Z – 10 800 à 9 600 AEC
Tardiglaciaire
Stade Dryas récent
MIS 2 (9/9)
Z – 10.800 à 9.600 AEC – Tardiglaciaire
Climat
Le Dryas-3 fut la dernière offensive du froid avant le début de l’Holocène. Il correspond au dernier stade de la chronologie groenlandaise (GS-1) et, dans son intimité, se composa de 4 poussées froides entrecoupées par de brefs réchauffements. A l’échelle globale, la précision de la chronologie glaciaire permet de le circonscrire entre v. 10.800 à 9.600 AEC. Certains chercheurs pensent que cet épisode climatique curieux – parce qu’il différa le début de l’Holocène en venant temporairement annuler l’embellie climatique de l’Alleröd – fut la conséquence d’un impact météoritique. D’autres chercheurs pensent cependant que le refroidissement pourrait avoir été un effet paradoxal du réchauffement de l’Alleröd, dont aurait résulté un affaiblissement temporaire de la circulation thermo-hyaline en raison d’un apport trop massif d’eau douce dans les océans (fonte glaciaire).
Mais quelle que soit la signification du Dryas-3, la dernière glaciation prit fin en même temps que lui, environ 9600 ans avant le début de l’ère commune, et cela en dépit de la persistance de quelques glaciers résiduels qui recouvraient encore le Nord de la planète et en dépit d’un niveau des océans qui demeurait encore très bas. L’époque nouvelle qui s’ouvrira à cette date sera l’Holocène, qui verra le développement de l’économie de production et de la civilisation étatique ; époque nouvelle dans laquelle nous nous trouvons toujours actuellement.
Les mouvements ethnolinguistiques – intenses – de l’Holocène seront relatés dans l’atlas n°4. Pour préparer leur description, les commentaires de la carte Z vont détailler la reconstitution du paysage ethnolinguistique et haplogroupal mondial du Dryas-3, à l’orée de ce grand changement climatique.
Afrique
Afrique du Nord
On croit observer une chute démographique dans la vallée du Nil du Dryas-3 et du début de l’Holocène, en conséquence d’une disparition des lacs poissonneux qui s’étaient installés à la place du fleuve au cours du MIS2. Selon les données observables, les populations ne se re-densifieront qu’à partir de 7000 AEC (Elkabien). Cette vidange possible de la vallée – comparable à celles qui s’étaient déjà produites à plusieurs reprises [cf. cartes C & F] – pourrait avoir interrompu le flux génique entre les populations d’haplogroupe E du Nord (*Natoufiens et *Ibéromaurusiens) et les populations d’haplogroupe E du Sud (*Congo-Sahariens). C’est peut-être dans ce contexte de stress climatique, qu’au Nord de la vallée, l’haplogroupe E-Z1919 donna naissance à ses variants : E-V22 (situé en position orientale, dans le Delta et en Cyrénaïque, où il vint s’ajouter à E-V65 et à E-M310.1, l’ancêtre du très récent et cependant très répandu E-M81) ; et E-V13 (situé en position occidentale, du côté du Levant, en attendant de pénétrer plus tard en Anatolie puis en Europe néolithique). Au Sud-Levant, ce second variant d’E-Z1919 rejoignait E-Z830 (ancêtre des aujourd’hui très fréquents E-M123 et E-M34).
Au Sud de la vallée du Nil, E-V12 – le groupe frère du nordique V65 – était la forme la plus méridionale des haplogroupes issus de la grande postérité de E-M35 ; lequel était depuis le LGM l’haplogroupe caractéristique des populations E nordiques que nous avons appelées *Proto-Ibéromauruso-Natoufiennes [cf. carte R pour le détachement de E-M35].
Dans la bande côtière maghrébine, les populations *Ibéromaurusiennes, elles-aussi membres de la famille E-M35, devaient toujours porter l’haplogroupe E-M78* que nous avons vu attesté par l’archéogénétique.
Afrique Tropicale
Le manque de données ne permet pas de reconstituer précisément le paysage ethnolinguistique subsaharien du Dryas-3. Depuis le début du Tardiglaciaire, nous avons fait progresser les peuples d’haplogroupe DE* et E1a dans la bande sahélienne en direction de l’Ouest. Cette première expansion vers l’Ouest d’une fraction du peuple *Rétro-Africain avait déterminé la formation d’un rameau que nous avons appelé *Ouest-Africain pour le distinguer des autres populations *Rétro-Africaines qui leur étaient étroitement apparentées mais qui étaient demeurées sédentaires à l’Est de l’Afrique où elles formèrent pendant un temps un peuple Congo-Saharien indivis ; peuple dont la cohérence linguistique demeure aujourd’hui décelable grâce à l’étude de ses nombreux héritiers. Cependant, dès avant le Dryas-3, ces *Congo-Sahariens d’Afrique de l’Est s’étaient déjà fragmentés en trois sous-ensembles ethnolinguistiques qui reposaient sur une base géographique : 1) le groupe Nigero-Kordofanien occupait le Nord et l’Ouest de la région, et était principalement porté par l’haplogroupe E1b1a1 ; 2) le groupe Nilo-Saharien, pour l’heure exclusivement en position méridionale, était principalement porté par E2 ; et 3) un groupe que nous appellerons *Paléo-Ethiopien, regroupant les haplogroupes E1b1b-M35*, E1b1a2 et E-V16, et que l’on trouve encore faiblement présents dans cette région montagneuse où ils ont survécu à l’intense colonisation Afrasienne qui débutera au Néolithique [cf. atlas n°4].
L’existence d’au moins un site MSA tardif en Afrique de l’Ouest atlantique (site de Ndiayene-Pendao, daté de v. 10.000 AEC) signifie probablement que des peuples anciens survivaient dans la région ? On leur attribuera les vieux haplogroupes A00, A0 et A1a, aujourd’hui résiduels, que nous avions associés aux peuples *Sangoens et *Lupembiens ; peuples qui se situaient nécessairement en position indigène du point de vue des colonisateurs *Ouest-Africains d’haplogroupe E. Au travers de ces vestiges primitifs d’âge récent, nous pouvons confirmer que le retard technologique de l’Afrique de l’Ouest atlantique fut bien une réalité panchronique qui traversa de part en part toute la durée de l’atlas n°3. Cette observation est un argument fort en faveur d’une conquête récente (i.e. d’époque Tardiglaciaire seulement) de l’Afrique atlantique par les peuples d’haplogroupe E, dont la technologie était plus avancée que celle des indigènes. Tout prochainement, lorsque commencera l’Holocène, ce long passéisme de l’Afrique de l’Ouest prendra fin, probablement en raison de la densification de la population coloniale d’haplogroupe E. Cette population étrangère cristallisa sur le substrat indigène, à l’origine du morphotype Africoïde des populations actuelles d’Afrique Atlantique. L’apport ultérieur du courant Nigero-Kordofanien ne modifiera pas ce morphotype hérité des premières populations d’Afrique de l’Ouest.
De part et d’autre de l’équateur, les populations *Etéo-Africaines préfiguraient déjà certains groupes ethniques et pour partie ethnolinguistiques qui sont parvenus jusqu’à nous. Dans la zone forestière – alors assez réduite en conséquence de l’épisode de sècheresse associé au refroidissement – les *Pygmées Orientaux préfiguraient les Baaka, les *Pygmées Occidentaux les Mbuti, et les Pygmées Méridionaux les Cwa ; tous ces peuples portaient principalement l’haplogroupe B2b et parlaient encore probablement une vieille langue à clics. A l’Est, les groupes *Etéo-Africains des grands-lacs préfiguraient le peuple des Hadza et des Sandawe, aujourd’hui résiduel en raison des colonisations Nilotiques puis Bantoues qu’ils subiront au cours de l’Holocène ; eux aussi portaient l’haplogroupe B2b, mais le vieil haplogroupe BT survivait encore en Tanzanie où on le trouvera encore au Néolithique. Jusqu’à aujourd’hui, les Hadzas et les Sandawe ont conservé des langues à clics qu’il faut considérer comme indigènes de l’Afrique, tandis que toutes les autres sont coloniales, via des rétromigrations très anciennes (*Rétro-Africain) [cf. atlas n°3] ou plus récentes (Afrasien) [cf. atlas n°4].
