit l’afrasien est un groupe frère du nostratique. Or, en termes génétiques, nous avons largement expliqué pourquoi les langues nostratiques et/dont afrasiennes étaient originellement basées sur des variants de l’haplogroupe eurasien GHIJK et non pas sur des variants de l’haplogroupe africain E [cf. atlas n°3]. Ce qui signifie que les très nombreux porteurs de l’haplogroupe E qui parlent aujourd’hui des langues afrasiennes, ne parlent ce type de langues QUE parce que leurs ancêtres patrilinéaires ont subi un remplacement linguistique à un moment donné de la préhistoire ou de la protohistoire. Ce constat nous conduit à attribuer au peuple *Natoufien / Khiamien / Capsien une langue *natoufienne disparue, qui était issue d’une langue *proto-ibéromauruso-natoufienne plus ancienne (basée sur E-M35), elle-même issue du rameau de l’ensemble linguistique *rétro-africain qui avait migré au Nord de l’Afrique au cours du LGM [cf. atlas n°3, carte R]. Sur cette base, sans que nous soyons capables d’appréhender leur degré de créolisation dans le creuset génétique du levant tardiglaciaire [cf. atlas n°3], les langues mésolithiques *khiamiennes et *capsiennes devaient être plus proches des langues congo-sahariennes d’aujourd’hui qu’elles ne l’étaient des langues nostratiques du Préboréal dont l’afrasien originel faisait partie ou était proche. Ces langues ‘’rétro-africaines’’ du Levant sont aujourd’hui éteintes si l’on excepte les bribes qu’elles ont léguées aux langues afrasiennes dont l’avancée à incorporé les peuples indigènes rencontrés et les haplogroupes ADN-Y de ces peuples [cf. carte B].
Les régions du Proche-Orient d’où sont originaires le mouton, la chèvre, le porc et le bœuf, sont également celles où les céréales sauvages (blé / amidonnier, engrain / petit épeautre et orge) poussaient en champs naturels spontanés au cours du Tardiglaciaire. Du côté de l’Ouest, ces régions qui étaient très propices à une économie mésolithique s’étendaient sur toute la longueur de l’Anatolie méridionale, et du côté du Sud sur tout le ‘’corridor levantin’’; au Nord et à l’Est, elles s’écartaient des côtes de la Méditerranée pour englober tout le Sud de l’actuelle Turquie orientale, ainsi que le Nord de la chaine du Zagros, au Sud des lacs de Van et d’Ourmia. Favorisées par la richesse de la faune et de la flore locales, les populations mésolithiques du Proche-Orient s’étaient déjà sédentarisées plusieurs milliers d’années avant le début de l’Holocène et pratiquaient déjà une récolte sélective des céréales et des légumineuses sauvages [cf. atlas n°3]. Même au cours du Dryas-3 – dernier baroud d’honneur de la dernière glaciation – la plus grande partie de ces régions était restée suffisamment arrosée et tempérée pour maintenir ce mode de vie proto-agricole qui autorisait l’existence d’établissements humains sédentaires. Toutefois, contrairement au reste de la région, la côte levantine du Préboréal accusa une sécheresse durable qui obligea certaines communautés villageoises à revenir au mode de vie purement nomade de leurs ancêtres ; probablement parce que les champs spontanés de céréales sauvages avaient cessé d’exister autour de leurs campements ? [cf. atlas n°3].
Parmi tous les peuples proche-orientaux du Dryas-3, ce sont les *Natoufiens du Sud-Levant qui furent le plus affectés par la sècheresse ; ce phénomène climatique contribua-t-il à la migration en Afrique du Nord de ceux d’entre eux qui allaient devenir les *Capsiens ? [cf. ci-dessus]. Anthropologiquement, les *Capsiens étaient plus graciles que les *Ibéromaurusien dont ils colonisaient les terres maghrébines, ce qui a conduit les anthropologues à penser qu’il s’agissait de deux peuples véritablement différents. Pourtant, cette différence anthropologique bien réelle n’exclut nullement qu’il puisse s’agir de deux groupes frères sur le plan patrilinéaire ADN-Y et linguistique ; en effet, Il suffit pour cela que les deux groupes frères initiaux aient interagis avec des substrats différents en Afrique du Nord (indigènes robustes) et au Levant (indigènes gracile) pour s’écarter l’une de l’autre sur le plan physique. Demeurés au Sud-Levant après le départ des *Capsiens, le peuple khiamien du Préboréal était quant à lui l’héritier sédentaire direct des *Natoufiens dont nous conservons la dénomination ethnique sur la carte A. Comme leurs ancêtres directs, ces gens conservaient encore un mode de vie purement mésolithique ; mais à la différence de leurs ancêtres, ils construisaient désormais des habitations au niveau du sol.
Contrairement au Levant, les moyennes et hautes vallées du Tigre et de l’Euphrate avaient conservé un climat plus humide au cours du Dryas-3, ce qui avait assuré le maintien des champs de céréales spontanés et des villages sédentaires proto-agricoles. C’est possiblement ce différentiel des précipitations qui pourrait expliquer que le véritable Néolithique (économie de production) apparut en Syrie au début du Préboréal, v. 9600 AEC. Cependant, sans vouloir atténuer le progrès conceptuel considérable d’un enfouissement volontaire des graines, il faut noter que le nouveau contexte ne créa pas immédiatement une civilisation très différente de celle qui avait autrefois émergé autour des champs de céréales spontanés. Dans l’atlas n°3, c’est par assimilation que nous avons qualifié de Natoufien cet Epipaléolithique / Mésolithique syrien qui présentait pourtant quelques différences avec le Natoufien du Sud-Levant. Toutefois, la future expansion néolithique de E-V13 en Europe, permet de penser que d’authentiques tribus *Natoufiennes (i.e. sud-levantines) ont réellement contribué au peuplement de la côte syrienne au cours du Dryas-3 ; peut-être avaient-elles alors été motivées à migrer en raison de la persistance locale des champs spontanés ? Avant ce mouvement nécessaire, nous avions attribué les hautes vallées des deux grands fleuves mésopotamiens à des peuples *Nostratiques ou *Para-Nostratiques porteurs des haplogroupes J1 et J2, dont nous faisons respectivement les ancêtres des peuples Afrasiens et Kartvéliens ; ou, plus exactement, les noyaux initiaux à partir desquels ces deux grandes familles de langues allaient plus tard diffuser sur de grandes régions, tout en incorporant activement les divers haplogroupes ADN-Y mésolithiques indigènes qu’elles allaient rencontrer sur leur passage.
- C’est sur le Haut-Euphrate – où nous plaçons une population initialement J1 – que furent tentés les premiers essais de domestication animale avant même le début du Préboréal : le Mouton (Ovis gmelini → Ovis aries) v. 13.000 AEC, rapidement propagé en Anatolie méridionale où il fut connu dès v. 9500 AEC ; le Porc (Sus scrofa → Sus scrofa domesticus) v. 13.000 AEC, rapidement propagé à la vallée du Haut-Tigre où il existait déjà v. 9500 AEC ; et le Bœuf (Bos primigenius → Bos taurus) v. 10.000 AEC, rapidement propagé au Zagros du Nord et du Centre où il était déjà connu v. 9500 AEC. Ce premier élevage n’avait pour but ni la traction animale (pas de roue, pas de charrue), ni la consommation de produits dérivés comestibles (lait non consommable par les Humains adultes de cette époque, faute d’une persistance de la lactase), mais permettait simplement de mieux planifier les ressources en viande et en peaux. C’est au tout début du Préboréal – et donc postérieurement à l’invention de l’élevage – que les populations du Haut-Euphrate s’initièrent à l’agriculture céréalière (orge, petit épeautre / engrain, blé / amidonnier). Pour eux, il s’est peut-être simplement agi d’aider un peu la nature en facilitant le renouvellement des champs spontanés qui étaient à la base de leur économie vivrière. Cette innovation considérable au plan conceptuel (enfouir dans le sol des produits comestibles qui ne pourront pas être consommés), définit le début du PPNA / Pre-Pottery Neolithic A (v. 9600 à 7500 AEC), ainsi qualifié parce que – bien que proches de découvrir l’économie de production – ces peuples proto-agricoles du Proche-Orient ne connaissaient pas encore la poterie, à l’inverse des peuples proto-agricoles contemporains d’Extrême-Orient [cf. ci-dessous] et du Niger [cf. ci-dessus]. L’agriculture naissante de cette époque ne doit cependant pas être surestimée, car il est démontré que la chasse et une cueillette variée constituaient toujours l’essentiel des ressources alimentaires. A partir de la zone nucléaire du Haut-Euphrate, le très ancien Néolithique s’étendit alors dans deux directions : dès v. 9500 AEC à l’Ouest, dans les régions anatolienne situées au Sud du lac Salé ; et ‘’seulement’’ v. 9000 AEC au Sud, dans le corridor levantin [cf. carte B]. Mais ces nouvelles provinces du PPNA ne disposeront pas d’emblée de la panoplie néolithique totale, puisqu’elles ne semblent pas avoir connu le porc et le bœuf avant v. 7500 AEC ; en revanche, v. 9000 AEC, la chèvre avait déjà diffusé en Mésopotamie et au Levant. De ces décalages d’acquisition, on peut tirer l’argument que la diffusion du PPNA ne doit pas être mise sur le compte exclusif d’un ‘’peuple en marche’’, mais fut plutôt un processus complexe mêlant un mouvement migratoire parti du Haut-Euphrate (J1) et une acculturation des populations anatoliennes (G2a) et levantines (plusieurs variants de E-M35, R1b-V88, T1) rencontrées. Quoi qu’il en ait été, nous proposons que la forme originelle des langues afrasiennes se développa sur le Haut-Euphrate, où elle était parlée par un peuple *Proto-Afrasien d’haplogroupe J1. Ces langues durent commencer à se propager en Anatolie méridionale et au Nord-Levant dès le Préboréal – voire dès le Dryas-3 – conformément à la dynamique de diffusion du PPNA que nous venons de décrire. En suivant ce scénario, c’est lorsque les premiers *Afrasiens de Haute-Mésopotamie commenceront à acculturer les populations sud-levantines et de la côte syrienne à l’économie de production, que les variants levantins de l’haplogroupe E-M35 (EM310.1, EZ830, EV13) s’agrègeront précocement à l’haplogroupe J1. C’est parce que, dès cette époque, les variants levantins de E-M35 accompagneront le destin de J1, que ces variants deviendront des haplogroupes ADN-Y caractéristiques à la fois du Néolithique occidental et des langues Afrasiennes d’aujourd’hui.
