E – 2.0 à 1.9 MA AEC TIGLIEN C4
Complexe interglaciaire TIGLIEN – TIGLIEN-C4
= Glaciation d’OLDUVAI
= Glaciation MATUYAMA Moyen
MIS 76, MIS 75, MIS 74, MIS 73, MIS 72, MIS 71, MIS 70, MIS 69, MIS 68

Carte – 2 000 000 à 1 900 000 AEC – Complexe interglaciaire tiglien – Glaciaire tiglien C4
Climat
Au sein de l’hyper-complexe climatique Tiglien, le TIGLIEN-C4 fut globalement un complexe glaciaire assez intense qui se développa au travers de 9 MIS froids et chauds. En effet, vers 2.000.000 AEC, pour la première fois depuis le Prétiglien (environ 500.000 ans plus tôt), des calottes glaciaires continentales s’installèrent de nouveau aux latitudes élevées, quoique avec une extension probablement assez modérée si on les compare à celles des grandes glaciations de la seconde partie du Pléistocène. Nous ferons toutefois remarquer que les glaciations anciennes sont mal connues car leurs traces ont été abrasées par celles des glaciations plus récentes. A ce stade de nos connaissances, il n’est donc pas possible d’exclure que l’un ou l’autre des MIS pairs du Tiglien-C4 ne furent pas des épisodes glaciaires très intenses ; en particulier le MIS 68.
Comme au tout début du Pléistocène, cette nouvelle glaciation coïncida également avec une nouvelle inversion du champ magnétique terrestre dite ‘’inversion d’OLDUVAI’’ : il s’est agi d’une ‘’courte’’ période de polarité ‘’normale’’ (pôle magnétique au Nord) qui dura un peu plus de 200.000 ans et qui entrecoupa la longue période Matuyama, de polarité globalement ‘’inverse’’ (pôle magnétique au Sud).
Outre la glaciation aux latitudes et altitudes élevées, on observe aussi un pluvial africain qui survint entre 2.000.000 et 1.600.000 AEC. C’est ce qui explique la présence de lacs sahariens et la disparition des déserts eurasiens sur les cartes E à H. En général, les épisodes glaciaires sont pourtant des épisodes secs. Mais ce qui pourrait ressembler à un climat incohérent est peut-être un simple artefact de mesures découlant d’une compaction documentaire, car les épisodes froids et tempérés du Tiglien-C4 se succédèrent rapidement. La carte E combine toutes ces variations en une seule image qui montre à la fois une calotte glaciaire continentale et un Sahara moins sec que le nôtre.
Australopithécinès anciens
Sans dédouaner les Habilinès qui pourraient les avoir précédés en Afrique du Sud, le développement des Ergaster [cf. ci-dessous] pourrait avoir été un élément déterminant de la disparition générale des Australopithèques qui semblent précisément s’être éteint vers l’époque de la glaciation d’Olduvai. En conséquence, nous cesserons de les représenter sur les cartes.
Habilinès et Paranthropes
Plus tard, vers 1.500.000 AEC, les Ergaster seront certainement responsables de l’extinction des Habilinès (Homo habilis et Homo rudolfensis), à l’exception d’Homo naledi qui poursuivra encore longtemps son chemin en Afrique du Sud.
De leur côté, les paisibles Paranthropes existeront encore pendant quelques centaines de milliers d’années supplémentaires ; probablement parce que leur régime alimentaire presque exclusivement végétarien les protégea plus longtemps d’une compétition alimentaire quotidienne avec les Humains.
Ergaster, les Habilinès et probablement les Paranthropes étant TOUS capable de créer des outils oldowayens (OLD) / ‘’mode 1’’, il est difficile de repérer les groupes en l’absence de vestiges humains, et même y compris devant des fragments de fossiles en raison de la grande variabilité interne à chaque population. On attribuera encore cependant toute l’Afrique du Sud aux deux formes anciennes, Habilinès et Paranthropes.