Afrique du Sud
En Afrique du Sud, les populations de morphotype Capoïdes du Dryas-3 méritaient déjà le nom ethnolinguistique de Khoisan. Elles devaient principalement porter les vieux haplogroupes A1b1a, A1b-M51 et B2b-P6, et avaient une industrie LSA appelée Robberg (LSA ROB).
Au nord de ces groupes, la frange méridionale des peuples *Etéo-Africains (Zambie, Malawi, Zimbabwe, Angola) avait pour industrie LSA le Nachikufien (LSA NAC) ; ces gens devaient porter l’haplogroupe B2b, tout comme les populations Pygmées qui vivaient plus au Nord.
Eurasie
Asie Sud-Orientale (Inde, Indochine, Sunda, Sahul)
L’Inde du Dryas-3 formait probablement une mosaïque complexe de peuples qui partageaient cependant une même origine majoritairement Nostratique. Pour cette raison, la carte Z et celles qui la précèdent montrent une Inde de couleur jaune foncée uniforme, à défaut de pouvoir distinguer plus précisément les aires de peuplement. A première vue, il ne reste absolument rien des langues de ces peuples tardiglaciaires, y compris parmi les populations tribales les plus marginales dont les langues actuelles ont toutes été apprises au contact des groupes linguistiques majoritaires qui se sont imposés en Inde depuis le Néolithique (groupes Munda, Dravidien et Indo-Européen). Largement répandu à la suite d’une diaspora originaire du Nord de l’Inde, l’actuel peuple Rom offre – parmi bien d’autres cas – une parfaite illustration de ces changements linguistiques, avec son haplogroupe majoritaire H1 qui contraste avec sa langue indo-européenne, autrefois apprise au contact des Aryens steppiques d’haplogroupe R1, lorsque ceux-ci s’installèrent en Inde du Nord [cf. atlas n°4].
Le refuge montagneux du Népal abritait toujours des populations non-nostratiques d’haplogroupe C1a2, qui étaient très proches parentes des anciens *Aurignaciensd’Europe en lignée patrilinéaire. Encore plus anciennement installés, des individus C* subsistaient parmi les tribus du Sri-Lanka. Venues à la suite de ces premiers porteurs de l’haplogroupe C, des populations *Para-Nostratiques d’haplogroupe F1 et F3 vivaient elles aussi dans les positions refuges caractéristiques du Sud du Deccan (Finis Terrae), du Sri-Lanka (île) et du Népal (montagnes), où elles étaient les vestiges d’une ancienne hégémonie de l’haplogroupe F qui avait autrefois recouvert l’ensemble de l’Inde [cf. carte K à N]. Tous ces gens exprimaient certainement le morphotype Veddhoïde qui est parvenu jusqu’à nous chez les populations tribales d’Inde du Sud et du Sri-Lanka et que l’apport de nouveaux gènes venus du ‘’hub’’ moyen-oriental dilua ensuite partout ailleurs dans le reste du sous-continent indien. La langue des Veddas actuels est manifestement un créole de Cinghalais et de langues indigènes plus anciennes qui lui ont légué un vocabulaire d’origine inconnu ; ces mots venus d’un passé de profondeur insondable ne seraient-ils pas les derniers vestiges de la famille linguistique évaporée à laquelle nous avons donné le nom de *Para-Nostratique ?
A l’époque où nous sommes parvenus, les populations *Nostratiques-2-Orientales H1 et H3 qui avaient remplacé les F [cf. carte O & suivantes], étaient-elles même déjà marginalisées dans le Deccan, à Ceylan et au Bengale du fait de l’arrivée de nouveaux envahisseurs.
En effet, si la succession chronologique que nous avons proposée dans les pages de l’atlas n°3 s’approche quelque part de la vérité, d’autre groupes plus modernes, porteurs de l’haplogroupe T1, avaient pénétré à leur suite dans le cœur du sous-continent indien [cf. carte S] et pourraient s’être installés principalement au Madhya Pradesh, en Andhra Pradesh et en Orissa où on les trouve encore aujourd’hui. Nous les avons appelés *Nostratiques-3-Centraux, à l’instar de leurs proches parents d’haplogroupe L qui demeuraient pour l’heure dans les Zagros. Ces populations indiennes d’haplogroupe T1 constituaient-elles une étape ancienne du peuple Dravidien ? La question mérite d’être posée pour deux raisons : parce que l’haplogroupe T est le frère de l’haplogroupe L dont nous feront bientôt le support du peuple Elamite [cf. atlas n°4] ; et parce que des linguistes ont depuis longtemps rapproché le Dravidien de l’Elamite au sein d’un même ensemble Elamo-Dravidien qui pourrait être une appellation voisine de ce que nous appelons *Nostratique-3-Central et dont nous faisons la langue originelle des peuples K1 (i.e. L & T). Cette hypothèse se heurte cependant à la faible proportion d’individus d’haplogroupe T chez les Dravidiens actuels, où les haplogroupes H, J, F, L, J et R sont bien mieux représentés que T. Faut-il alors comprendre les langues dravidiennes comme le résultat d’un millefeuille de créoles qui auraient autrefois amalgamés une série de langues tardiglaciaires (K1 / LT, K2 / R, H) puis néolithiques (L, J) ; langues qui, malgré leur diversité, appartenaient cependant toutes au grand groupe Nostratique ? Le Dravidien étant une famille linguistique consensuellement établie au sein du Nostratique, notre hypothèse d’un ‘’pluri-créole incestueux’’ pourrait à la fois expliquer ses ressemblances avec l’Elamiteet le nombre important de leurs dissemblances qui amènent de nombreux linguistes à douter que l’Elamo-Dravidien ait jamais existé.
Comme nous venons de le mentionner, des populations d’haplogroupe Q2b, R1b1b et R1a2 avaient également pénétré en Inde à la suite des T1 [cf. carte T]. Parce que ces haplogroupes sont tous issus de K2b, nous pensons que leurs porteurs étaient initialement des rameaux méridionaux du peuple Eurasiatique, lui-même membre particulier de la grande famille Nostratique. Cette présence ancienne de R1en Inde tardiglaciaire n’accrédite en aucune façon la thèse des nationalistes indiens qui postulent un indigénat ab origine des Indo-Européens Aryens, car ces haplogroupes ‘’vieux-R1’’ ne sont absolument pas les haplogroupes steppiques Indo-Européens qui n’entreront en Inde que beaucoup plus tard [cf. atlas n°4]. Cependant, l’implantation en Inde d’haplogroupes ‘’vieux-R1’’ (i.e. non-steppiques) est véritablement intéressante pour situer l’aire d’origine de tous les peuples d’haplogroupe R1. En effet, si certains chercheurs situent leur émergence en Anatolie, nous avons plusieurs fois répété qu’il est bien plus logique de la placer sur le plateau iranien ou en Asie Centrale méridionale, puisque des haplogroupes ‘’vieux-R1’’identiques sont à la fois attestés à l’Ouest (Anatolie) et à l’Est (Indes) de ces régions centrales. Le fait que d’autres variants de ces ‘’vieux-R1’’ sont aujourd’hui exclusifs soit de l’Anatolie soit de l’Inde, abonde encore en ce même sens, en nous racontant eux aussi l’histoire de tribus qui se séparèrent un jour sur le plateau iranien et qui partirent à l’aventure dans des directions opposées.
Tous ces haplogroupes que nous venons de recenser pour l’époque du Dryas-3 existent encore dans l’Inde d’aujourd’hui, mais avec une plus grande fréquence au sein des populations tribales que dans les populations qui apparaissent comme les supports majoritaires de la culture indienne. L’explication est simple : cela signifie que tous ces haplogroupes anciens seront fortement malmenés dans l’avenir du Dryas-3, tout d’abord au Néolithique avec l’arrivée des haplogroupes L et J, puis lors des invasions indo-européennes avec l’arrivée des haplogroupes R1 steppiques [cf. atlas n°4] ; c’est pour cela qu’il faut considérer les populations tribales indiennes comme les descendantes marginalisées et longuement malmenées (cf. les remplacements linguistiques) de ces peuples indiens du Tardiglaciaire.