- Sur le Haut-Tigre et au Nord de la chaine du Zagros, le Zarzien (v. 18.000 à 8000 AEC) avait été une culture mésolithique voisine mais différente du Natoufien [cf. atlas n°3]. Proche du homeland Afrasien que nous venons de situer sur le Haut-Euphrate, il devait faire partie du même groupe *Nostratique ou *Para-Nostratique que lui, mais pourrait avoir été basé sur le variant J2 de l’haplogroupe J ? Vers la même époque que leurs voisins de l’Ouest, les *Zarziens avaient inventé leur propre Néolithique, mais sans qu’on puisse naturellement exclure des influences mutuelles entre les deux groupes géographiquement proches. Alors que le mouton fut domestiqué par les ‘’Natoufiens syriens’’ du Haut-Euphrate, Il semble que c’est sur le Haut-Tigre zarzien que fut domestiquée la Chèvre (Capra aegagrus → Capra hircus), aux alentours de 11.000 AEC. Au début du Préboréal, v. 9500 AEC, les Chèvres domestiques avaient déjà beaucoup diffusées de tribus en tribus puisqu’elles se rencontraient depuis le Centre-Zagros jusqu’en Anatolie méridionale. Sur le plan végétal, les *Zarziens domestiquèrent l’orge comme les *Afrasiens natoufiens le faisaient également à la même époque, mais indépendamment d’eux ; c’est ce progrès qui nous invite à signer leur entrée dans un équivalent local du PPNA que nous pourrions appeler ‘’PPNA oriental’’. La diffusion de ce Néolithique oriental du Proche-Orient, se fit d’abord vers le Centre de la chaine du Zagros qui semble avoir connu la Chèvre et le Bœuf dès avant 9000 AEC, en attendant de recevoir le mouton et le Porc v. 8200 AEC. Nous émettons l’hypothèse originale que ces peuples *Zarziens du Préboréal parlaient une forme ancestrale des langues kartvéliennes dont le géorgien est le principal représentant aujourd’hui ; hypothèse qui sera développée dans le cours de l’atlas n°4. En conséquence, nous confondons le peuple *Zarzien avec un peuple *Kartvélien sur la carte A et les suivantes.
Notre hypothèse d’une proximité géographique du homeland des langues afrasiennes avec celui des langues kartvéliennes permet d’expliquer l’apparentement reconnu des deux protolangues. C’est grâce à l’invention de l’économie de production – et au dumping démographique qu’elle a procuré – que ces deux dialectes proches ont acquis une force d’expansion considérable qui leur permit de recouvrir une fraction très significative de la planète ! Grossièrement, la diffusion de l’afrasien sera occidentale et méridionale, tandis que la diffusion du kartvélien sera orientale et septentrionale, ainsi que nous le verrons dans les cartes suivantes. Dans le scénario que nous développerons au long des pages de l’atlas n°4, l’aire linguistique kartvélienne s’étendra beaucoup, mais finira par subir une importante régression sous le coup de peuples nouveaux qui la conduiront presque à l’extinction ; à l’exception, vestigiale, de sa colonie sud-caucasienne [cf. carte J & suivantes].
En Anatolie méridionale du Dryas-3, on devait trouver les mêmes haplogroupes Nostratiques et ‘’vieux-R1’’ que sur la côte syrienne (Nord-Levant) dont elle est le prolongement naturel ; on les retrouvait aussi en Europe balkanique de l’Epigravettien récent [cf. atlas n°3 & ci-dessous]. A ceux-là, s’ajoutaient des haplogroupes plus anciennement indigènes, issus de J et de I ; ainsi que H2, T1, G1a et le vieux C1a2 qui subsistait encore dans les régions montagneuses du centre de la péninsule, où il était le vestige du très antique peuplement *Aurignacien du Levant. Il est probable que E-V13 les ait rejoints au cours du Préboréal, car on peinerait sinon à comprendre comment cet haplogroupe aurait pu devenir l’un des plus importants du futur Néolithique européen.
Au Nord et à l’Est des noyaux Afrasien et Kartvélien que nous avons provisoirement rassemblé au sein d’un même *Nostratique-3-occidental, on trouvait des groupes apparentés que nous avons appelé *Nostratiques-3-septentrionaux [cf. atlas n°3]. Du côté Ouest de leur aire de répartition, ces populations basées sur l’haplogroupe G s’étendaient sur le Sud-Caucase, l’Arménie et l’Anatolie septentrionale où l’haplogroupe G2a devait être majoritaire, mais aux côtés de J1, de divers variants de I et de ‘’vieux-R1’’. Du côté Est de leur aire de répartition, les *Nostratiques-3-septentrionaux s’étaient anciennement implantés sur le plateau iranien et sur les rivages de la mer Caspienne où ils exprimaient principalement l’haplogroupe G1a. Dans ces régions, ils avaient mis en place un ensemble de cultures mésolithiques sœurs que nous regroupons ici sous l’appellation générique de ‘’Jebel’’, tout en identifiant dans la plaine de l’Atrek la culture de Jebel strictement définie et sur le plateau d’Ustyurt sa variante septentrionale. Demeurées portées par des populations non-néolithiques et donc peu fécondes, nous postulons que les langues *nostratiques-3-septentrionales de l’Est et de l’Ouest seront ultérieurement effacées par les langues néolithiques kartvéliennes qui seront-elles-même effacées plus tardivement. Ce n’est que tardivement, au contact des groupes néolithiques – essentiellement J2 – infiltrés sur toute l’aire de son territoire, que les porteurs des haplogroupes G2 – et plus tardivement G1 – se convertiront à leur tour à l’économie de production. A l’Est, les groupes Jebel du littoral oriental de la Caspienne subsisteront jusque v. 3000 AEC en conservant leur vieille culture mésolithique.
Au Sud-Zagros et dans la Perside / Fars voisin de l’époque Préboréale ancienne, les *Proto-Elamo-Dravidiens demeuraient mésolithiques. Ils étaient potentiellement associés à l’haplogroupe L et dans une bien moindre mesure à l’haplogroupe T1, les deux grands variants de l’haplogroupe K1, qui sont encore fréquents au Sud de l’Iran. La langue des Elamites historiques sera-t-elle l’héritière directe des langages mésolithiques de la région ? Ou sera-t-elle plutôt apportée par des agriculteurs Kartvéliens J2 en provenance du Haut-Tigre ? [cf. carte C]. Cette seconde hypothèse est peu probable car les haplogroupes L auraient dans ce cas été complètement marginalisés au profit massif de J2. Au contraire, la persistance de L en Elam / Perside conduit plutôt à reconstituer un faible courant néolithisateur J2 qui viendra du Nord-Zagros et qui sera suivi d’une acculturation rapide des populations du Sud-Zagros à l’économie de production. La langue élamite historique serait ainsi la descendante directe d’une langue proto-élamite mésolithique indigène qui aurait intégré un adstrat J2. Toutefois les dialectes nostratiques du Nord- (J2) et du Sud-Zagros (L) devaient être originellement proches, ce qui fait que les deux hypothèses ne sont pas considérablement différentes. Au total, lorsque les populations Elamo-Dravidiennes seront devenues agricoles, elles véhiculeront à la fois l’haplogroupe indigène L, issus de K1, et l’haplogroupe J2 venu du Haut-Tigre Kartvélien en compagnie de tout l’arsenal des espèces animales et végétales domestiques. Comme le terme ‘’élamo-dravidien’’ que nous avons adopté l’indique, certains linguistes sont arrivés à la conclusion que la langue élamite aurait anciennement voisiné avec une forme ancestrale des langues dravidiennes du Sud de l’Inde, au sein d’un ensemble Proto-Elamo-Dravidien qui équivaut à ce que nous avons également appelé *Nostratique-3-central (N.-3-C.) [cf. atlas n°3 & ci-dessous]. Cependant, il n’existe pas de consensus sur cette question ; peut-être parce qu’il est difficile de comparer une langue imparfaitement connue et morte depuis des millénaires, avec des langues modernes dont les plus anciennes attestations ne sont que relativement récentes. Dans l’atlas n°4, nous suivrons pourtant l’hypothèse d’un peuple ancien Proto-Elamo-Dravidien essentiellement basé sur l’haplogroupe L. Contrairement aux langues *nostratiques-3-septentrionales, ces deux langues survivront parce que leurs porteurs doperont leur démographie en se néolithisant ; ce qui leur évitera d’être absorbés.