HUMAINS Afrique
Le double contexte d’une glaciation intense et d’une inversion du champ magnétique terrestre pourrait avoir constitué un excellent cadre pour l’apparition d’Homo ergaster vers 2.000.000 AEC. Mais si cela était vrai, il faudrait que son expansion ait été vraiment très rapide puisque Ergaster sera déjà bien installé en Eurasie vers 1,8 MA. C’est la raison pour laquelle nous avons préféré le faire émerger vers 2,2 MA, au cours de l’épisode glaciaire précédant, même si rien ne permet vraiment de l’affirmer [cf. carte C].
En revanche, l’intensité de la glaciation du Tiglien-C4 fut peut-être ce qui autorisa la première sortie des Humains hors d’Afrique sub-saharienne ? Ce que les Australopithèques et les Habilinès ne semblent jamais avoir fait avant eux ! En effet, dès l’Interglaciaire suivant, v. 1.800.000 AEC, on trouvera des Ergaster anciens à la fois en Afrique du Nord (Aïn Hanech), en Géorgie (Dmanisi) et probablement aux Indes (Riwat) [cf. carte F].
Par où les Ergaster sont-ils passés pour coloniser l’Eurasie ? Comme nous l’avons vu, le Nil semble avoir cessé de couler en continu à la fin du Prétiglien et avoir été remplacé par une série de petits oueds indépendants entrecoupés de dunes ; ce qui rendit cette voie désertique peu praticable pour les faunes sub-sahariennes [cf. carte A]. Toutefois, la voie du Nil pourrait avoir été rétablie épisodiquement pendant la très longue et très mal documentée période tiglienne dont le climat fut très fluctuant. Il n’est donc pas possible d’exclure cette voie directe pour expliquer l’arrivée des Ergaster en Eurasie.
Cependant, un passage par l’Arabie est plus probable. En effet, lors des périodes glaciaires intenses il arrive que la baisse du niveau des mers soit suffisante pour faire émerger des ponts de terres qui vont temporairement réunir des régions habituellement séparées. L’un des épisodes froids de la glaciation d’Olduvai fut-il suffisamment intense pour faire apparaitre un pont de terre dans le détroit de Bab-el-Mandeb (entre l’Afrique de l’Est et l’Arabie du Sud) ? Probablement pas. Toutefois, lorsque le niveau de l’Océan mondial atteint la côte – 100 mètres, ce détroit devient un très étroit chenal dont on aperçoit l’autre rive au niveau des îles Hanish et Zugar, et qui peut donc facilement être franchi à vue par les animaux. De fait, on retrouve effectivement des vestiges oldowayens / ‘’mode 1’’ au Yémen et sur la côte Ouest de l’Arabie, c’est-à-dire au long d’une route conduisant directement au Levant ; puis, à partir de ce grand carrefour routier, en direction de la Géorgie. Ces vestiges ne sont toutefois pas datés. Il est également possible que d’autres bandes humaines aient longé la côte Sud de la péninsule arabe, pour parvenir au détroit d’Ormuz qui était alors exondé, et donc pour finalement déboucher sans obstacle dans ce qui est aujourd’hui l’Iran.
Vers 1.900.000 AEC une oscillation glaciaire plus intense que les autres pourrait avoir autorisé ce passage vers l’Arabie, faisant du premier ‘’Out of Africa’’ ce que l’on serait également en droit d’appeler un ‘’Through Arabia’’ ! Nous verrons bientôt qu’il ne s’est agi là que de la première pulsation d’une série d’au moins 5 ‘’Out of Africa / Through Arabia’’ majeurs survenus dans l’histoire des Humains. C’est ainsi que beaucoup plus tard, rejouant pour son compte la colonisation du continent eurasien, l’Homme moderne empruntera exactement la même route pour sortir d’Afrique à son tour [cf. atlas n°3, carte A].