En tant qu’entité géographique, l’Indo-Sunda vécut ses derniers siècles au cours du Dryas-3, en attendant sa submersion au cours de l’Holocène. La future Indochine devait alors être peuplée par des populations hoabinhiennes (HOA) – technologiquement en retard – qui portaient principalement les haplogroupes M1, M2, S1et S2, membres de la famille K2b. Dans le Monde actuel, on trouve ces haplogroupes avec des fréquences élevées en Nouvelle-Guinée Papouasie ; mais certains demeurent encore faiblement représentés sur le continent indochinois où il faut nécessairement situer l’origine de leur diversification. C’est en raison de la forte représentation actuelle de M et de S en Nouvelle-Guinée Papouasie, que nous avons nommé *Proto-Papouasien le peuple tardiglaciaire de la péninsule indochinoise que nous plaçons en position ancestrale patrilinéaire des peuples Papouasiens actuels de la grande île équatoriale. Malgré leur probable morphotype Australoïde – ces gens étaient de très proches parents patrilinéaires des populations Eurasiatiques de morphotypes Europoïde et Mongoloïde, vectrices des haplogroupes Q et R ; c’est-à-dire de variants de la famille K2b également, mais appartenant à sa branche P, le groupe frère de la branche MS. D’ailleurs, des tribus P* (i.e. plus proches de Q et de R que de MS) s’étaient également implantées en Indochine, dans le sillage des groupes MS. De ce fait, il apparait très plausible que la langue originelle des populations M, S et P* était de type Eurasiatique à l’époque où ces gens pénétrèrent en Indochine [cf. carte Q]. Pourtant, cet apparentement ancien n’a rien laissé d’apparent parmi les foisonnantes langues de Nouvelle-Guinée Papouasie où ces haplogroupes sont aujourd’hui les mieux représentés. Pour expliquer pourquoi ces langues sont devenues méconnaissables, nous avons déjà invoqué leur forte créolisation suite à leur entrechoquement avec d’autres langues plus anciennes, elles-mêmes déjà multi-créolisées dans le Finis Terrae du Sud-Est asiatique [cf. introduction] ; mais, étant donné que plusieurs centaines de langues papoues sont encore parlées en Nouvelle-Guinée Papouasie, la persistance de quelques traits linguistiques partagés avec les langues Eurasiatiques ne peut pas être exclue avec assurance.
C’est probablement au cours du Dryas-3 que la grande région hoabinhienne – que nous venons d’attribuer aux *Proto-Papouasiens – commença d’être écornée par la rétromigration d’une fraction du peuple Austrique de Chine du Sud, basé sur l’haplogroupe O. En effet, c’est alors que s’installa au Nord du Vietnam une culture mésolithique céramique que nous connaissons sous le nom de Bacsonien (BAC) et qui se prolongera pendant tout l’Holocène ancien. Sur le plan morphologique, on observe un mélange de traits Mongoloïdes et Australoïdes chez les porteurs de cette culture, ce qui témoigne vraisemblablement du métissage logiquement attendu entre des colonisateurs Austriques et des indigènes *Proto-Papouasiens. Il faut voir dans ce mouvement l’origine du peuple Austro-Asiatique, lui-même placé en position ancestrale des Mundas, des Mons et des Khmers qui poursuivront plus tard leur mouvement rétromigratoire sur la péninsule indochinoise et en Inde où ils constitueront l’un des courants de néolithisation du sous-continent [cf. atlas n°4].
Depuis la carte K, nous avons attribué la possession du Sunda à un peuple *Proto-Australien que nous pourrions également commencer à appeler Proto-Macro-Pama-Nyungan parce qu’il était principalement porteur de l’haplogroupe C1b2, aujourd’hui caractéristique des Aborigènes Pama-Nyungan et Non-Pama-Nyungan d’Australie. Selon l’hypothèse des ‘’langues paternelles’’ développée dans l’atlas n°3, cet haplogroupe devrait permettre de situer l’origine première du peuple Aborigène au sein de la grande famille linguistique et anciennement ethnique Déné-Caucasienne. On fera pourtant aisément remarquer que les langues pama-nyungan de l’Australie actuelle ne sont pas du tout rattachable à la famille des langues déné-caucasiennes ! Alors, comme pour les langues papouasiennes dont il vient d’être question, on invoquera une ancienne et intense multi-créolisation régionale qui aura totalement brouillé les pistes. Au Dryas-3, la persistance d’un Sunda émergé en sursis, offrait encore une certaine stabilité territoriale à ces populations ; mais cela n’allait pas durer. En effet, au plus tard au début de l’Holocène, l’engloutissement rapide de la plus grande partie de leurs meilleures terres (littoraux, plaines) constituera un puissant moteur qui incitera les *Proto-Australiens à migrer aux Philippines et surtout en Nouvelle-Guinée Papouasie où ils précèderont les Papous. C’est sans certitude que nous anticipons le début de ces mouvements au cours du Dryas-3 et que nous le représentons sur la carte Z. Plus tard, ces peuples développeront l’Australian Small Tool Tradition (ASTT) qui n’arrivera en Australie qu’après le milieu de l’Holocène [cf. atlas n°4].
Pour l’heure, et jusqu’à la fin de l’Holocène ancien, les habitants de l’Australie demeuraient des *Paléo-Australiens auxquels nous avons attribués les haplogroupes non attestés DE* et D*. Leur industrie est appelée Core Tools and Scraper Tradition (CTS).
Asie Extrême-Orientale (Chine, Corée, Japon, Mandchourie, Mongolie)
En dépit de leur diversité ethnolinguistique et même technologique, les peuples des régions extrême-orientales accentuaient le développement partagé d’une civilisation mésolithique (MES) céramique.
En Chine du Sud, malgré la persistance de leur outillage *Quasi Paléolithique Supérieur (QPS) – terme sous lequel nous désignons de très antiques galets cassés et des éclats grossiers, accompagnés d’outils en os et de marqueurs d’une vie psychique moderne (parures) – les populations Austriques du Dryas-3 se servaient de céramiques alimentaires depuis 8000 ans déjà. Ce qui signifie que les tribus céramistes – celles-ci au moins – étaient devenues sédentaires et étaient entrées dans une économie mésolithique (accumulatrice mais non-productiviste). Ces populations porteuses de l’haplogroupe O étaient probablement déjà fragmentées en plusieurs ensembles préfigurant les grandes familles de langues qui sont parvenues jusqu’à nous.
– Ainsi, nous pouvons tenter d’assigner la vallée intérieure du fleuve Bleu aux *Proto-Hmong-Miens, majoritairement basés sur l’haplogroupe O2 mais aussi plus marginalement sur C2c que nous avions laissé pénétrer dans la région au cours du LGM [cf. carte R] ; au Dryas-3, la culture matérielle des peuples de cette région est appelée ‘’Néolithique du Moyen-Yangzi’’ parce que les tribus locales disposaient de céramiques alimentaires et parce qu’elles pratiquaient la récolte du riz sauvage ; mais en l’absence d’économie de production avérée, il serait plus exact de l’appeler ‘’Mésolithique céramique du Moyen-Yangzi’’ (MMY).Mais quoi qu’il en soit de ces précisions terminologiques, il est indubitable que ces populations s’approchaient du mode de vie néolithique ; cette phase préagricole perdurera jusque v. 7000 AEC [cf. atlas n°4].
- Au Jiangnsu, au Zhejiang, au Jiangxi et au Fujiang, les *Proto-Austronésiens étaient basés sur O1b2 et O1a, avec peut-être une prédominance de ce dernier si l’on veut bien admettre que les actuels indigènes de Taiwan sont les plus proches représentants de ce stade ancien du peuple Austronésien ; ceci en raison de leur position dans un refuge insulaire.
- Dans la moyenne et dans la basse vallée du fleuve des Perles (Zhujiang) vivaient les *Proto-Taï-Kadaï,majoritairement basés sur O1b1 et plus accessoirement sur O1a et O2. Leur culture matérielle est dite ‘’Néolithique du Guangdong et du Guangxi’’ mais devrait plus proprement être appelée ‘’Mésolithique du Guangdong et du Guangxi’’ (MGG) (sites de Zengpiyan et Niulandong). Ces populations mésolithiques étaient céramistes et pratiquaient la récolte du riz sauvage (d’une variété différente de celle du fleuve Bleu) plutôt qu’une véritable agriculture. Comme dans la vallée du fleuve Bleu, cette phase préagricole perdurera jusque v. 7000 AEC [cf. atlas n°4]. Nous avons vu plus haut que la rétromigration d’une fraction de ce peuple au sud du fleuve Rouge détermina l’origine de l’ensemble Austro-Asiatique qui installa la culture céramique bacsonienne au Nord-Vietnam [cf. ci-dessus].