Plus loin vers l’Est, la Gédrosie / Balouchistan abritait une population ou l’haplogroupe H3 restait peut-être majoritaire, si l’on considère sa persistance dans la région jusqu’à aujourd’hui. Ces peuples pourraient avoir constitué un groupe *Nostratique-3-oriental ? Dans l’atlas n° 3, nous avons proposé que c’est au cours de l’Interpléniglaciaire qu’une fraction de ce peuple H3 – alors au stade *Nostratique-2-oriental – s’était infiltrée en Inde où cet haplogroupe est toujours très présent, en particulier chez les populations non-Aryennes ; observation qui signe son ancienneté.
Sans certitude naturellement, nous proposons de situer sur la côte arabe du Golfe persique le lieu d’origine controversé des *Proto-Sumériens dont plusieurs arguments, notamment linguistiques, incitent à penser qu’ils n’étaient pas indigènes de Basse-Mésopotamie. En effet, leurs descendants Sumériens feront de Dilmun (i.e. Bahreïn et/ou côte adjacente) un lieu important de leur mythologie ; ce qui pourrait signifier quelque chose à propos de leur origine. Malheureusement, il n’existe pas encore d’étude archéogénétique ADN-Y des restes de la classe dirigeante sumérienne. En leur absence prolongée, nous sommes malheureusement réduits aux conjectures pour déduire ses haplogroupes majoritaires. A ce stade, nous penchons pour une fraction de l’haplogroupe H demeuré proche du hub moyen-oriental ; c’est-à-dire pour un peuple qui était membre de l’ensemble patrilinéaire que nous avons appelé *Nostratique-2-Oriental [cf. atlas n°3] et qui pourrait, dans ce cas, être patrilinéairement proche des peuples Veddhoïdes de l’Inde ? C’est évidemment très spéculatif mais, parmi les vieux haplogroupes apparus avant le Néolithique, H3 et H2 sont toujours présents aujourd’hui sur la côte de Dilmun, ainsi que G1b au Koweit. Les haplogroupes sumériens survivent-ils en eux ? La langue sumérienne pourrait contribuer à éclairer ce débat génétique si elle était classée consensuellement. Mais, tandis que certains linguistes la rattachent plutôt à la macro-famille nostratique, d’autres la rattachent plutôt à la macro-famille déné-caucasienne dont nous avons vu qu’elle constitue une strate plus ancienne que la strate nostratique [cf. atlas n°3]. Nous pensons cependant que cette hésitation est particulièrement intéressante, car la difficulté à positionner la langue sumérienne pourrait tout simplement traduire son appartenance à une couche linguistique intermédiaire entre la strate du déné-caucasien (très ancienne) et celle du nostratique ‘’classique’’ (plus récente) ; ou bien faire de cette langue un membre ancien du groupe nostratique, ce qui revient à dire exactement la même chose. En proposant d’affilier le Sumérien au Nostratique-2 (état ancien du Nostratique vis-à-vis du Nostratique-3 ici qualifié de ‘’classique’’ parce qu’il est à l’origine de toutes les langues Nostratiques parlées aujourd’hui), nous ne nous heurtons pas à cette hypothèse.
Asie Centrale, Steppes Asiatiques Occidentales, Sibérie Occidentale, Altaï
L’Asie Centrale fut globalement peu affectée par le changement climatique, et conserva de grandes steppes où les troupeaux d’ongulés purent continuer à brouter. Au Préboréal, ces régions étaient peuplées par des *Eurasiatiques-Occidentaux chez qui l’haplogroupe R prédominait [cf. atlas n°3] et dont l’économie était encore davantage épipaléolithique que mésolithique car leur sédentarisation ou semi-sédentarisation (et donc la possibilité d’accumuler des biens) n’est pas assurée. Sur le plan anthropologique, les populations d’Asie Centrale expriment aujourd’hui un caractère Mongoloïde diversement marqué. Mais ce n’est qu’une évolution qui commencera timidement avec le reflux des Iraniens orientaux, puis s’accentuera au moment des invasions turques puis mongoles ; c’est-à-dire à une époque historique récente. Au Préboréal, l’Asie Centrale était encore peuplée d’Europoïdes et le resterait encore pendant de très nombreux siècles.
- Prolongement ethnoculturel du plateau iranien, les rives orientales de la mer Caspienne – moins désertiques que de nos jours – étaient alors peuplées de mésolithiques de type Jebel que nous affilions au groupe *Nostratique-3-septentrional porteur de l’haplogroupe G1a [cf. ci-dessus]. L’un des groupes Jebel occupa même le désert d’Ust-Yurt, mais peut-être seulement au Boréal, lorsque l’humidité devint suffisante ? Rappelons que G1a est le groupe frère oriental du G2a anatolien et bientôt européen [cf. ci-dessus].
- Au Nord du plateau Iranien et du Turkménistan, les rives méridionales de la mer d’Aral (Chorasmie) étaient peut-être le domaine de peuples R2 qui pourraient avoir été les ancêtres du peuple *Kelteminar encore porteurs d’une culture épipaléolithique *Proto-Kelteminar ; laquelle deviendra mésolithique v. 7000 AEC et sera alors connue sous le nom de Kelteminar [cf. carte D]. Outre R2, la région devait aussi abriter une variété d’haplogroupes ‘’vieux-R1’’, c’est-à-dire R1b et R1a non-steppiques [cf. atlas n°3]. Tout cela sera plus tard balayé par les mouvements des Indo-européens steppiques, lesquels se feront en plusieurs vagues dirigées vers le Sud [cf. carte O & suivantes].
- En Bactriane et dans le Pamir, la culture de Hissar était encore une industrie paléolithique supérieure récente (PSR) très ancienne et très fruste, qui conservait même des outils sur galets au côté d’outils sur éclats et, quand même, de petites lames en silex ; les gens de Hissar fabriquaient également des parures en os ce qui, au total, légitime le label de PSR [cf. atlas n°3]. Ce peuple montagnard conservateur maintiendra ses traditions paléolithiques pendant encore très longtemps, puisque la culture de Hissar ne disparaitra que v. 1500 AEC [cf. carte U]. Ce retard technologique régional est intéressant parce qu’il ajoute du crédit à l’hypothèse d’une très longue survie d’un vieux peuple Déné-Caucasien C1b1, dont nous avons proposé qu’il aurait été autrefois repoussé dans les montagnes par l’expansion des peuples Eurasiatiques de la famille K2 ; replis qui auraient légitimement conduit à l’incorporation de gènes archaïques légués par les Néandertaliens locaux [cf. atlas n°3]. Il devait s’agir des ancêtres du peuple Burusho / Burushaski, qui parle toujours aujourd’hui une langue déné-caucasienne et qui comprend toujours en son sein des individus porteurs de l’haplogroupe C1b1 ? Peut-être une série d’autres tribus C1b1 se prolongeait-elle alors tout au long de la chaine des Monts Célestes / Tian Shan et dans les oasis du Tarim ? Au travers de leur assimilation ultérieure par des peuples steppiques, cela expliquerait pourquoi cet haplogroupe ancien est aujourd’hui faiblement observé chez les peuples Altaïques ; en effet, les peuples Altaïques seront des grands ‘’ramasse-miettes’’ haplogroupaux qui absorberons beaucoup les peuples rencontrés sur leur passage [cf. carte U & suivantes].
- Le Kazakhstan Occidental du Dryas-3 devait être le domaine des Proto-Indo-Européens à qui nous avions également donné le nom descriptif de ‘’*Peuple R1b Steppique Occidental‘’ pour les situer au sein des peuples d’haplogroupe R, qui étaient eux-mêmes membres de la grande famille Eurasiatique P, Q, R [cf. atlas n°3]. Leur culture épipaléolithique était probablement celle qui a pauvrement été décrite sous le nom de Microlithisme du Kazakhstan du Nord (MIC KAZ NOR). A cette époque, ce peuple était principalement basé sur l’haplogroupe R1b-M269 qui était la forme steppique (i.e. septentrionale) occidentale de R1b et dont le variant R1b-L23 se trouvera un jour en position ancestrale patrilinéaire de 60% des Européens de l’Ouest de la fin du XX° siècle ; les mouvements ultérieurs de cet haplogroupe majeur sont abondamment détaillés dans le cours de l’atlas n°4. Des groupes R1b1* plus basaux – que l’on retrouvera plus tard dans la culture de Samara [cf. carte G] – devaient également peupler l’Ouest de la région que nous assignons à ce groupe steppique.
- A l’Est du noyau originel des Proto-Indo-Européens (ici strictement définis au moyen de l’haplogroupe R1b-M269, ancêtre de R1b-L23) devaient se trouver des proches tribus basées sur R1b-M73, c’est-à-dire sur la forme steppique orientale de R1b dont nous avons proposé une installation tardiglaciaire dans les régions du Haut-Irtych, du Haut-Ob et de la steppe de Baraba [cf. atlas n°3]. Nous donnons simplement à ce groupe le nom descriptif de *Peuple R1b Steppique Oriental. Plus tard, il sera absorbé par les mouvements des Indo-Européens dont l’extension sera considérable dans tout le système des steppes eurasiennes ; c’est peut-être seulement alors que les individus R1b-M73 formeront un contingent de la population Indo-Européenne de l’Altaï et de la branche Arśi-Kuči de ce peuple qui s’installera au Xinjiang (cf. carte N & suivantes) . Comme leurs cousins Proto-Indo-Européens, ces groupes étaient vraisemblablement Europoïdes.
Au Semiretchie (oblast d’Almaty), le Microlithisme du Kazakhstan du Sud (MIC KAZ SUD) est aussi mal connu que son homologue septentrional. Etait-il porté par des tribus R1b-M73 et/ou par d’autres peuples plus anciens qui étaient éventuellement porteurs de C1b1, de R* ou de N* ? Dans le Monde actuel, les traces de ces divers haplogroupes sont discrètes mais non-absentes.
- Au Nord des steppes du Kazakhstan, la steppe-forêt de Sibérie Occidentale – qui avait repoussé sur les rives de l’Irtych et de l’Ishim – était peut-être le domaine d’une fraction demeurée asiatique du *Peuple R1a du Nord ; peuple dont nous pensons que d’importants contingents peuplaient déjà l’Europe Orientale [cf. atlas n°3 & ci-dessous]. Sans certitude, l’haplogroupe majoritaire de cette région pourrait avoir été R1a1a1b2-Z93 ? C’est peut-être au Préboréal qu’un rameau de Z93 migra en Europe Orientale où il vint rejoindre les pionniers tardiglaciaires du groupe R1a ; et c’est ce rameau qui sera plus tard à l’origine du variant Z94 (v. 4000 à 3000 BCE) qui deviendra l’haplogroupe typique des Indo-Européens orientaux de la famille Aryenne, y compris des rameaux les plus orientaux de la culture d’Andronovo [cf. cartes O & suivantes]. Quoi qu’il en soit de ces mouvements et des haplogroupes majoritaires de l’époque, on peut aujourd’hui affirmer que les populations tardiglaciaires et préboréales du Nord de l’Europe Orientale et de la Sibérie Occidentale n’étaient absolument pas Ouraliennes, comme on l’a longtemps cru en projetant l’ethnographie subactuelle dans le passé. Plus tard, les descendants de ce *Peuple R1a du Nord seront les porteurs de la culture de la céramique peignée qui sera homogène depuis l’Europe Nord-orientale jusqu’en Sibérie Occidentale [cf. cartes G & suivantes].
- Au Nord et à l’Est des régions que nous attribuons à des R1a asiatiques, les descendants Q1a1-F746 du vieux peuple d’Afontova Gora subsistaient peut-être encore au Préboréal dans les vallées de l’Ob et du Haut-Ienisseï ? Nous en avons fait un groupe *Para-Eskaléoute, proche parent occidental des *Proto-Kitoï de Cis-Baïkalie, ainsi que des véritables *Proto-Eskaléoutes qui s’étaient installés sur les rives de la Moyenne-Lena et de l’Aldan au cours du Tardiglaciaire [cf. atlas n°3]. Dans ces régions encore occidentales, ils pourraient avoir été des Europoïdes, contrairement à leurs cousins de Baïkalie et des steppes orientales qui devaient avoir acquis un morphotype Mongoloïde. Nous reporterons au Boréal le moment où les peuples de ces régions commenceront à adopter une économie et un mode de vie mésolithique.
Baïkalie, Sibérie Orientale, Arctique
Dans l’atlas n°3 nous avons fait du groupe *Proto-Kitoï de Cis-Baïkalie une fraction d’un peuple *Proto-Eskaléo-Kitoï qui serait demeurée en arrière de la fraction *Proto-Eskaléoute. Ces peuples basés sur Q1 descendaient peut-être du peuple d’Afontova-Gora et avaient donc une base Europoïde que leur haplogroupe ADN-Y rend logique. Toutefois, au cours de leur migration vers l’Est, ils s’étaient nécessairement métissés avec les populations Mongoloïdes C2b1 qui avaient autrefois porté le courant microlithique Yubetsu [cf. atlas n°3]. Plus tard, tout comme les Eskaléoutes, le peuple Kitoï sera fortement Mongoloïde ainsi que l’attestera ses ossements ; il mêlera des haplogroupes Q1, des haplogroupes C2 et d’autres comme K*. Au Préboréal, il est difficile de savoir quels étaient les haplogroupes ADN-Y des *Proto-Kitoï ? Plus tard, Q-1b1-L330 prédominera ; mais au Préboréal, Q1a1-F746 permettrait de faire le lien entre Afontova-Gora et les Eskimos.
- Prolongeant les *Proto-Kitoï en direction de l’Est, les *Proto-Eskaléoutes (i.e. les ancêtres encore indivis des Aléoutes et des Eskimos / Inuits) avaient une industrie faite de lamelles détachées à partir de nuclei coniques et prismatiques ; ce qui ancrait leur origine du côté de l’Occident [cf. atlas n°3]. Au Tardiglaciaire, nous avions nommé leur industrie ‘’Microlithisme Prismatique’’ afin de repousser à l’Holocène le nom de la culture Sumnagin [cf. atlas n°3]. Mais à partir du Préboréal, nous utiliserons désormais ce nom pour désigner cette culture épipaléolithique acéramique qui pourrait même avoir été mésolithique si une économie d’accumulation pouvait être démontrée. Outre l’haplogroupe Q1a1-F746 qui tire sans conteste l’origine des Eskimos / Inuits et des Aléoutes du côté de l’Occident, les langues de ces peuples sont classées sans ambiguïté dans la famille eurasiatique originellement occidentale. Cela nous permet d’avancer que les gens de Sumnagin exprimaient eux aussi Q1a1-F746 et parlaient comme leurs descendants un dialecte eurasiatique. Au total, il est remarquable de constater que la langue, la génétique ADN-Y et l’industrie matérielle convergent toutes vers une origine occidentale des Eskaléoutes en lignée patrilinéaire. En revanche, ce peuple devait déjà avoir acquis le morphotype Mongoloïde sous lequel nous les connaissons, par métissage avec les peuples indigènes Yubetsu [cf. atlas n°3]. Prochainement, au cours du Boréal, le peuple *Proto-Eskaléoute commencera à descendre la Léna en direction du Grand-Nord ; en prélude à son incroyable adaptation arctique [cf. cartes B & C]. Notons que c’est seulement alors que cette intrusion fragmentera l’aire *Na-Déné-Ienisseïenne des héritiers de la culture Yubetsu / Dyuktai.
- Nous plaçons en Trans-Baïkalie un groupe *Proto-Tchouktcho-Nivkhes de langue eurasiatique, que nous basons sur un haplogroupe P1*(non-Q non-R). Certaines fractions, au moins, de ces populations avaient déjà adopté les céramiques utilitaires qui avaient diffusées depuis l’Est ; ce qui signifie que ces gens avaient déjà adopté un mode de vie mésolithique sédentaire puisque les poteries ne sont pas faciles à déplacer en l’absence de moyen de transport [cf. atlas n°3]. Nous plaçons ce groupe en position ancestrale des Tchouktches et des Nivkhes. En effet, malgré une absence de consensus, nous adhérons à la thèse d’une origine commune de ces deux peuples en voie de disparition rapide ; et nous proposerons même qu’ils ne se séparèrent qu’à une date assez récente, aux alentours de 3700 AEC [cf. carte L]. Au Préboréal, les Proto-Tchouktcho-Nivkhes conservaient-ils encore un type physique Europoïde plus marqué que celui de leurs voisins et cousins patrilinéaires *Proto-Eskaléoutes ? Ce n’est peut-être que plus tard, lorsqu’ils entameront d’une part une expansion dans la vallée de l’Amour où s’installeront les Nivkhes, et d’autre part une expansion en Sibérie Orientale où s’installeront les Tchouktches, que le métissage avec les populations locales leur conférera le type Mongoloïde qu’ils expriment aujourd’hui.