Certains linguistes, pensent que les langues Taï-Kadaï, Hmong-Miens et Sinitiques se ressemblent deux à deux dans cet ordre, et feraient donc partie d’un même super-ensemble. Nous ne les suivons pas dans notre atlas où nous affilions les deux premières à la superfamilleAustrique basée sur l’haplogroupe O et la troisième à la superfamille Déné-Caucasienne basée sur l’haplogroupe C. L’hypothèse que nous présentons assimile plutôt les langues Hmong-miens à un créole qui – dans la vallée du fleuve Bleu – aurait mêlé des traits Austriques majoritaires à des traits Sinitiques plus minoritaires infiltrés au LGM. Ce phénomène n’affecta pas les régions qui étaient situées plus loin dans le Sud, où des porteurs de l’haplogroupe C (et de l’haplogroupe N) ne pénétrèrent probablement que très tardivement, pas avant l’époque des mouvements conquérants Chinois de la période historique ; période historique ancienne où la Chine du Sud apparaîtra alors comme une exogène et exotique province coloniale de la Chine du Nord.
En Chine du Nord, les premières poteries connues datent du Dryas-3 dans le Shanxi, sur les hauteurs de la région de la basse vallée du fleuve Jaune / Huang He (site de Nanzhuangtou). Il se pourrait toutefois que les techniques céramiques aient été connues dès le Bölling dans cette région ainsi que dans les vallées du Hai He et du Liao He [cf. carte X]. Ces populations récoltaient le millet sauvage dans les grandes prairies où cette céréale formait des champs spontanés. Comme nous l’avons déjà fait à propos de la poterie, il est légitime de se demander si les similitudes constatées entre cette civilisation de la basse vallée du fleuve Jaune et celle de la moyenne vallée du fleuve Bleu (MMI) relèvent d’une imitation où d’une convergence indépendante ? Le fait que les deux cultures soient basées sur des céréales différentes pourrait plaider en ce sens, si ce n’est que le riz sauvage ne poussait pas dans la vallée du fleuve Jaune en raison de sa latitude trop élevée. Les populations de cette culture Mésolithique de Nanzhuangtou (MNA), située au seuil du Néolithique comme sa voisine du Sud, pourraient avoir porté l’haplogroupe N1b et des formes racines de l’haplogroupe N1* qui seront plus tard attestés dans le Néolithique accompli de ces régions. Nous donnons à ces gens le nom de *Para-Ouralo-Altaïques dans la mesure où nous en faisons le groupe frère des populations *Ouralo-Altaïques N1a que nous avons laissé partir en Mongolie au cours du Bölling [cf. carte X]. La présence majoritaire de l’haplogroupe N dans cette région est extrapolée pour le Dryas-3 ; mais elle l’est avec une relative assurance sur la base des découvertes archéogénétiques provenant d’époques plus tardives (Néolithique) [cf. atlas n°4].
Contrairement à la basse vallée du fleuve Jaune et au Liaoning que nous attribuons à des peuples porteurs de l’haplogroupe N, la moyenne vallée du fleuve Jaune pourrait avoir été le domaine de populations *Sinitiques majoritairement C2c. Au Dryas-3, elles étaient encore en marge des courants céramistes et préagricoles. Mais au début du Néolithique elles rattraperont leur retard et deviendront même précocement agricoles dans la vallée de la Wei ; c’est cette agriculture précoce et les conséquences démographiques qui en résulteront qui seront à l’origine de la diffusion de la langue Chinoise (Han) ; laquelle portera jusqu’à nous – avec un immense succès – le flambeau de la vieille famille ethnolinguistique Déné-Caucasienne Orientale basée sur C2 [cf. atlas n°4].
Depuis le début du Tardiglaciaire [cf. carte W], certaines tribus C2c avaient commencé à remonter la haute vallée du fleuve Jaune et s’étaient installées au Tibet, dans le Qinghai, le Qaidam et le Kunlun. Elles constituèrent dès lors un peuple *Proto-Tibéto-Birman dont la culture matérielle est appelée Microlithisme Tibétain du Nord (MTN). C’est ce mouvement vers les montagnes qui explique la séparation des langues *sinitiques / sino-tibéto-birmanes en langues chinoises d’une part et en langues tibéto-birmanes d’autre part. Toutefois, pour être précis, le peuple Tibéto-Birman ne sera constitué qu’au cours de l’Holocène, après l’apport de nouveaux groupes venus de la plaine [cf. atlas n°4].
En Mandchourie, dans l’actuel Far-East russe et sur l’île de Sakhaline encore rattachée au continent, nous avons appelé *Para-Na-Déné-Ienisseïens le peuple qui était resté en arrière du mouvement qui porta vers le Nord les *Proto-Ienisseïens et les *Proto-Na-Déné. Ces gens qui avaient développé la civilisation Mésolithique d’Osipovka (MES OSI) conservaient par ailleurs un outillage Yubetsu (YUB). Ils devaient porter principalement l’haplogroupe C2b1 / C2b1a et peut-être des formes racines C2b* ? Nous avons vus qu’une fraction de ce peuple s’était précédemment avancée en Mongolie Orientale [cf. carte T], avec pour haplogroupe C2b1a2. Nous l’avons nommée *Paléo-Altaïque pour signifier qu’elle entrera un jour dans la cristallisation complexe du peuple Altaïque, qui était encore bien loin d’être achevée au Dryas-3 [cf. atlas n°4]. Selon la logique développée dans cet atlas, la langue *paléo-altaïque se rapprochait du na-déné et du ienisseïen, portés comme elle par des variants de C2b ; elle ne faisait donc pas partie de la superfamille linguistique eurasiatique, mais put cependant constituer un substrat de la famille altaïque (regroupant les langues turques, mongoles et toungouses), qui est une composante de l’ensemble eurasiatique.
Enfin, nous avons confié la Mongolie Occidentale du Dryas-3 à un peuple *Ouralo-Altaïque porteur de l’haplogroupe majeur N1a dont les formes racines N1* étaient situées plus loin au Sud [cf. ci-dessus]. A l’Holocène, cette branche nordique de N1 sera à l’origine du grand peuple Ouralo-Youkaghire. Au seuil de l’époque actuelle, cette famille ethnolinguistique dominait tout le Nord de l’Eurasie entre la Scandinavie à l’Ouest et le Tchoukotka à l’Est ; et tous les peuples qui la composaient restaient presque entièrement basés sur N1a.
Au cours de l’Holocène, un rameau de ce peuple N1a pénétrera en Mongolie Orientale – où N1a est bien représenté –, introduisant des éléments linguistiques nouveaux dans la cristallisation complexe de la famille Altaïque. Cette hypothèse est basée sur la possible association des familles linguistiques altaïque et ouralo-youkaghire au sein d’un ensemble de niveau supérieur appelé ouralo-altaïque. Elle permet de rattacher la famille altaïque à la superfamille eurasiatique. Tardivement, la cristallisation définitive des peuples Altaïques d’aujourd’hui découlera d’un nouvel apport de peuples liés à l’expansion orientale des Indo-Européens [cf. atlas n°4].
Au Japon, la culture mésolithique céramique Jomon (JOM)entra dans la phase Jomon naissant 2 (v. 11.000 à 9.000 AEC). C’était celle du peuple Aïnou, majoritairement D1b, mais pouvant contenir des éléments C2b1a au Nord, ainsi que C1a1 et C2a au Sud.
Asie Septentrionale (Asie Centrale, Sibérie Occidentale, steppes, Altaï, Baïkalie, Sibérie Orientale, Alaska, Amériques)
Au Nord du plateau Iranien et du Turkménistan [cf. ci-dessous], l’actuel Ouzbékistan était peut-être le domaine de peuples R2 qui pourraient avoir été les ancêtres *Proto-Kelteminar du peuple *Kelteminar que nous rencontrerons à l’Holocène. Beaucoup plus tard, ces gens seront entrainés vers le Sud par les mouvements des Indo-EuropéensOrientaux [cf. atlas n°4]. Une variété d’haplogroupes ‘’Vieux-R1b’’ devait aussi peupler la région. Tout cela sera plus tard balayé par les mouvements steppiques successifs qui – d’un point de vue régional – constitueront autant de rétromigrations en direction du ‘’hub’’ moyen-oriental.
En Bactriane et dans le Pamir, la culture de Hissar (PSR HIS) comprenait encore des outils sur galets ; mais les gens de ces régions connaissaient aussi le détachement d’éclats et fabriquaient de petites lames en silex ; ils fabriquaient également des parures en os. Sans plus de précisions, nous associons leur culture à un Paléolithique Supérieur Récent (PSR) dont la modernité était discrète ; un Paléolithique ‘’récent peut-être’’, mais qui allait s’attarder très loin dans le cours de l’Holocène [cf. atlas n°4]. Ce conservatisme technologique régional est intéressant parce qu’il ajoute du crédit à l’hypothèse d’une très longue survie d’un vieux peuple Déné-Caucasien C1b1, autrefois repoussé dans les montagnes par l’expansion des peuples Eurasiatiques K2 [cf. carte L]. Nous pensons qu’il s’agissait des ancêtres du peuple Burusho / Burushaski, aujourd’hui devenu vestigial, mais qui parle toujours une langue déné-caucasienne et qui comprend toujours en son sein des individus porteurs de C1b1 ? Aujourd’hui, ceux-ci ne sont pas majoritaires, car d’autres bandes humaines sont venues imposer leurs lois dans ces montagnes depuis le Dryas-3. Cependant – exactement comme dans le pays Basque – ce renouvellement haplogroupal n’annule pas du tout l’hypothèse qui lie étroitement les langues déné-caucasiennes à l’haplogroupe C [cf. introduction et commentaires des cartes N & Q]. Peut-être ces mêmes peuples C1b1 se prolongeaient-ils alors tout au long de la chaine des Monts Célestes ? Par assimilation ultérieure, cela expliquerait pourquoi cet haplogroupe est présent à faible taux chez les peuples Altaïques actuels.
Le Kazakhstan Occidental du Dryas-3 devait être le domaine des Proto-Indo-Européens (PIE) que l’on pourrait également nommer ‘’*Peuple R1b Steppique Occidental‘’. Leur culture épipaléolithique était probablement celle qui est pauvrement décrite sous le nom de Microlithisme du Kazakhstan du Nord (MIC NOR KAZ). Ils étaient principalement basés sur R1b-M269* qui était la forme steppique (i.e. septentrionale) occidentale de R1b et dont le variant R1b-L23 – peut-être apparu v. 8000 AEC ? – se trouvera en position ancestrale patrilinéaire de 60% des Européens de l’Ouest actuels ; les mouvements ultérieurs de cet haplogroupe majeur sont abondamment détaillés dans l’atlas n°4. Des groupes R1b1* que l’on retrouvera plus tard dans la culture de Samara [cf. atlas n°4] devaient également peupler l’Ouest de la région que nous assignons à ce groupe steppique.
A l’Est du noyau originel des PIE (ici strictement définis au moyen de l’haplogroupe R1b-M269*, ancestral de R1b-L23 qui apparaitra au début de l’Holocène) devaient se trouver des tribus basées sur R1b-M73, la forme steppique orientale de R1b que nous avons vue s’installer au cours du Bölling dans les régions du Haut-Irtych et du Haut-Ob ainsi que dans la steppe de Baraba [cf. carte X]. Nous décrivons simplement ce groupe sous le nom de *Peuple R1b Steppique Oriental. Plus tard, il sera intégré par les mouvements des Indo-Européens dont l’extension sera considérable dans tout le système des steppes eurasiennes ; c’est peut-être seulement alors que les R1b-M73 formeront un contingent important de la population Indo-Européenne de l’Altaï et de la branche de ce peuple qui s’installera au Xinjiang [cf. atlas n°4].
Au Semiretchie (oblast d’Almaty), le Microlithisme du Kazakhstan du Sud (MIC SUD KAZ) est aussi mal connu que son homologue septentrional. Etait-il porté par des de R1b-M73 et/ou par d’autres peuples plus anciens éventuellement porteurs de C1b1, de R* ou de N* ? Dans le Monde actuel, les traces de ces divers haplogroupes sont discrètes mais non-absentes.
Au Nord des steppes du Kazakhstan, la forêt de Sibérie Occidentale – qui avait repoussé sur les rives de l’Irtych et de l’Ishim – était peut-être le domaine d’une fraction demeurée asiatique du *Peuple R1a du Nord ? L’haplogroupe majoritaire de cette région pourrait avoir été R1a1a1b2-Z93, ancêtre de Z94 qui sera plus tard l’haplogroupe typique des Indo-Européens orientaux de la famille Aryenne, y compris des rameaux les plus orientaux de la culture d’Andronovo. Nous ferons migrer un rameau de Z93 en Europe Orientale au début de l’Holocène, à l’origine de ce variant Z94 qui rétromigrera en Asie [cf. atlas n°4].
Sans certitude aucune – car les dates de divergence proposées sont en général plus récentes – c’est au Dryas-3 que nous laisserons s’installer en Europe Orientale le rameau R1a1a1b1a-Z282 de R1a1a1b1-Z283. Il se retrouvera dans la cristallisation ethnique des Indo-Européens orientaux de la famille Balto-Slave [cf. atlas n°4].
Au Nord et à l’Est des R1a asiatiques, les descendants Q1a1-F746 du vieux peuple d’Afontova Gora subsistaient peut-être encore au Dryas-3 ? Nous en avons fait un groupe *Para-Eskaléoute, proche parent des *Proto-Kitoï de Cis-Baïkalie, ainsi que des véritables *Proto-Eskaléoutes qui vivaient sur les rives de la Moyenne-Lena et de l’Aldan après s’en être possiblement détachés au début du Tardiglaciaire [cartes W & X]. Nous reporterons au début de l’Holocène l’avènement du Mésolithique dans cette région [cf. atlas n°4]. Ces peuples d’origine lointainement occidentale n’utilisaient pas la technique Yubetsu mais détachaient leurs lamelles à partir de nuclei coniques et prismatiques. Sur les cartes, nous nommons leur culture Microlithisme Prismatique (MIC PRI) ; ceci afin de ne pas anticiper anachroniquement le nom de la culture Sumnagin qui en constituera l’évolution mésolithique au début de l’Holocène [cf. atlas n°4].
En Trans-Baïkalie, dans les bassins de la Haute- et de la Moyenne-Vitim (site d’Ust’Karenga), un Mésolithique céramique était apparu dès le Bölling dans une population qui maniait la technique Yubetsu d’origine orientale, parallèlement à d’autres technique de débitage d’origine occidentale. Cette population – que son industrie nous laisse deviner mêlée – pourrait avoir été *Proto-Tchouktcho-Nivkhes et pourrait avoir reposé sur l’haplogroupe P1* (non-Q non-R). Etant donnée la proximité géographique, sa culture céramique avait certainement été adaptée de celle de Gromathuka dans la vallée du Moyen-Amour, elle-même ayant découlé de celle d’Osipovka (OSI) sur le Bas-Amour. Mais ces populations purement Yubetsu de Mandchourie – que nous avons appelé *Para-Na-Déné-Ienisseïennes – n’appartenaient peut-être pas au même groupe ethnolinguistique que celles de Trans-Baïkalie.
En Sibérie Orientale septentrionale, nous avons vu que c’est dès le début du Tardiglaciaire que des peuples *Na-Déné-Ienisseïens de culture Yubetsu et d’haplogroupe C2b1 étaient parvenus dans la vallée de la Basse-Lena [cf. carte W]. A partir de là, ils s’étaient étendus à la fois vers l’Est et vers l’Ouest. Cette histoire bidirectionnelle explique très bien l’organisation phylogénique des langues Déné-Caucasiennes orientales qui sont parvenues jusqu’à nous. Ainsi, parmi cet ensemble, le Sinitique / Sino-Tibéto-Birman constitue le sous-ensemble demeuré au Sud, tandis que le *Na-Déné-Ienisseïen est son pendant septentrional ; ce dernier s’étant lui-même fragment dès le Tardiglaciaire en Proto-Ienisseïen (fraction occidentale) et en Proto-Na-Déné (fraction orientale).