- En Sibérie Orientale septentrionale, nous avons vu que c’est dès le début du Tardiglaciaire que des peuples *Na-Déné-Ienisseïens de culture Yubetsu et d’haplogroupe C2b1a1 s’étaient installés dans la vallée de la Basse-Lena [cf. atlas n°3]. A partir de là, ils s’étaient étendus à la fois vers l’Est et vers l’Ouest. Cette histoire bidirectionnelle explique très bien l’organisation phylogénique des langues déné-caucasiennes orientales qui sont parvenues jusqu’à nous. Ainsi, au sein de cet ensemble basé sur C2, les langues sino-tibéto-birmanes constituent un sous-ensemble en position méridionale, tandis que les langues na-déné et Ienisseïennes sont les fragments subsistants du sous-ensemble septentrional. Rappelons que partis du côté de l’Ouest (Yakoutie Occidentale), les *Na-Déné-Ienisseïens de la Basse-Lena, avaient contourné le Plateau Central Sibérien par le Nord et s’étaient installés dans la vallée de l’Ienisseï avec leur industrie Yubetsu ; cette industrie contrastait avec la culture matérielle des peuples eurasiatiques du Haut-Ienisseï dont le hasard avait fait leurs voisins méridionaux [cf. atlas n°3]. A défaut d’être leurs ancêtres patrilinéaires majoritaires, ces *Proto-Ienisseïens étaient les ancêtres linguistiques des peuples Ienisseïens qui sont aujourd’hui . Leur haplogroupe majoritaire (actuel) Q1b1-L330 vint probablement du Sud lui aussi, étant issu d’un peuple L330 que nous proposons de situer dans la dépression de Kobdo au Tardiglaciaire et à l’Holocène. Plus loin au Nord, les Ienisseïens de la péninsule de Taïmyr seront quant à eux absorbés par les Ouraliens ; dans une histoire exactement inverse de celle de leurs frères du Sud, ceux-ci perdront leur langue Ienisseïenne mais conserverons en revanche un taux significatif de porteurs de C2b1.’]proches de leur extinction. Partis du côté de l’Est (Yakoutie Orientale), les *Na-Déné-Ienisseïens de la Basse-Lena, s’étaient quant à eux avancés en direction de la Béringie, formant dès lors un groupe véritablement *Proto-Na-Déné. Conservant leur technologie Yubetsu, ils étaient entrés en interaction avec des groupes indigènes Nenana, demeurés en arrière de leurs cousins américains de Clovis [cf. atlas n°3]. Au début du Dryas-3, ces interactions entre nouveaux-venus Yubetsu et indigènes Nenana avaient engendré une culture mixte appelée Campus, dans laquelle la base Yubetsu prédomina mais tout en se modifiant un peu. Le marqueur technologique Campus identifie le complexe Dénalien qui fut la culture de l’extrémité nord-orientale de l’Asie au Dryas-3 et au début de l’Holocène (v. 10.800 à 8000 AEC). Ce Dénalien s’étendit sur les actuelles provinces de Tchoukotka et de Kamtchatka, ainsi qu’en Alaska de l’autre côté du pont béringien aujourd’hui disparu, et même jusque dans l’Ouest de la province canadienne des Territoires du Nord-Ouest. Ce peuple de morphotype Mongoloïde devait être basé sur l’haplogroupe C2b1a1 comme le sont les peuples Na-déné actuels. Certaines de leurs tribus d’Alaska et/ou du Yukon s’avanceront en Amérique du Nord au début de l’Holocène, et deviendront les ancêtres des peuples Na-Déné actuels. Au Préboréal, ce processus était encore en cours ; il ne fut peut-être parachevé qu’un peu avant 8000 AEC [cf. carte B].
Amériques
Très injustement, le peuplement des Amériques ne sera pas étudié dans l’atlas n°4. Il n’y sera fait allusion qu’au travers des mouvements humains qui atteindront le Nouveau-Monde à partir du Nord de l’Asie. Etant donné le gigantisme des deux Amériques, l’étude de son peuplement constitue une étude en soi que nous espérons réaliser ultérieurement.
Chine, Mandchourie, Mongolie, Corée, Japon
En dépit de leur diversité ethnolinguistique et même technologique, les peuples extrême-orientaux de la fin du Tardiglaciaire partageaient presque tous une civilisation mésolithique (non-productiviste mais accumulatrice) où la céramique utilitaire était déjà répandue. C’est au cours du Préboréal que certains d’entre eux s’initièrent à l’agriculture, exactement à la même époque que les peuples du Proche-Orient.
En Chine du Sud, malgré la persistance d’un outillage ancien de type *Quasi Paléolithique Supérieur (QPS) – terme sous lequel nous avons désigné de très antiques galets cassés accompagnés d’éclats grossiers, de quelques outils en os et de marqueurs d’une vie psychique moderne (parures) [cf. atlas n°3] – les populations Austriques du Préboréal se servaient de céramiques alimentaires depuis déjà près de 10.000 ans. Il n’existe pour l’instant aucune explication satisfaisante de ce paradoxe mêlant retard et progrès technologiques. Sur le plan ethnique, ces populations porteuses de l’haplogroupe O devaient déjà être fragmentées en tros sous-ensembles préfigurant les 4 familles de langues austriques qui sont parvenues jusqu’à nous :
- Ainsi, nous pouvons tenter d’assigner la vallée intérieure du fleuve Bleu aux *Proto-Hmong-Miens, majoritairement basés sur l’haplogroupe O2 mais aussi plus marginalement sur l’haplogroupe C2c que nous avions laissé pénétrer dans la région au cours du LGM [cf. atlas n°3]. Ces peuples céramistes s’étaient initiés à la récolte du riz sauvage au cours du Tardiglaciaire ; mais en l’absence d’économie de production avérée, leur culture doit encore être appelée ‘’Mésolithique céramique du Moyen-Yangzi’’ (MMY). Cette phase proto-agricole perdurera jusque v. 7500 AEC [cf. carte C].
- Au Jiangnsu, au Zhejiang, au Jiangxi et au Fujiang, les *Proto-Austronésiens étaient basés sur O1b2 et O1a, avec peut-être une prédominance de ce dernier si l’on veut bien admettre que les actuels indigènes de Taiwan sont les plus proches représentants de ce stade ancien du peuple Austronésien qui connaitra un jour une extension prodigieuse ; ils ont pu survivre jusqu’à nous en raison de leur position dans un refuge à la fois insulaire et montagneux.
- Dans la moyenne et dans la basse vallée du fleuve des Perles (Zhujiang) vivaient les ancêtres encore indivis des Austro-Asiatique et des Taï-Kadaï / Daïques, majoritairement basés sur O1b1 et plus accessoirement sur O1a. Leur culture matérielle était le ‘’Mésolithique du Guangdong et du Guangxi’’ (MGG) (sites de Zengpiyan et Niulandong). Ces populations céramistes pratiquaient la récolte du riz sauvage (d’une variété différente de celle du fleuve Bleu) plutôt qu’une véritable agriculture. Comme dans la vallée du fleuve Bleu, cette phase proto-agricole perdurera jusque v. 7500 AEC [cf. carte C]. Au début du Préatlantique, c’est la rétromigration d’une fraction de ce peuple au sud du fleuve Rouge (Nord-Vietnam) qui déterminera l’origine de l’ensemble Austro-Asiatique et de la culture céramique Quynh Van [cf. carte D].
Certains linguistes, pensent que les langues taï-kadaï, hmong-mien et sino-tibéto-birmanes se ressemblent deux à deux dans cet ordre, et feraient donc partie d’un même et unique super-ensemble. Nous ne les suivons pas complètement en affiliant plutôt les deux premières à la superfamille austrique basée sur l’haplogroupe O et la troisième à la superfamille déné-caucasienne basée sur l’haplogroupe C. L’hypothèse plus précise que nous adoptons ici assimile les langues hmong-mien à un créole qui – dans la vallée du fleuve Bleu – aurait mêlé des traits austriques majoritaires à des traits déné-caucasiens plus minoritaires infiltrés au LGM avec la descente vers le Sud de groupes C2c. Cependant, le chinois han n’est pas exempt de traits austriques ; nous serons alors tentés de le comprendre comme un créole aux proportions inversées par rapport au Hmong-Mien, mêlant – dans la vallée du fleuve Jaune – des traits déné-caucasiens majoritaires à des traits austriques minoritaires ; cet apport linguistique austrique chez les peuples C2 se fera peut-être dans la seconde partie du Boréal [cf. carte C]. Les langues des groupes austriques situés au Sud du fleuve Bleu et sur la côte ne subirent pas de créolisation par les langues du Nord, parce qu’il fallut attendre l’époque historique pour que des armées Chinoises porteuses de l’haplogroupe C2 (et de l’haplogroupe N1) pénètrent aussi profondément vers le Sud ; à cette période historique ancienne, la Chine du Sud apparaîtra d’ailleurs comme une exogène et exotique province coloniale de la Chine du Nord.
En Chine du Nord-Est, les poteries alimentaires étaient connues au moins depuis le Dryas-3 [cf. atlas n°3]. Ces populations récoltaient le millet sauvage dans les grandes prairies où cette céréale formait des champs spontanés comparables aux champs spontanés de blé et d’orge qui existaient au Proche-Orient. Comme nous l’avons déjà fait à propos de leurs poteries, il est légitime de se demander si les similitudes proto-agricoles constatées entre cette civilisation de la basse vallée du fleuve Jaune et la civilisation de la moyenne vallée du fleuve Bleu (MMY) relèvent d’une imitation où d’une convergence indépendante ? Le fait que les deux cultures soient basées sur des céréales différentes pourrait plaider en ce dernier sens, si ce n’est que le riz sauvage ne poussait pas dans la vallée du fleuve Jaune en raison de sa latitude trop élevée ; de telles sortes que les communautés du fleuve Jaune pourraient avoir été à la fois imitatrices et innovantes ? Les populations de cette culture Mésolithique céramique de Nanzhuangtou située au seuil du Néolithique comme sa voisine du Sud, pourraient avoir porté l’haplogroupe N1b et des formes racines de l’haplogroupe N1* qui seront plus tard attestés chez les populations pleinement néolithiques de ces régions. Nous avons donné à ces gens le nom de *Para-Ouralo-Altaïques dans la mesure où nous en avons fait le groupe frère sédentaire des populations *Ouralo-Altaïques N1a migrantes, que nous avons laissé partir en Mongolie au cours du Tardiglaciaire [cf. atlas n°3 & ci-dessous].