- Les *Na-Déné-Ienisseïens de la Basse-Lena partis du côté de l’Ouest (Yakoutie Occidentale), avaient contourné le Plateau Central Sibérien par le Nord et s’étaient installés v. 12.000 AEC dans la basse vallée de l’Ienisseï ; vallée que nous les avons laissé remonter en direction du Sud au cours de l’épisode froid du Dryas-2 [cf. carte X]. La culture Yubetsu qu’ils avaient amené avec eux contrastait avec la culture matérielle des peuples du Haut-Ienisseï qui étaient devenus leurs voisins méridionaux ; en effet, ceux-ci, probablement Q1a1, utilisaient principalement des nuclei coniques et prismatiques pour détacher des lamelles. A défaut d’être leurs ancêtres patrilinéaires, ces *Proto-Ienisseïens étaient les ancêtres linguistiques des peuples Ienisseïens qui ont atteint notre époque.
- Les *Na-Déné-Ienisseïens de la Basse-Lena partis du côté de l’Est (Yakoutie Orientale), avaient contourné par le Nord le massif formé par les monts de Verkhoïansk et les monts Chersky, et s’étaient avancés en direction de la Béringie, formant dès lors un groupe *Proto-Na-Déné. Conservant leur technologie Yubetsu, ils étaient entrés en interaction avec des groupes indigènes Nenana, demeurés en arrière de leurs cousins de Clovis qui avaient prospéré en Amérique du Nord au cours de l’Alleröd. Au début du Dryas-3, ces interactions entre nouveaux-venus Yubetsu et indigènes Nenana engendrèrent une culture mixte mais dans laquelle la base Yubetsu prédomina tout en se modifiant un peu. Ainsi, les artisans Yubetsu développèrent une nouvelle méthode de production des microlithes, appelée Campus (CAM). Ce marqueur technologique identifie le complexe Dénalien (DEN) qui fut la culture de l’extrémité nord-orientale de l’Asie au Dryas-3 et au début de l’Holocène (v. 10.800 à 8000 AEC). Ce Dénalien s’étendit sur les actuelles provinces de Tchoukotka et de Kamtchatka, ainsi qu’en Alaska de l’autre côté du pont béringien aujourd’hui disparu ; à l’est de l’Alaska, le Dénalien se prolongea au Canada, dans la province du Yukon et dans l’Ouest de la province des Territoires du Nord-Ouest qui ne sont pas représentés sur la carte Z. Ce peuple de morphotype Mongoloïde devait être basé sur l’haplogroupe C2b1a1. Certaines de leurs tribus d’Alaska et/ou du Yukon s’avanceront bientôt en Amérique du Nord, dès le début de l’Holocène, et deviendront les ancêtres des peuples Na-Déné actuels [cf. atlas n°4]. Ceux-là auront pour descendants patrilinéaires les indiens du Nord-Ouest de l’Amérique du Nord et de la côte pacifique : outre les groupes mineurs des Tlingits et des Eyaks, il s’agit très majoritairement de l’important groupe Athapascan, dont une fraction, à l’origine des Apaches (dont font partis les Navajo), migrera très tardivement dans le Sud-Ouest des états unis au XIII° siècle de notre ère. La langue Haïdaappartient moins certainement à ce même groupe ; l’hésitation prolongée des linguistes à son propos ne pourrait-elle pas recouvrir un créole de Na-Déné et d’une langue plus ancienne qui pourrait avoir été celle des Amérindes *Nénanas ? La position insulaire de l’Haïda (i.e. refuge) est en tout cas bien compatible avec celle d’une langue dont la formation fut plus complexe que les langues consensuellement Na-Déné du continent. Quoi qu’il en soit, sous des appellations diverses, le complexe Dénalien perdurera jusqu’à l’époque subactuelle au centre de l’Alaska, dans la vallée du Yukon et dans le territoire canadien du Nord-Ouest ; les premiers sites américains de la côte pacifique (Alaska méridionale, Colombie-Britannique) seront aussi généralement considérés comme des extensions du Dénalien. Tout ceci constitue des arguments forts qui permettent de lier ce technocomplexe aux peuples Na-Déné.
- Comme au Tchoukotka, le Microlithisme Yubetsu était apparu au Kamchatka au cours de l’Alleröd [cf. carte Y]. S’agissait-il de groupes *Proto-Na-Dénés descendus depuis le Tchoukotka ? Ou de groupes que nous avons appelés *Para-Na-Déné-Ienisseïens qui seraient venus du littoral méridional de la mer d’Okhotsk, parce que le réchauffement très significatif de l’Alleröd avait autorisé leur installation plus loin vers le Nord ? Dans les deux cas, ces gens exprimaient probablement l’haplogroupe C2b1. Mais la première hypothèse est plus vraisemblable si la méthode Campus était utilisée au Kamchatka.
En Amérique du Nord, au Sud du corridor de Mackenzie dont le coup de froid du Dryas-3 avait momentanément reconsolidé les parois de glace, le peuple Amérinde disposait pour lui tout seul des deux gigantesques Amériques. Au cours de l’Alleröd, déjà répandues sur l’ensemble de l’Amérique du Nord à l’exception de la zone encore recouverte par l’inlandsis, ces tribus Q1b1-M3 et Q1b1-Z780 avait développé la culture de Clovis, forme méridionale de la culture Nenana et, comme elle, de type PSM non-Yubetsu. Leurs bandes les plus méridionales avaient même commencé à pénétrer en Amérique du Sud dès cette époque.
Cette culture de Clovis – jusque-là homogène, parce qu’elle avait pu rapidement s’étendre dans toutes les directions dans un monde complètement vide où aucune résistance n’était venue ni l’entraver ni la modifier – commença à se scinder en plusieurs entités au cours du Dryas-3. On peut circonscrire les premiers héritiers Paléoindiens de Clovis en trois groupes principaux : A l’Ouest du Mississipi, la culture de Folsom s’étendait tout en longueur entre l’état de Washington au Nord et le Mexique au Sud. Tandis qu’à l’Est du Mississipi, on trouvait deux autres entités culturelles : le groupe de Redstone / Cumberland / Barnes qui s’étendait du Maine à la Caroline du Nord, et le groupe de Suswannee / Simpson qui occupait la Louisiane, la Floride et la Caroline du Sud. Descendants directs du peuple de Clovis, tous ces gens étaient nécessairement porteurs des haplogroupes Q1b1-M3 et Q1b1-Z780, et exprimaient probablement un morphotype proche de celui de l’homme de Kennewick qui allait bientôt voir le jour dans l’état de Washington. Quel était ce morphotype ? On l’a décrit comme Europoïde, ce qui n’est pas illogique étant donné les ancêtres Eurasiatiques K2b de cet homme, nécessairement issus du groupe Nostratique (ancien) qui peuplait le Moyen-Orient. On a aussi fait remarquer ses traits Australoïdes ; qu’il nous faut peut-être alors rechercher parmi les anciens peuples D1b que nous avons appelés *Para-Aïnous et qui seraient par conséquent remontés bien plus au Nord que nous ne l’avons postulé dans les pages de l’atlas ? A moins qu’il ne faille les rechercher tout simplement – de legs en legs – chez les anciens Dénisoviens septentrionaux et/ou chez les métis de Dénisoviens et de Néandertaliens qui peuplaient la Sibérie Orientale avant l’arrivée des premiers Hommes modernes dans la région ? [cf. cartes A à O]. Quoi qu’il en soit, les Amérindiens d’aujourd’hui ne peuvent pas être qualifiés d’Europoïdes, et tout particulièrement les Amérindiens d’Amérique du Sud qui font pourtant tous intégralement partie du groupe Amérinde, que celui-ci soit défini linguistiquement ou à partir des haplogroupes ADN-Y. Cela signifie que – bien que descendants patrilinéairement d’ancêtres Europoïdes K2b – les *Proto-Amérindes incorporèrent les gènes de peuples non-Europoïdes – et probablement non-modernes – qui les avaient précédés en Sibérie Orientale. Notons d’ailleurs que c’est chez les Amérindes du Sud que les gènes dénisoviens s’expriment aujourd’hui avec la plus grande fréquence aux deux Amériques.
Ce célèbre homme de Kennewick, qui ne se douta jamais de la polémique dont il ferait un jour l’objet, précédera de peu la diffusion des Na-Déné Mongoloïdes dans tout l’Ouest de l’Amérique du Nord. On peut penser que le flux génique en provenance de cette seconde vague de colonisation du Nouveau-Monde infléchira dans un sens davantage Mongoloïde le morphotype des premiers habitants de l’Amérique.
Asie Occidentale (Moyen-Orient, Proche-Orient, Anatolie, Arabie)
Basé sur E-Z830, E-M310 et désormais E-V13, qui venait peut-être de s’ajouter aux deux autres au cours du Dryas-3 [cf. ci-dessus], le peuple *Natoufien du Sud-Levant ne pouvait pas parler une langue afrasienne bien que cela ait été avancé. Nous leur avons attribué une langue *natoufienne issue d’une langue plus ancienne *proto-ibéromauruso-natoufienne basée sur E-M35, lui-même rameau septentrional détaché de l’ensemble *Rétro-Africainau cours du LGM [cf. carte R]. Comme certains peuples chinois de la même époque, les *Natoufiens pratiquaient une proto-agriculture en récoltant les céréales sauvages qui poussaient dans des champs naturels. Cependant, la péjoration climatique du Dryas-3 s’accompagna d’un asséchement du Proche-Orient qui fut particulièrement marqué sur la côte levantine. Combinée à la chute des températures, cette sécheresse affecta les habitants des villages semi-sédentaires natoufiens (NAT) dont certains furent obligés de revenir au mode de vie purement nomade de leurs ancêtres ; peut-être parce que les champs spontanés de céréales sauvages cessèrent d’exister autour de leurs campements ? D’autres communautés furent cependant moins affectées. Bien que proches de découvrir l’économie de production, ces peuples proto-agricoles ne connaissaient pas la poterie, à l’inverse des peuples proto-agricoles contemporains d’Extrême-Orient.
Contrairement au Levant, les moyennes et hautes vallées du tigre et de l’Euphrate conservèrent un climat plus humide au cours du Dryas-3, qui demeura favorable au développement des champs spontanés de céréales et donc à la cueillette proto-agricole. C’est possiblement ce différentiel des précipitations qui fut responsable du retard des habitants du Levant sur ceux de la Syrie où allait bientôt émerger le véritable Néolithique. Sur la carte Z, cet Epipaléolithique syrien est qualifié de Natoufien (NAT)par assimilation. Toutefois, si elle en était proche, la culture matérielle locale présentait quelques différences avec le Natoufien du Sud-Levant. Nous attribuons les hautes vallées des deux grands fleuves à des peuples J1 et J2 dont nous faisons respectivement les ancêtres *Nostratiques-3-occidentaux des Afrasiens et des Kartvéliens, ou en tout cas des noyaux initiaux à partir desquels ces grandes familles de langues allaient diffuser en incorporant toute une série de nouveaux haplogroupes ADN-Y [cf. atlas n°4]. Dans le même temps, la côte Syrienne abritait peut-être des groupes d’origines plus variés qui mêlaient une série d’haplogroupes Nostratiques (dont étaient également Eurasiatiques) comme R1b-V88, T1, G1a, R1a-, Q2a,etc. Parfois avec des fréquences basses, mais parfois avec des fréquences pouvant être localement élevées, ces haplogroupes venus de l’Est suivront ultérieurement le chemin rétro-africain des peuples Afrasiens [cf. atlas n°4].
En Anatolie du Dryas-3, on devait retrouver les mêmes haplogroupes Nostratiques et ‘’vieux-R1’’ que sur la côte syrienne dont elle est le prolongement naturel. On les retrouvait d’ailleurs également en Europe balkanique de l’Epigravettien récent. A ceux-là, s’ajoutaient des haplogroupes plus anciennement indigènes, issus de J et de I ; ainsi même que C1a2 qui subsistait dans les régions montagneuses du centre de la péninsule, où il était le vestige de l’antique peuplement *Aurignacien du Levant. Ces haplogroupes sont archéogénétiquement attestés dans ces régions, pour des époques postérieures au Dryas‑3 [cf. atlas n°4].
Europe Centrale et Occidentale
Le coup de froid du Dryas-3 affecta nécessairement les populations qui vivaient au Nord de l’Europe mais sans modifier significativement les équilibres qui s’étaient installés à l’Alleröd.
- Vestige du Technocomplexe à Pointes à Cran, le Creswellien récent (CRE-REC) était toujours présent en Grande-Bretagne. Faute de données archéogénétiques, nous ignorons quels haplogroupes portaient les *Creswelliens. On peut cependant inférer que des tribus porteuses de l’haplogroupe I avaient repeuplé le Nord de l’Europe à l’issue du LGM, dès lors que ces régions redevinrent habitables ; les racines magdaléniennes du Creswellien vont d’ailleurs en ce sens [cf. carte W]. Toutefois, au début de l’Holocène, l’homme de Cheddar (Somerset) portera l’haplogroupe C1a2. De cette information, nous devons déduire que comme dans les Pyrénées (homme mésolithique C1a2 de la Brana), comme dans les Carpates (rares Hongrois C1a2 actuels) et comme en Cappadoce (hommes C1a2 d’époque néolithique à Tepecik Ciftlik), le vieil haplogroupe *Aurignacien survécut longtemps en ce Finis Terrae du Nord-Ouest européen. Cela n’a rien de surprenant pour le lecteur de cet atlas qui a maintes fois eu l’occasion d’observer que les lieux extrêmes de toutes natures – îles, péninsules, montagnes, latitudes élevées – sont le destin inévitable des haplogroupes ‘’vaincus’’ et donc ‘’repoussés’’ par des envahisseurs plus nombreux et/ou mieux outillés qu’eux. Ainsi, l’homme de Cheddar nous conduit à proposer que – dès avant le LGM – C1a2 fut marginalisé par les populations d’haplogroupe I sur la frontière Nord de la zone habitable européenne [cf. carte Q] ; et qu’il se maintint longtemps en cette position refuge peu attractive, en suivant les fluctuations de sa latitude qui dépendaient des oscillations climatiques. Enfin, outre des porteurs de I et de C1a2, il est possible que cette frontière mouvante ait également abrité des porteurs de A1b qui étaient les vestiges des populations *Foliacéesantérieures aux premières incursions *Aurignaciennes dans le Nord [cf. carte O]. Depuis la carte R, nous avons cessé de représenter par une couleur spécifique ces vestiges des populations *Aurignaciennes et *Foliacées septentrionales, parce que nous avons fait l’hypothèse que les rigueurs du LGM avaient créé les conditions d’un brassage ethnique dans tout le Nord de la zone habitable ? Mais on ne peut pas exclure la persistance d’une certaine stratification écologique des populations locales qui se seraient toutes repliées vers le Sud au cours du LGM, mais sans changer fondamentalement l’équilibre de leurs rapports ? Laissant alors des lignées patrilinéaires variées repeupler la Grande-Bretagne et le Doggerland dès le début du Tardiglaciaire ? Ainsi, malgré le LGM, la succession chronologique des peuples *Foliacé (A1a*, A1b, BT* ?), puis *Aurignacien(C1a2, CT*, F* ?), puis *Gravettien (I*, I1a, I1b, I2a), pourrait avoir conduit à la co-expression régionale prolongée de tous ces haplogroupes dont certains réussirent à franchir le seuil de l’époque néolithique. De telle manière que le peuple *Creswellien pourrait avoir rassemblé une collection d’haplogroupes unifiés par un même mode de vie, en partie hérité du Sud magdalénien et en partie dicté par les nécessités de la survie en des lieux peu hospitaliers et donc faiblement peuplés.
Récemment, des données génétiques ont permis de se demander si l’homme C1a2 de Cheddar et l’homme C1a2de la Brana (d’âge Holocène l’un et l’autre) n’avaient pas eu une pigmentation foncée ? Hélas, poser des questions scientifiques de cette sorte, génère immédiatement des ondes médiatiques parasites. Or, à ce stade des connaissances, rien ne vient véritablement prouver que ces hommes anciens avaient véritablement une pigmentation foncée ; et il est donc prudent de ne pas trop échafauder d’hypothèses.