Contrairement à la basse vallée du fleuve Jaune et au Liaoning que nous venons d’attribuer à des peuples porteurs de l’haplogroupe N1, la moyenne vallée du fleuve Jaune (Shanxi, Shaanxi, Henan) pourrait avoir été le domaine de populations que nous appelons *Proto-Sino-Tibéto-Birmanes qui reposaient majoritairement sur C2c. Ces populations étaient restées en marge des courants céramistes et proto-agricoles qui se développaient à l’Est et au Sud. Dès le début du Tardiglaciaire, d’autres tribus du même groupe C2c du Nord de la Chine, avaient commencé à remonter la haute vallée du fleuve Jaune et s’étaient installées au Tibet, dans le Qinghai, le Qaidam et le Kunlun que la diminution du froid avait rendu de nouveau habitable [cf. atlas n°3]. Elles avaient dès lors constitué un peuple *Paléo-Tibéto-Birman dont la culture matérielle est appelée Microlithisme Tibétain du Nord. Le terme ‘’Paléo’’ que nous choisissons signifie que ce groupe ne sera qu’un substrat du peuple Tibéto-Birman ; lequel ne sera vraiment constitué qu’au cours de l’Holocène à partir d’un second peuplement des montagnes, agricole celui-ci, venu de la plaine du fleuve Jaune. Symétriquement, ce ne sera qu’alors que nous pourrons véritablement parler de peuple Chinois dans la plaine du fleuve Jaune [cf. carte E].
Au Préboréal, le Sud du plateau tibétain fut peut-être colonisé par des porteurs de D1a et DE* que nous avons appelées *Paléo-Tibétains pour les distinguer de leurs voisins septentrionaux d’origine différente ; eux aussi ne seront qu’un substrat des ‘’véritables’’ Tibéto-Birmans d’aujourd’hui. Les couleurs de la carte A permettent de rappeler que ce peuple héritier de la première expansion asiatique des Hommes Modernes, était à la fois proche des *Rétro-Africains, des Aïnous, des Andamanais et probablement des *Paléo-Australiens / Tasmaniens. Leur culture matérielle est appelée Microlithisme Tibétain du Sud.
En Mandchourie, dans l’actuel Far-East russe et sur l’île de Sakhaline qui était encore rattachée au continent, nous avons appelé *Para-Na-Déné-Ienisseïens le peuple qui était resté en arrière du mouvement qui porta vers le Nord les *Proto-Ienisseïens et les *Proto-Na-Déné. Les gens du Bas-Amour qui avaient développé la culture mésolithique d’Osipovka au Dryas-3 conservaient un outillage Yubetsu et des outils sur éclats. Sur le Moyen-Amour, la culture mésolithique de Gromatukha était également Yubetsu. De même, les industries du Primorye étaient également Yubetsu au Préboréal. Tous ces peuples mésolithiques céramiques pourraient avoir porté l’haplogroupe C2b1 / C2b1a et peut-être des formes racines C2b* ?
Nous avons vu qu’une fraction de ce peuple s’était précédemment avancée en Mongolie Orientale [cf. atlas n°3], avec pour haplogroupe C2b1a2. Nous avons nommé cette fraction *Paléo-Altaïque pour signifier qu’elle n’était pas la racine principale du futur peuple Altaïque, même si elle sera un des plus anciens éléments de sa cristallisation – très complexe – qui était encore bien loin d’être achevé au Préboréal. Selon la logique développée dans cet atlas où nous associons des langues ‘’paternelles’’ avec des haplogroupes ADN-Y à dates anciennes, la langue *paléo-altaïque se rapprochait probablement des langues na-déné et ienisseïenne actuelles, ces langues étant portées les unes et les autres par des variants de C2b. Elle ne faisait donc pas partie de la superfamille linguistique eurasiatique, comme c’est aujourd’hui le cas de l’Altaïque ; mais elle put cependant constituer un substrat de la future famille linguistique altaïque (regroupant les langues turques, mongoles et toungouses).
Au Japon, la périodisation de culture mésolithique céramique Jomon n’est pas consensuelle. C’est peut-être au Préboréal que cette culture quitta sa phase naissance pour entrer dans sa phase archaïque mais nous n’insisterons pas sur ces étapes qui ne sont pas porteuses de changements populationnels. La culture Jomon était celle du peuple Aïnou, majoritairement D1b, mais pouvant aussi contenir des éléments C2b1a au Nord, ainsi que C1a1 et C2a au Sud. Plus loin encore vers le Sud, les îles Ruykyu comprenaient des porteurs vestigiaux de C1a1, qui étaient les proches cousins patrilinéaires des C1a2 de l’ancienne Europe aurignacienne. Tandis qu’au Nord, la presqu’île de Sakhaline et une partie de la presqu’île d’Hokkaido étaient peuplés par des groupes *Para-Na-Déné-Ienisseïens C2b1 [cf. atlas n°3].
Nous avons confié la Mongolie Occidentale de la fin du Tardiglaciaire à un peuple *Ouralo-Altaïque porteur de l’haplogroupe majeur N1a dont les formes racines N1* étaient situées plus loin au Sud [cf. atlas n°3 & ci-dessus]. Cette branche nordique de N1 sera directement à l’origine patrilinéaire et potentiellement linguistique du grand peuple Ouralo-Youkaghire ; lequel ne sera pas véritablement constitué avant le milieu de l’Holocène [cf. carte G]. Bien plus tard et jusqu’aux derniers siècles avant notre époque, cette grande famille ethnolinguistique dominera tout le Nord de l’Eurasie entre la Scandinavie à l’Ouest et le Tchoukotka à l’Est ; et en dépit de cette distance considérable, l’haplogroupe N1a restera ultra-dominant au sein de tous ces peuples anthropologiquement répartis entre une polarité Europoïde (Finnois) et une polarité Mongoloïde (Youkaghires) en passant par toute la gamme des intermédiaires. C’est peut-être au milieu de de l’Holocène seulement, qu’un rameau de ce peuple N1a pénétrera en Mongolie Orientale – où N1a est toujours bien représenté –, introduisant alors les premières composantes linguistiques eurasiatiques dans la cristallisation complexe de la famille Altaïque [cf. carte F]. Cette hypothèse que nous proposons est basée sur la possible association des familles linguistiques altaïque et ouralo-youkaghire au sein d’un ensemble de niveau supérieur appelé ouralo-altaïque, lui-même rattaché à l’eurasiatique. Tardivement, la cristallisation définitive des peuples Altaïques de l’époque historique découlera d’un nouvel apport de peuples liés à l’expansion orientale des Indo-Européens [cf. carte U].
Nous plaçons au Kobdo un peuple Q1b1-L330 qui, plus tard, entrera aussi dans la composition des peuples Altaïques et plus particulièrement des Turco-Bulgares. En outre, une fraction de ce peuple s’imposera également chez les Ienisseïens dont il adoptera la langue. La carte A mentionne une dernière fois le nom descriptif d’*Eurasiatique occidental septentrional du Sud que nous avons donné à ce peuple Q1b1-L330 pour lui assigner une place dans l’arbre généalogique patrilinéaire des peuples Eurasiatiques.
Indes
A l’exception de quelques vestiges de peuples très anciens dont les lignées ont faiblement subsisté jusqu’à nous dans les piedmonts de l’Himalaya (C1a2, F3) et au Sri-Lanka (C*, F1), les Indes du Préboréal abritaient essentiellement un empilement de peuples Nostratiques ; c’est-à-dire de peuples qui étaient tous issus du vigoureux tronc GHIJK. La carte A mentionne une dernière fois les noms ethniques descriptifs que nous avons proposés dans l’atlas n°3 afin d’essayer de repérer plusieurs strates de peuplement à partir de ce que nous croyons pouvoir reconstituer de la dynamique d’expansion des haplogroupes ADN-Y prénéolithiques qui sont parvenus jusqu’à nous ; parvenus généralement à des taux très modestes mais qui cependant sont moins faibles parmi les populations indiennes non-Aryennes et en particulier dans les populations dites ‘’tribales’’, c’est-à-dire dans toutes celles qui ont été les moins profondément ou le plus tardivement intégrées à la civilisation indienne classique. En agissant sur un substrat anthropologique ancien dont la base première avait reposé sur les Néandertaloïdes locaux [cf. atlas n°3], les différentes populations qui s’étaient successivement amalgamées dans le Finis Terrae des Indes s’étaient léguées les unes aux autres ce qui devint peu à peu le morphotype Veddhoïde parvenu jusqu’à nous ; lequel devait alors être très répandu dans tout le sous-continent indien selon un gradient Sud → Nord [cf. ci-dessous].