- Parallèlement au Creswellien, le technocomplexe à pointes pédonculées persistait toujours au Dryas-3. Depuis l’Alleröd il était partagé en deux grands variants : le Bromme / Lyngbien (LYN) qui occupait la toundra périglaciaire (Doggerland, Danemark, Suède du Sud, côte balte jusqu’en Courlande) et l’Ahrensbourgien (AHR) qui occupait la partie occidentale de la grande taïga du Nord de l’Europe (Nord de la France, Benelux, Allemagne du Centre). En rapport avec l’écologie des régions inhospitalières où il était implanté, le Lyngbien constituait une culture matérielle plus pauvre que l’Ahrensbourgien. Tous ces gens étaient les héritiers des *Magdaléniens qui – en plusieurs vagues – avaient repeuplé le Nord de l’Europe depuis le début du Tardiglaciaire.
- Entre l’Oder et la Vistule, le groupe de Tarnova (TAR)faisait la transition entre l’Ahrensbourgien et le Swidérien de Pologne [cf. ci-dessous]. Cette transition culturelle reflétait peut-être une population dont les racines *Magdaléniennes étaient plus marquées que celles des populations établies plus loin vers l’Est ?
- Plus au Sud, l’Allemagne du Sud et la Tchéquie conservaient toujours une industrie Epi-Magdalénienne (EPI MAG) c’est-à-dire d’allure plus traditionnelle que ne l’était l’Azilien. Toutefois, ces régions conservatrices n’échappaient pas totalement à l’azilianisation, comme le reste de l’Europe.
- En France, en Suisse et sur la péninsule ibérique, c’est-à-dire dans les régions recouvertes d’une forêt mixte et tempérée, l’Azilien (AZI) se poursuivait.
- Les habitants des côtes méditerranéennes espagnoles et françaises avaient une culture Aziloïde (AZÏ) qui était elle-même une extension du Bouvérien (BOU) de Provence Orientale et d’Italie du Nord, dont la base était épigravettienne récente (EPI GRA). Nous avons déjà fait l’hypothèse de mouvements Humains venus en France depuis l’Italie au cours de l’Alleröd [cf. carte Y], ne serait-ce que parce qu’il faut bien expliquer pourquoi R1b*-L754* – entré en Europe balkanique au Tardiglaciaire [cf. carte V] – est observé en France méridionale au cours du Dryas-3 (site des Iboussières).
- En Europe Centrale méridionale, balkanique et danubienne, l’Epigravettien récent (EPI REC) était lui aussi azilianisée, particulièrement en Italie et en Roumanie. Dans ces régions, les nouveaux haplogroupes tardiglaciaires n’avait certainement pas entièrement supplanté les vieux haplogroupes *Gravettiens issus de I. La géographie actuelle de l’haplogroupe I nous indique même que les monts des Balkans, les Carpates et le bloc Corse-Sardaigne conservaient une vieille population indigène. A l’évidence, nous retrouvons une fois de plus le maintien de populations anciennes dans des zones refuges caractéristiques (montagnes, îles). Enfin, pour les mêmes raisons, le vieil haplogroupe *Aurignacien C1a2, encore plus ancien, survivait toujours dans certaines régions montagneuses d’Europe, au moins dans les Pyrénées et dans les Carpates ; témoignage qui donne l’occasion de rappeler que les zones refuges sont aussi des zones d’empilement de plusieurs strates populationnelles successives et donc, vraisemblablement, d’entrechoquement de leurs langues à l’origine de multi-créoles.
Europe Orientale
L’examen des écozones du Dyas-3 fait apparaître que le Desnanien (DES) s’étendait dans la forêt boréale qui avait recouvert le bassin oriental du Dniepr, tandis que le Swidérien (SWI) reposait plutôt sur la forêt toundra qui recouvrait la Pologne. Il s’agissait de deux cultures très voisines, qui résultaient peut-être l’une et l’autre de l’interaction entre le substrat indigène *Epigravettiend’haplogroupe I, des groupes magdaléniens venus d’Europe Occidentale au Bölling et à l’Alleröd [cf. cartes X & Y] et des tribus ‘’vieux-R1a’’ venues de l’Est au cours de l’Alleröd [cf. carte Y] ? Il est possible que l’Estonie, devenue swidérienne au temps de l’Alleröd, ait été abandonnée au cours du Dryas-3 ? Au début de l’Holocène, la culture de Kunda prolongera le Swidérien [cf. atlas n°4].
Au Nord de ces peuples, le Lyngbien (LYN) du Nord de l’Europe Occidentale se prolongeait sur les rivages de la Baltique. Nous avons vu qu’il s’agissait d’une culture adaptée à la toundra [cf. ci-dessus].
Les peuples de Russie et d’Ukraine pourraient eux aussi avoir été le produit de la rencontre entre le *Peuple R1a du Nord et les indigènes *Epigravettiens les plus orientaux ; lesquels avaient eux-mêmes été enrichis dans le passé par plusieurs vagues d’apports sibériens occidentaux haplogroupe N2 et formes mineures de l’haplogroupe Q). Dans la région steppique – qui avait déjà l’étendue que nous lui verrons tout au long de l’atlas n°4 et que nous lui connaissons encore – les steppes de la Basse-Volga et de l’Oural étaient peut-être peuplées de tribus R1a dont le faciès culturel Microlithique Paléolithique Supérieur Récent (MIC PSR) pourrait être appelé Volga-Oural (VOL OUR). Dans la forêt boréale russe, la base haplogroupale R1a pourrait avoir été importante chez les peuples MIC PSR de la Haute-Volga et de la Kama ; culture que nous pourrions appeler Volga-Kama (VOL KAM).
Les steppes pontiques abritaient peut-être une population davantage mêlée où entraient un plus grand nombre d’indigènes I2 parallèlement à des R1a intrusifs avec lesquels ils étaient co-auteurs d’un Mésolithique des Steppes (MES STE).
Enfin, les peuples mal connus du Nord de l’Europe Orientale – potentiellement demeurés à base indigène *Gravettienne et *Kostenko-Gorodstovienne marquée – se partageaient la forêt toundra et la toundra, avec une densité de population probablement très faible ; même chez ces populations extrême, un Microlithisme Paléolithique Supérieur Récent (MIC PSR) semble cependant avoir diffusé. La base ADN-Y devait être mêlée, mais contenir encore des anciens haplogroupes comme C1a2, autrefois attesté à Sungir [cf. carte P].
Contrairement à ce qui est souvent avancé, aucune de ces populations du Nord de l’Europe Orientales ne pouvait contenir les ancêtres patrilinéaires des Ouraliens qui peuplèrent la région bien plus tard. Ce point important pour le peuplement du continent européen sera abondamment discuté dans l’atlas n°4. Nous postulons qu’au Dryas-3, les ancêtres patrilinéaires des peuples Ouraliens d’Europe stationnaient en Mongolie [cf. ci-dessus].
Enfin, le Nord-Caucase devait être – entre autres haplogroupes venus s’y réfugier – un conservatoire des anciens *Kostenkiens C1b* en qui il faut voir les ancêtres linguistiques des peuples Nord-Caucasiens actuels et une petite partie de leurs ancêtres patrilinéaires. Puisque les langues nord-caucasiennes sont encore aujourd’hui rattachables à la macro-famille linguistique Déné-Caucasienne – fortement associée à l’haplogroupe C – on peut être assuré que ces langues anciennes étaient parlées dans la région au Dryas-3. A cette époque de lointaines sœurs de cette langue ancienne – mêlée à des éléments gravettiens plus récents, liés à l’haplogroupe I – existaient toujours au Nord de l’Espagne où vivaient des tribus C1a2 ancêtres linguistiques des Basques. Bien que cela ne puisse pas être prouvé, nous pouvons faire l’hypothèse que la même situation linguistique prévalait dans les Carpates, ainsi qu’en Cappadoce où les tribus C1a2 n’étaient peut-être pas encore totalement assimilées à leurs voisins arrivés plus récemment.
C’est sur le paysage ethnolinguistique, haplogroupal et culturel que nous venons de détailler que se conclut la longue période de 107.000 ans de ce qu’il est convenu d’appeler la ‘’dernière glaciation’’.
La période Holocène qui va suivre connaitra de nombreux bouleversements ethnolinguistiques, haplogroupaux et culturels qui mettront en place le Monde que nous connaissons dans chacun de ces trois domaines. Cette époque qui verra l’émergence de notre civilisation productiviste, étatique et urbaine sera détaillée dans le quatrième volume de l’atlas consacré à la période comprise entre les années 9600 et 700 AEC.