Au Préboréal, plusieurs haplogroupes ADN-Y se partageaient ce morphotype, parmi lesquels l’haplogroupe H prédominait certainement. Mais on trouvait également d’autres haplogroupes plus récents de la famille GHIJK, que des tribus mésolithiques moyen-orientales avaient introduits en Indes du Nord au cours du Tardiglaciaire ; c’était entre autres le cas des haplogroupes Eurasiatiques que nous avons appelé ‘’vieux-R1’’, c’est-à-dire R1b et R1a non-steppiques. Tous ces nouveaux peuples avaient probablement dilué le vieux morphotype Veddhoïde dans le Nord du sous-continent, comparativement à l’Inde du Sud où les indigènes d’haplogroupe H (ou d’haplogroupes plus anciens encore, comme F et C) avaient certainement été moins malmenés. Au Préboréal, les ancêtres linguistiques des Dravidiens se trouvaient-ils déjà parmi ces nouveaux-venus qui s’étaient installés en Inde du Nord ? Une première hypothèse – qualifiée d’hypothèse ‘’dravidien ancien’’ – consisterait à associer les Proto-Dravidiens aux porteurs de l’haplogroupe T1, dans la mesure où cet haplogroupe est le groupe-frère de l’haplogroupe L (que nous attribuons aux Elamites) au sein d’un ensemble de degré supérieur K1 = LT qui pourrait avoir été l’haplogroupe dominant d’un peuple paléolithique Proto-Elamo-Dravidien encore indivis ? Cependant, cette hypothèse simple se heurte à la très faible proportion de l’haplogroupe T1 chez les Dravidiens actuels, où les haplogroupes H, F, L, J et même O et R sont bien mieux représentés. Faut-il alors comprendre les langues dravidiennes comme résultant d’un millefeuille de créoles qui auraient autrefois amalgamés sur le sol indien une série de langues tardiglaciaires (H, K1 / LT, K2 / ‘’vieux-R1’’) auxquelles s’ajouteront plus tard des langues néolithiques (L, J2) ; langues nombreuses donc, mais qui, malgré leur diversité, appartenaient toutes au grand groupe Nostratique, lui-même solidement fondé sur la même famille patrilinéaire GHIJK ? Le dravidien étant une famille linguistique consensuellement établie au sein de la superfamille nostratique, cette hypothèse d’un ‘’pluri-créole incestueux’’ pourrait donc à la fois expliquer ses ressemblances avec l’élamite et le nombre important de leurs dissemblances qui ont amené de nombreux linguistes à douter qu’une protolangue proto-élamo-dravidienne ait jamais existé.
Dans cet atlas n°4, nous suivrons une troisième hypothèse pour expliquer l’origine du dravidien et ses rapports avec l’élamite au sein d’un proto-élamo-dravidien que nous ne contestons pas. Selon cette seconde hypothèse que nous appelons ‘’dravidien récent’’, les ancêtres linguistiques majoritaires des Dravidiens ne pénétrerons en Inde du Nord que très tardivement, dans le cadre de l’expansion Elamite / *Elamoïde qui sera à l’origine de la civilisation de l’Indus [cf. carte M]. Notons bien qu’une telle idée n’a rien de novateur, car cela fait longtemps que plusieurs chercheurs ont associé la civilisation de l’Indus avec les Dravidiens. Mais, plus exactement encore, le groupe Dravidien pourrait avoir découlé d’un rameau posthume de la civilisation de l’Indus qui aurait interagi avec d’autres groupes Nostratiques implantés avant lui au fur et à mesure qu’il pénétrait plus avant en direction du Sud du sous-continent indien. Une telle hypothèse trouve du crédit lorsqu’on s’avise que la présence des Dravidiens en Inde du Sud est nécessairement assez récente, puisque l’éclatement de leur famille linguistique en différents sous-groupes dialectaux se fit seulement entre v. 1000 et 500 AEC. Ces questions seront suivies dans le cours de l’atlas n°4, notamment lorsqu’il sera question de l’expansion Elamite / *Elamoïde [cf. carte M & suivantes].
Indochine et Indonésie (ancien Sunda)
Dès le Préboréal la grande péninsule d’Indo-Sunda fut très affectée par la remontée progressive du niveau de la mer. Sumatra restait peut-être encore reliée au continent, mais les autres îles se détachèrent au cours de la période.
L’Indochine devait alors être peuplée par des populations hoabinhiennes – technologiquement en retard – que nous avons associées à un peuple *Proto-Papouasien qui portaient principalement les haplogroupes M1, M2, S1 et S2, c’est-à-dire plusieurs variants de la famille K2b. Dans le Monde actuel, on trouve ces haplogroupes avec des fréquences élevées en Nouvelle-Guinée Papouasie où ils ne se sont probablement implantés que tardivement [cf. cartes N à Q] ; mais certains demeurent encore faiblement représentés sur le continent indochinois où il faut nécessairement situer l’origine de leur diversification. Malgré leur probable morphotype Australoïde – acquis au contact du substrat indigène – ces gens étaient de très proches parents patrilinéaires des populations Eurasiatiques de morphotypes Europoïde et Mongoloïde, vectrices des haplogroupes R et Q ; c’est-à-dire des deux autres grands variants de la famille K2b, mais qui appartenaient à sa branche P, le groupe frère de la branche MS. Parmi les héritiers de K2b, MS est exclusivement en position méridionale tandis que P → P1*(non-Q non-R), Q et R se retrouve essentiellement une position septentrionale. Toutefois, des tribus P* (i.e. plus proches de Q et de R que de MS) s’étaient également implantées en Indochine, dans le sillage des groupes MS. De toutes ces observations génétique il résulte que la langue originelle des populations méridionales M, S et P* pourrait plausiblement avoir été une langue de la famille eurasiatique à l’époque où elles pénétrèrent en Indochine en provenance des Indes [cf. atlas n°3]. Pourtant, cette base eurasiatique originelle n’a rien laissé d’apparent parmi les foisonnantes langues de Nouvelle-Guinée Papouasie où ces haplogroupes sont aujourd’hui les mieux représentés. Pour expliquer pourquoi les langues papoues sont devenues méconnaissables, nous avons invoqué leur forte créolisation suite à leur entrechoquement avec d’autres langues plus anciennes, qui étaient elles-mêmes déjà multi-créolisées dans le Finis Terrae du Sud-Est asiatique [cf. atlas n°3]. Le peuple *Proto-Papouasien de culture hoabinhienne continuera à occuper toute l’Indochine jusque v. 3000 AEC [cf. carte N].
Au cours du Dryas-3, les populations du Nord-Vietnam avaient développé une variante de la culture hoabinienne connue sous le nom de Bac Son / culture bacsonienne. Il devait s’agir de Papouasiens probablement infiltrés de quelques éléments Austriques ? En effet, ces populations métissées (mêlant des caractéristiques physiques Mongoloïdes et Australoïdes) possédaient déjà des céramiques très grossières.
Notons que certains chercheurs proposent des dates très élevées pour l’apparition de la poterie dans la moyenne vallée de l’Irrawaddy (Birmanie), dès le début du Préboréal, mais sur des bases très faibles. Nous reporterons cette avancée lors de l’arrivée des Austroasiatiques dans la région [cf. carte N].
Les îles Andamans étaient et resteront jusqu’à notre époque peuplées par des porteurs des haplogroupes DE* et D, héritiers de la première vague de peuplement *Paléo-Asiatique [cf. atlas n°3]. Nous aurons peu d’occasion de revenir à eux dans l’atlas n°4.
Aux Philippines, également, on trouvait des populations DE* et D2, qui avaient été rejointes par des groupes C1b2, de même origine que les futurs Aborigènes Australiens. Ces haplogroupes subsistent aujourd’hui faiblement parmi les populations tribales de ces îles qui seront recouvertes par un raz-de-marée de populations d’haplogroupe O aux alentours de 2500 AEC [cf. carte Q].
Nouvelle-Guinée, Australie, Tasmanie, Océanie
L’engloutissement progressivement rapide des grandes plaines et du littoral du Sunda fut nécessairement à l’origine de mouvements de peuples. Sur la carte A, des pointillés permettent de visualiser l’étendue considérable des terres qui disparurent en quelques siècles. Jusqu’au Dryas-3, nous avions attribué la possession du Sunda à un peuple *Proto-Australien que nous pourrions également commencer à appeler Proto-Macro-Pama-Nyungan parce qu’il était principalement porteur de l’haplogroupe C1b2 qui est aujourd’hui caractéristique des Aborigènes Pama-Nyungan et Non-Pama-Nyungan d’Australie. Selon l’hypothèse des ‘’langues paternelles’’ développée dans l’atlas n°3, cet haplogroupe devrait permettre de situer l’origine première du peuple Aborigène au sein de la grande famille linguistique et anciennement ethnique Déné-Caucasienne que nous avons fondé sur l’haplogroupe C. On fera pourtant aisément remarquer que les langues pama-nyungan de l’Australie actuelle ne sont absolument pas rattachables à la famille des langues déné-caucasiennes ! Alors, comme pour les langues papoues dont il vient d’être question, on invoquera une très ancienne et intense multi-créolisation régionale qui aura totalement brouillé les pistes. Au Préboréal, la catastrophe climatique qui affecta le Sunda – et peut-être la pression des *Proto-Papouasiens – constitua un puissant moteur qui pourrait avoir incité les *Proto-Australiens à migrer dans les petites îles de la Sonde et en Nouvelle-Guinée Papouasie où ils précèderont nécessairement les Papouasiens en attendant de partir s’installer en Australie. D’ailleurs, l’haplogroupe C1b2 reste aujourd’hui bien représenté chez les populations de Nouvelle-Guinée Papouasie, bien que celles-ci soient devenues majoritairement M et S [cf. ci-dessus]. Lorsque l’on entend dire que le peuple Aborigène est présent en Australie depuis 60.000 ans, ce n’est donc ni plus exact ni plus faux que si l’on disait que le peuple Français vit en France depuis les Aurignaciens ; mais c’est quand même un raccourci fallacieux. Des gènes nucléaires ont bien localement traversé les générations depuis les premiers habitants de l’Australie jusqu’aux Aborigènes d’aujourd’hui ; mais les ancêtres patrilinéaires – et probablement linguistiques – des Aborigènes d’aujourd’hui ne sont arrivés en Australie qu’assez récemment, aux alentours de 3000 AEC.
Pour l’heure, et jusqu’à la fin de l’Holocène ancien, les habitants de l’Australie allaient demeurer des *Paléo-Australiens auxquels nous avons proposé d’attribuer les haplogroupes non attestés DE* et D* [cf. atlas n°3]. Leur industrie est appelée Core Tools and Scraper Tradition (CTS). La famille linguistique inconnue de ces peuples pourrait avoir disparu au XIX° siècle avec le génocide des Tasmaniens par les Anglais.
Europe Centrale et Occidentale
Au cours du Préboréal, le changement climatique fut rapide et prononcé en Europe de l’Ouest. A la courte échelle d’une seule vie humaine, il fut certainement perçu comme une catastrophe écologique évidente par des peuples qui s’étaient sur-adaptés depuis des milliers d’années au froid et aux immenses espaces ouverts. Sous les yeux impuissants des chamanes, les belles steppes à mammouths du Dryas-3 mirent moins d’un siècle pour se transformer en jeunes forêts. Dans le même temps, les grandes espèces glaciaires furent obligées de migrer vers le Nord, en suivant le retrait des steppes froides. Aux latitudes moyennes de l’Europe, elles furent remplacées par des espèces forestières plus thermophiles qui avaient jusque-là végété dans d’étroits refuges méridionaux. Devant ce bouleversement majeur, certains groupes humains affrontèrent positivement le changement et s’adaptèrent sur place comme ils purent ; tandis que d’autres groupes, désireux de préserver leur mode de vie millénaire, préférèrent accompagner la migration des troupeaux qui suivaient le recul du front glaciaire, toujours plus loin vers le Nord. En dépit de dénominations culturelles évolutives, nous proposons de conserver à tous ces peuples d’Europe Occidentale le nom ethnique de *Magdaléniens que nous avions donné dans l’atlas n°3 au peuple qui avait cristallisé en Europe occidentale au sortir du LGM.
Au Préboréal et au Boréal, l’Azilien du Dryas-3 d’Europe Occidentale évolua en une culture fille appelée Sauveterrien, où les haplogroupes I1 et I2 devaient prédominer. Au cours de ces périodes, nous conserverons toutefois un Epi-Magdalénien en Bohême-Moravie où le terme de Sauveterrien n’est pas adapté, et un Epi-Azilien (mal défini) en Espagne où l’on trouvait également les haplogroupes gravettiens I1 et I2, mais où subsistait toujours également le vieil haplogroupe C1a2 que nous ne mentionnerons plus systématiquement dans les cartes suivantes.
Au Nord de l’Europe Occidentale, l’Arhensbourgien et le Bromme / Lyngbien du Dryas-3 avaient été deux facettes d’un même technocomplexe à pointes pédonculées constituant une adaptation du Magdalénien moyen aux conditions quasi-arctiques proches du front de l’inlandsis [cf. atlas n°3]. Au Préboréal, elles demeuraient globalement inchangées en raison d’un réchauffement qui était encore peu sensible à ces latitudes ; pour cette raison nous les nommerons Epi-Arhensbourgien et Epi-Lyngbien et nous leur conserverons les haplogroupes I1 et I2 qui restent toujours bien représentés au Nord de l’Europe actuelle. De la même façon, le vieux Creswellien d’Angleterre, vestige du Technocomplexe à Pointes à Cran dont les racines plongeaient dans le Magdalénien ancien, sera nommé Epi-Creswellien ; ici, les haplogroupes *Gravettiens / *Magdaléniens I1 et I2 se mêlaient au vieil haplogroupe *Aurignacien C1a2 qui sera peut-être celui de l’homme de Cheddar (Somerset), et peut-être également au très vieil haplogroupe *Bachokirien / *Foliacés A1b-M13 [cf. atlas n°3]. La carte A sera la dernière à mentionner en détail ces haplogroupes hérités du premier Paléolithique d’Europe Occidentale.
Davantage qu’un peuple, au sens linguistique du terme, l’Europe Centrale et Méditerranéenne pourrait avoir abrité des peuples mêlés dont le mode de vie s’était peu à peu unifié au cours du Tardiglaciaire. Au sein de cet ensemble fluide se juxtaposaient les haplogroupes ADN-Y *Gravettiens et de nouveaux haplogroupes *Epigravettiens qui étaient arrivés au Tardiglaciaire en provenance d’Anatolie [cf. atlas n°3]. Dans le Sud méditerranéen, aux côté des haplogroupes indigènes I1 et I2 demeurés majoritaires dans les monts des Balkans, les Carpates et le bloc Corse-Sarde, on trouvait notamment R1b*-L754* et R1b-M335 (i.e des haplogroupes ‘’vieux-R1b’’ i.e. non-steppiques), ainsi que H2, T1 et Q2 et peut-être N2 ? L’industrie de ces régions était épigravettienne récente et aziloïdisée. Elle présentait des particularismes locaux qui avaient évolué sur un fond aziloïde en Italie (Romanellien) et dans le Sud de la France (Montadien) ; cette variante provençale se prolongeant peut être jusque dans le Levante espagnol.
Europe Orientale
La dynamique de progression des variants de R1a en Europe Orientale est encore incertaine. Pour certains chercheurs c’est plutôt à partir de l’Anatolie puis du Nord de la région balkanique que R1a-M417 (forme ancestrale de tous les variants que nous allons citer) aurait diffusé, et à des dates beaucoup plus tardives que celles que nous proposons. Dans ce scénario que nous appelons ‘’R1a récent’’, ce serait v. 5000 AEC seulement que R1a-M417 se scinda en une forme ancestrale de R1a-L664 d’une part et une forme ancestrale de R1a-Z283 + R1a-Z93 d’autre part. Puis ce serait v. 4000 AEC seulement que R1a-Z283 et R1a-Z93 se seraient à leur tour séparés. Sans certitude, nous avons préféré un autre scénario que nous appelons ‘’R1a ancien’’ afin de tenir compte des faits que : 1) les données archéogénétiques disponibles nous enseignent que les Balkans du tournant de l’Holocène étaient massivement I2a + R1b-L754* et non pas R1a ; 2) le Swidérien pourrait avoir résulté de l’intrusion d’éléments sibériens qui avaient toutes chances d’être ‘’vieux R1a’’ et ‘’vieux R1b’’ étant donné que ces haplogroupes se retrouveront plus tard dans les mêmes régions ; 3) les peuples de la poterie peignée pourraient avoir été largement basés sur R1a, et la poterie peignée se retrouvera aussi en Sibérie Occidentale. Par conséquent, nous avons fait venir des R1a des steppes via le franchissement de l’Oural [cf. atlas n°3]. Concrètement, sur une base indigène I1 et I2 qui lui servit de substrat, le Swidérien et les cultures post-swidériennes pourraient avoir amalgamé des individus d’haplogroupes R1a-YP1051, puis R1a-L664, puis R1a-Z283. L’haplogroupe R1b-P297* est également attesté chez les chasseurs-cueilleurs de Lettonie entre la fin du IX° millénaire AEC et le IV° millénaire AEC.
Au Préboréal, le Swidérien évolua en cultures filles de traditions swidériennes : la culture de Kunda en Pologne et en Biélorussie, et la culture proche mais moins bien définie de Kunda-Veretye qui en constituait le prolongement oriental. Plus au Sud, le Mésolithique de la Haute-Volga (culture de Butovo) et de la Kama (culture de la Kama) étaient peut-être basés sur ces mêmes haplogroupes swidériens / ‘’vieux-R1a’’ auxquels nous proposons d’ajouter l’haplogroupe R1a-Z93 qui pourrait être arrivé au Préboréal et qui sera un jour à l’origine du variant R1a-Z94 qui caractéristique des Aryens, c’est-à-dire des Indo-Iraniens.
Au Sud, le Mésolithique des steppes pontiques et ouralo-caspiennes était également acéramique. Il se distribuait en faciès dits du Dniepr, du Don et de Volga-Oural. Les populations locales comprenaient peut-être un plus grand nombre d’indigènes I2 mêlés avec des tribus venues de l’Est, porteuses des haplogroupes Eurasiatiques Q1, Q2 et ‘’vieux-R1b’’, comme R1b-P297* ?
Les peuples mal connus du Grand-Nord de l’Europe Orientale – potentiellement demeurés à base indigène *Gravettienne et *Kostenko-Gorodstovienne – pouvaient toujours exprimer le vieil haplogroupe C1a2 aux côté des variants de l’haplogroupe I [cf. atlas n°3]. La faible densité de leur population les conduira à être écrasés par l’expansion de nouveaux peuples.
Enfin, le Nord-Caucase devait être – entre autres haplogroupes venus s’y réfugier – un conservatoire des anciens *Kostenkiens C1b* en qui il faut voir les ancêtres linguistiques des peuples Nord-Caucasiens actuels et une petite partie de leurs ancêtres patrilinéaires. Venu du Sud, l’haplogroupe J1 complétait peut-être le paysage ethnographique ?